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Les sites d’« information communautaire » plus dangereux que les antisémites eux-mêmes ?

Déborah revient sur ces sites internet qui oublient les principes de base de la diffusion d’information et préfèrent faire du sensationnel au détriment d’articles vérifiés

Ils reviennent régulièrement dans notre fil d’actualité Facebook, sont partagés par mails, par le cousin, l’ami d’ami et même ceux auxquels on s’attendait le moins.

Ces sites internet, par soif de scandales et d’articles racoleurs, oublient les principes de base de la diffusion d’information, préfèrent faire du sensationnel au détriment d’articles vérifiés.

Pourquoi aujourd’hui ? Cela ne me dérange pas qu’il y ait des journaux de gauche ou de droite, mais ces sites visent délibérément à induire le lecteur en erreur en prétendant lui proposer de l’information non affiliée.

Un de ces sites écrit ainsi « qu’il n’est affilié à aucun parti politique […] et qu’il se caractérise par sa liberté d’expression ». Un simple regard sur leur page « à la une » permet pourtant de voir des opinions politiques claires et pas très nettes. « Obama, président à vie de l’islamo-gauchisme ». On connaît mieux en terme de neutralité.

Le manque d’informations vérifiées, le fait qu’ils n’hésitent pas à désinformer plutôt qu’à informer vient achever de décrédibiliser ces méthodes déjà plus qu’hasardeuses : si les titres d’articles sont racoleurs, les informations sont souvent enjolivées, sorties de leur contexte pour mieux appuyer leurs arguments souvent bancals.

Mais leurs méthodes deviennent véritablement inacceptables lorsqu’ils n’hésitent plus à s’attaquer à certains personnages, derrière ce vernis journalistique, au risque de rentrer dans le pamphlet personnel, dès lors qu’ils ne partagent pas leurs opinions politiques, ou leurs visions communautaires, ou surtout si les positions de cette personne sur le conflit israélo-palestinien ne leur conviennent pas !

Un exemple ? « Le nazi George Soros jure de « démolir » le Président Trump », quelles que soient ses opinions politiques sur le conflit, sur Trump ou bien sa façon de dépenser son argent, rien, je dis bien rien, ne justifie de traiter de nazi un ancien prisonnier d’un ghetto !

Journalisme ou procès d’intention ? Articles d’opinion ou dictature de la pensée ?

À juste titre, nous nous élevons à chaque fois qu’un journaliste ou qu’un homme politique, par facilité, utilise la Shoah en comparaison avec des situations sans aucun lien. Mais comment être légitime, crédible, écouté, quand dans le même temps, des médias se revendiquant de notre communauté vous traitent sans cesse de traîtres, de nazis, et n’hésitent pas à vous mettre un drapeau SS dans le dos ?

Comment combattre le galvaudage des horreurs de la Seconde Guerre mondiale alors même que des sites communautaires y participent ?

Est-ce vraiment ainsi qu’on lutte contre l’antisémitisme, qu’on fait reculer l’antisionisme ?

La dangerosité de ces sites manipulateurs, qui par ailleurs existent de tous les bords, est qu’ils présentent des opinions extrémistes truffées d’informations erronées et mises en avant comme étant des informations de première qualité. Mais ces articles sont partagés maintes fois sur les réseaux sociaux et participent à ce fléau qu’est la désinformation.

La médiocrité de leurs posts n’empêche malheureusement pas la diffusion bien trop importante de leurs insanités.

Savez-vous, lorsque vous partagez l’un de leurs articles, que derrière ces sites se cachent entre autres un des auteurs de sites d’extrême droite condamnés pour incitation à la haine ?

Et si la montée des « anti-sionistes » ces dernières années trouvait ses racines aussi bien dans ce pseudo-journalisme que dans les scandales à répétition de Dieudonné ?

En décrédibilisant l’information, ne décrédibilisons-« nous » pas aussi le but ?

Comment nous plaindre de la désinformation sur le conflit, sur les pamphlets anti-juifs si « nous » agissons de même ?

Comment pouvons-nous continuer à laisser faire ces sites qui, au-delà d’essayer de nous diviser et de nous monter les uns contre les autres, oublient le fait qu’on ne peut combattre la haine en vantant la haine de l’autre.

à propos de l'auteur
Née à Paris, Déborah a suivi des études de droit à la Sorbonne. Directrice de l'EUJS (European Union of Jewish Students) de 2010 à 2012, elle est ensuite passée par d'autres associations juives dont la direction du Bnai Brith Europe avant de revenir à des activités non communautaires. Après 9 ans d'expatriation entre la Belgique Israel et la Grèce, Deborah est revenue à Paris pour la campagne d'Emmanuel Macron en 2017. Elle a ensuite été cheffe de cabinet au Ministère de l'Ecologie auprès de Brune Poirson. Elle est cheffe de cabinet d'Olivier Veran depuis mars 2020.
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