Martin Heidegger, L’histoire de l’estre, Gesamtausgabe 69
Stéphane Domeracki, lycée Galatasaray d’Istanbul, publiera en 2023 « 100 Reproches à Jackie Derrrida. Spectres métapolitiques de Heidegger ». Il évoque la publication en français de L’Histoire de l’estre. 1. L’histoire de l’estre (1938-1940) 2. Koinon. à partir de l’histoire de l’estre (1939-1940) (Die Geschichte des Seyns), de Martin Heidegger, traduit de l’allemand par Hubert Carron et Pascal David, Gallimard, « Bibliothèque de philosophie », 256 p., 28 €, numérique 20 €.)
Pas un détail de l’histoire (de « l’estre »). Heidegger encore célébré par Le Monde
Une énième recension élogieuse des écrits ultra-nazis de Martin Heidegger vient d’être rédigée par le préposé aux essais philosophiques pour Le Monde, Nicolas Weill, accompagnant la sortie en français d’un des volumes des œuvres dites intégrales, la fameuse Gesamtausgabe.
Problème : ce volume de 1939-40, qui nous apprend que « le communisme » n’a « rien d’humain » (GA69, p.195) et entreprend d’en expliciter la provenance juive – jusqu’à évoquer un grand guignolesque « bolchévisme (1) anglais (2) » – est parmi les plus haineux et vénéneux du penseur, qui enchaîne confusionnismes (le libéralisme est jugé « communiste » (3), comme ailleurs le nazi Carl Schmitt (4) sera décrété « libéral »…) et théories du complot (5). Appelant à l’anéantissement, son antisémitisme ravageur s’y fait aussi public et assumé que dans les Cahiers noirs, qu’il prolonge. Comment dès lors comprendre que la recension proposée soit encore une fois dégoulinante de connivence, d’une complaisance absolument dégoûtante ? Cela commence vraiment à devenir problématique pour le journal français le plus réputé, dont les lecteurs seraient en droit d’attendre une recension lucide.
Machenschaft, magouille éditoriale
Le volume 69 est un de ces traités ésotériques par lesquels Heidegger justifie l’horreur nazie comme nécessité « historiale » commandée in fine par « la technique », les « magouilles » juives visant à entraîner tous les peuples dans le calcul et le déracinement ; il est, on le comprend, décisif, n’a bien sûr jamais été lu par ceux prétendant être les plus grands interprètes (6) de Heidegger, et est intitulé de façon pompeuse L’histoire de l’être. Il comporte un contenu en tous points comparables à celui sur-nazi des Cahiers noirs ; d’ailleurs, une partie de celui-ci reprend tout bonnement une partie du volume 95. Il est finalement « traduit » dans la foulée des volumes 94 à 96 (on comprend qu’ils veuillent faire une pause avec le 97, probablement le plus abject), mais il aurait pu l’être depuis deux décennies. De toute façon, il vaut mieux le lire en allemand si possible, et en PDF sur un site pirate pour ne pas payer les entreprises qui se font de l’argent sur ces matériaux apologétiques et spéculatifs nazis. La publication de ce tome rappelle en tout cas un véritable scandale intervenu lors de la publication de ces écrits extimes de Martin Heidegger : un passage inédit d’un antisémitisme délirant en avait été caviardé, censuré par l’éditeur Peter Trawny sur demande du probable criminel de guerre Hermann Heidegger, le fils de ayant trouvé intéressant de cacher une fois de plus la poussière brune sous le tapis :
« il faudrait se demander sur quoi est fondée la predestination de la communauté juive à la criminalité planétaire » (passage qui devrait se trouver à GA69, p.78 – mais censuré)
La « traduction » française commandée par Gallimard rend ce passage décisif (7) sur la « prédestination » par une simple « prédisposition », ce qui cherche là aussi à noyer le pois(s)on puisque cela pourrait éloigner les lecteurs attentifs de toute la problématique du Geschick des Seins (avec un i, l’envoi destinal de l’Être de l’étant) dans cette fameuse Geschichte des Seyns (histoire de l’être, avec un y). Une prédestination au crime de la « juiverie » : c’est ce que nos deux essais sur Heidegger et sa solution finale essaient de présenter, en entrant dans les méandres délirants des spéculations « ontologico-historiales » de ce penseur toujours porté aux nues.
Nicolas Weill extatique et complice de cette entreprise éditoriale
Le journaliste du Monde affirme se défendre de toute « empathie » avec le personnage Martin Heidegger dans sa recension, estimant ce traité « déroutant » : il est pourtant censé avoir publié un essai déjà semi-apologétique sur les Cahiers noirs, le lecteur serait donc en droit de recueillir quelques explications et non simplement des perplexités. Le nazisme certes particulier de Heidegger commence, avec les travaux d’Emmanuel Faye et de Sidonie Kellerer dont il ne dit pas un mot, a être désormais bien documenté. Navrant, Weill préfère renvoyer avec dilection aux travaux d’obstruction de ceux qui présentent cet écrit immonde ; il s’étonne tout de même que Pascal David rende « estre » pour l’« Être », « avoindre » pour « advenir », « allégie » pour Lichtung (« clairière » ou « éclaircie » », mais tient à préciser que : « leur version est néanmoins lisible et utilement appuyée par des notes. » Il n’est donc pas très étonnant qu’il fasse part de ses difficultés de compréhension par ailleurs, le rôle des « traductions » françaises étant toujours d’amortir la violence initiale des écrits heideggeriens, et de dérouter, précisément, les lecteurs, qui pourraient chercher à comprendre en quoi consiste le lien entre judaïsme, technique et crime chez Heidegger. Weill préfère rappeler qu’il aurait été sans aucun doute « un penseur de premier plan », que par rapport aux nazis officiels il aurait écrit « à contretemps », qui travaillerait à « préparer la rencontre avec l’être, sa non-violence, son silence, son calme, sa tendresse même. » Un tel irénisme laisse songeur tant il apparaît difficile d’imaginer quelque candeur de l’auteur d’une telle recension, qui semble pourtant admettre par ailleurs bien comprendre qu’il est bien question des pires des violences. Mais il semble comme hypnotisé par la plume de Heidegger, qui externalise la violence : celle-ci ne serait que le fait des Juifs et de leurs laquais « s’auto-anéantissant », l’Allemagne secrète serait elle du côté de la « tendresse ». Malgré l’obstination de Robert Faurisson, élève de Jean Beaufret, à nous prouver le contraire, les 86 juifs gazés, au camp de Natzweiler-Struthof, pour la collection de crânes de « commissaires judéo-bolchéviques » de la Reichsuniveristat Strasbürg, ne se sont pas « auto-anéantis » et Josef Kramer, le directeur du camp n’était pas un « tendre ». Cela dit, Heidegger n’aurait pas classé Kramer dans les tendres, mais dans les laquais, toutefois nécessaires pour faire « advoindre » la tendresse ! Nicolas Weill se contente tout juste de répéter le discours suprémaciste heideggerien, si prompt à séduire des professionnels de la philosophie qu’il n’est pas nécessaire de pousser beaucoup, comme l’a bien montré Bourdieu, pour qu’ils se prennent pour une sorte d’aristocratie : « Le style de Heidegger, en ce moment de sa pensée, exige certes de l’attention. Il sollicite déjà l’endurance requise à cette élite qui veut concevoir un au-delà des « temps nouveaux », l’horizon d’un « autre commencement » – qu’un instant Heidegger a cru l’apanage des Allemands : l’être pourrait enfin se découvrir en sa vérité, et livrer le fin mot d’une histoire que la modernité a recouverte de faux-semblants ». Weill, qui n’a peut-être pas lu tous les Cahiers noirs publiés en Allemagne, croit que cette histoire de l’être n’aurait aucun lien avec les horreurs inhumaines qu’il appelle pourtant de ses voeux : « Mais ne rêvons pas. Heidegger n’a jamais défini le contenu de cette apocalypse. Ce silence est peut-être un signe de notre ultime liberté. » C’est faux : Heidegger a écrit dans un texte contemporain : « Leur dernier acte sera que la Terre elle-même explose en l’air et que l’humanité actuelle disparaisse. Ce qui n’est pas un malheur, mais plutôt le premier nettoyage de l’Être de sa profonde défiguration par la suprématie de l’étant » (GA96, p. 238).
Rappeler la violence extrême de ce traité est un devoir
La « liberté » du lecteur dont il serait question ici serait certainement de projeter n’importe quoi à la place de l’appel au meurtre disséminé dans la Gesamtausgabe, lors même que des passages montrent pourtant qu’il vouait le nazisme à la mission maudite de pousser le judaïsme dans ses derniers retranchements, à l’endosser pour l’achever ; il faut comprendre que pour Heidegger, le nazisme n’est qu’une rémanence d’une domination occulte juive ; il parle d’ailleurs dans ce volume d’ « inclusion renouvelée et radicale dans la manigance » (GA69, p.119) ; or, dans les pires cahiers, il écrit : « Wenn erst das wesenhaft « Jüdische » im metaphysischen Sinne gegen das Jüdische kämpft, ist der Höhepunkt der Selbstvernichtung in der Geschichte erreicht , soit : « Quand l’essentiellement « judaïque » combat au sens métaphysique contre le judaïque, alors l’apogée de l’auto-annihilation est atteinte dans l’Histoire ». Le traité L’histoire de l’être n’est autre que ce baratin spéculatif où le peuple le plus enraciné se verrait chargé par l’histoire de devoir mener « la technique » à ses ultimes conséquences contre ceux qui l’ont promu : à la solution finale. Croire comme Weill que Heidegger se contenterait de « critiquer les nazis », Jünger et « l’héroïsme » dans cet écrit, c’est se proposer une lecture superficielle de la façon dont il justifiait le national-socialisme et le racisme même « biologique » dont la légende rose assure qu’il le repousserait. Sa métapolitique de l’être ne saurait s’opposer à ce « destin » : « La pensée de la race, cela veut dire que le fait de compter avec la race jaillit de l’experience de l’être en tant que subjectivité et n’est pas quelque chose de « politique ». Le dressage-de-la-race [Rasse-zuchtung] est une voie de l’affirmation de soi [Selbstbehauptung] en vue de la domination. Cette pensée vient a la rencontre de l’explication de l’Être comme « vie », c’est-a-dire comme dynamique » (GA69, p.70) Les nazis officiels (8) n’écoutant pas cette narration heideggerienne resteraient certes du côté des « cliquetis des chaînes en lesquelles l’abandon de l’être nous retient captif » (GA65, ibid.), mais leur charge historiale consisterait à mener à sa fin cette souveraineté juive mondiale afin de pouvoir passer à une autre seigneurie « Seigneur est, celui qui règne sur la puissance. Le pur oui a la puissance comme essence de la réalité et l’esclavage le plus bas. Le seigneur de la puissance est, celui qui change son essence » (GA69, p.21). Par ce genre de textes, Heidegger semble mettre à distance la volonté de puissance nazie, mais ce serait vite oublier qu’il la bénit comme « nécessité historiale » terminale par ailleurs : « Le soin de la race » est certes une « opération de nivellement » (p.70) mais c’est surtout « une mesure nécessaire, par laquelle elle pousse à sa fin la modernité. »(ibid., p.223, « Puissance et race ») tout en tirant à vue sur la manigance juive, pleurnichant quelque « broyage conjoint de la germanité et de la russéité dans l’empire de la machination » (ibid., p.77), passage qui plaira aux amis antisémites de Douguine. Il est aussi notable que son complôtisme menant quelque « guerre invisible » voit autant la machination dans la guerre que dans la paix, les guerres mondiales ne servant que de paravent pour le vrai combat caché (9).
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Pourquoi l’article de Weill n’explique rien de tout ceci ? Ne serait-ce, déjà, parce qu’il ne faut jamais lire les pseudo-traductions françaises que pour saisir les stratégies d’enfouissement des problèmes par les admirateurs de Heidegger : Machenschaft , terme clé (10), sera ici rendu par « faisance », sans analyse de la mise en équivalence décisive avec le poétique, la ποίησις (GA69, p. 46-47), thème central comme chacun le sait, chez cet auteur.
Notes:
(1) Rappelons que son idole Adolf Hitler aimait parler d’une désastreuse « bolchévisation » de la Rome Antique…
(2) « Le « communisme » est la constitution métaphysique des peuples dans la dernière section de l’achèvement des temps modernes, en ceci qu’il doit dès le début des temps modernes placer son essence, bien qu’encore couverte, dans la puissance. Politiquement, cela advient dans l’histoire moderne de l’État anglais. Lequel est – à le penser selon son essence, abstraction faite des formes actuelles des gouvernements, des sociétés et des croyances – la même chose que l’État de l’Union Soviétique, avec seulement cette différence que là un gigantesque travail de simulacre donne à tout déploiement de violence l’apparence inoffensive et évidente de la moralité et de l’éducation des peuples, alors qu’ici la « conscience » moderne se dévoile avec moins de scrupule, encore que non sans la prétention à réaliser le bonheur des peuples, dans son essence de puissance. La forme bourgeoise-chrétienne du « bolchévisme » anglais est la plus dangereuse. Sans l’anéantissement de ce dernier, la modernité persiste encore. L’anéantissement définitif ne peut cependant avoir lieu que par la figure de l’auto-anéantissement essentiel, lequel sera amené avec la plus grande force par le surpassement de sa propre apparence d’essence dans le rôle de sauveur de la moralité. » (GA69, p. 208-209)
(3) Le communisme devient le signe de la dévastation juive, laquelle appellera des contre-mesures draconiennes : « L’événement métaphysique de l’achèvement de la modernité est l’autonomisation du « communisme » en vue de la constitution historiale de l’époque achevée de la perte du sens. (…). La perte du sens désigne donc le manque de lumination par l’être. » (GA69, p. 57)
(4)« Ici le nazisme semble rabattu sur sa rémanence communiste aussi, le surhomme n’étant pour Heidegger au fond que le reflet du dernier homme qu’il cherche à anéantir, puisqu’il est pris dans sa souveraineté : « Le « Communisme » n’est rien du tout d’humain. La sous-humanité tend à l’esclave, le surhomme tend à être le seigneur seulement apparent de sa
propre puissance communiste » (GA69, p. 195-196) Le confusionnisme est ici complet.
(5) Heideggger théorise son mépris de toute démocratie, et cela va plaire dans la complotsphère : « « Mais la promotion de cette apparence ne peut pas être ce qui accuserait les dirigeants politiques en tant que tromperie, tout aussi peu comme l’opinion publique, la souveraineté ne peut jamais être « populaire », quand seule la stupidité peut valoir. L’apparence « démocratique » est suggérée de la même manière par ceux régis et qui sont entretenus comme par ceux qui en ont la « gouvernance » ; car par cette apparence, le pouvoir « appartient » à tous et serait réparti entre tous, pendant qu’il n’appartient en vérité à personne, exprimant l’essence de la puissance, celle-ci demeurant en tant que telle la toute puissance méconnue comme dépotentialisation de tous ceux qui ont puissance, qui, dans ses airs de conduire le pouvoir à sa possibilité révèle et planque bizarrement la « gouvernance » (GA69, p. 189-190) Ou encore : « l’élan de pouvoir déchaîné et inconditionné inonde toutes les résistances, parce qu’est seul admis comme réel ce qui se tient déjà dans la domination de la magouille. » (GA69, p. 196) Le premier anti-vaccin gilet jaune pro-Poutine venu sera ravi.
(6) Ni Reiner Schürmann, ni Jacques Derrida, Philippe Lacoue-Labarthe, Jean-Luc Nancy, Catherine Malabou, ou Giorgio Agamben ni aucun des autres totems de l’heideggerisme inorthodoxe n’ont travaillé ces volumes, qui était pour la plupart d’entre eux, pourtant, à leur disposition. Belhaj Kacem croit pouvoir ânonner Schürmann récitant lui-même les Beiträge, mais ce dernier n’est qu’une pièce du dossier qu’il a, comme ses prédécesseurs, gentiment survolé. La faillite totale de ces lecteurs, prenant par dessus la jambe chaque nouveau volume étudié, n’est toujours pas prise en compte par l’historiographie ronronnante : trop de carrières de seconds couteaux sont en jeu.
(7) Décisif à bien des égards, mais ne serait-ce que pour comprendre ce passage qui sans cela donnait l’impression que Heidegger ne critiquait que les dictateurs : « Les criminels en chef planétaires, pour ce qui est de leur essence, suite a l’inconditionnel asservissement qui est le leur a l’égard de l’effort fait pour s’emparer inconditionnellement de la puissance, sont tous à égalité entre eux » […] travestir la criminalité sous l’aspect de l’inoffensif, tout en en présentant l’accomplissement comme « moralement » nécessaire dans l’ »interêt » meme de l’humanité. Les criminels planétaires de la toute dernière modernité dans laquelle seulement ils deviennent possibles, puis nécessaires, peuvent être comptés sur les doigts d’une seule main. Les grands criminels en question font partie d’une époque qui determine l’essence inconditionnée de la puissance. Tout semble se passer comme si la « criminalité »qui est la leur ne se laissait pas « juger » a l’aulne de critères moraux et juridiques : « ≪ ≫ aussi n’y at-il pas de châtiment qui puisse ëtre assez grand pour dompter de tels criminels. L’Enfer lui-meme est trop petit […] auprès de ce que ces criminels que rien ne retient portent ainsi a la ruine »: l’éthique, le droit et les moeurs entre autres details « (GA69, § 61 Macht und Verbrechen).Ce n’est donc pas, on le comprend à l’extrait censuré par seulement à Hitler et à Staline, suppôts terminaux de l’accomplissement de l’enjuivement, que s’en prend Heidegger, mais bien a ceux qui ont fait de l’errance un destin mondial appelant le contrecoup allemand. Contrecoup lisible ici : « L’expérience authentique, qui a été assignée à la génération actuelle, laquelle n’est cependant pas capable de reprendre, de saisir, et de rejoindre son essence initiale, est l’explosion effrénée de la criminalité absolue de l’essence moderne de l’homme de par son rôle dans l’autonomisation du pouvoir dans la machination. Le crime [Verbrechen] : ce n’est pas une simple rupture [Zerbrechen], mais la dévastation de tout dans le fragmenté. Le morcelé [das Gebrochene] est depuis le commencement interrompu [abgeprochen] et réparti dans le domaine du fragile [des Brüchigen]. Là demeure seulement encore une possibilité de l’être dans la voie de l’ordre. La mise en ordre est seulement la réciproque [le revers, Das Gegenspiel] de la criminalité comprise ontologico-historialement (qui n’est rien de moralo-juridique). » (GA96, p. 266)
(8) Rosenberg, Schmitt et consorts, sont mêmes estimés complices, d’une certaine façon d’un judéo-christianisme avec lesquels ils rentreraient dans une nécessaire danse macabre : « « Christentum »und « Biologismus » .Die bruderliche Scheinfeindschaft » « chretienté et biologisme : la fausse hostilité fraternelle » (GA70, p.143)
(9) Le thème de la « drôle de guerre » prend un tour « ontologico-historiale par lequel Heidegger se fait expert en géopolitique comme les pires des commentateurs de l’invasion russe de l’Ukraine sur internet : « L’étrangeté de cette guerre mondiale se manifeste de nombreuses manières […] Les événements martiaux sont comme des intermèdes à la guerre réelle qui n’est pas accomplie, quand on préfère les chercher dans les « campagnes » médiatiques, qu’on les déplace vers l’« activité diplomatique » ou bien encore qu’une « guerre économique » les modifie. Et pourtant, et surtout : Tout cela est encore inclus dans la guerre apparemment inexistante, sans que perce à jour le droit et la façon dont il pourrait même se dessiner. » (GA69, p.180.)
(10) « Manigance – Le violent et le brut, le rusé et l’imprévisible appartiennent à l’essence de la malignité. Mais le « mal »,même s’il n’est pas appréhendé « moralement » et utilisé pour dévaluer et provoquer le dégoût, ne rencontre par l’identification métaphysique que l’apparence de la manigance, sur laquelle la conscience de soi manigancée peut encore frapper, sans accès au plus haut savoir de son essence. Éprouver la seule malignité de la manigance, cela signifie : s’assoupir toujours à l’intérieur de son innocuité supposée et esquiver l’horreur de son être nu. » (GA69, p.217) Encore un document suggérant que Heidegger n’entend pas que condamner la magouille juive, mais appelle à sa confrontation-reprise discrète, en une mimétologie évidemment discrète.
Articles précédents:
*Dialogue avec Stéphane Domeracki
*Droit d’inventaire des littératures inhumaines
*M.Heidegger, Winke I & II (57-59), GA, IV-101
*M.Heidegger, Vorläufiges (63-70), GA, IV-102
*Misère de la déconstruction des subsomptions
*La chute métaphysique de Marioupol
*M.Heidegger, Engänzungen und Denksplitter (GA91)
*Heidegger, punk ou Charlie Chaplin sans public ?
*Heidegger Babies : G. Granel
*Heidegger Babies: FW von Herrmann
*Derrida pris au « piège »