Les geôliers de Sansal, des Gardiens de la Révolution ?

SEMMO n°19 – Savoir Écouter les Maux du Moyen-Orient
Dans ce numéro, les relations Algérie-Gardiens de la Révolution, les tueurs à gage de l’Autorité palestinienne, un supermarché à Gaza, des cris de guerre dans New York.
Info n°1 : les geôliers de Boualem Sansal seraient-ils aussi des Gardiens de la Révolution ?
Elle s’appelle Catherine Perez-Shakdam. Elle a publié un article dans le Jerusalem Post le 23 février 2025, attirant l’attention du monde libre sur les liens qui se tissent entre les Gardiens de la Révolution iraniens et l’Algérie[1].
Catherine Perez-Shakdam est juive et, à présent, clame aussi son sionisme avec fierté. Mais avant, elle était musulmane convertie sunnite, puis chiite. Née en France dans une famille juive, elle a épousé un Yéménite, a travaillé comme journaliste pour la presse iranienne en se faisant passer pour une sympathisante du régime des Mollahs.
Elle a acquis une très grande connaissance du régime, de ses structures et des Gardiens de la Révolution. Elle a même pu interviewer le vrai dirigeant du régime, le Guide Suprême, en 2017[2].

En 2018, elle déclarait sur l’organe de presse iranien Press TV, que la résistance armée était la seule voie possible pour les Palestiniens[3].
Quelques années plus tard, révélant sa véritable identité, elle contribue, entre autres, très activement au blog de Times of Israel en anglais[4].
Catherine Perez-Shakdam met le monde occidental en garde contre le fait que l’Iran était en train de transformer l’Algérie en base des Gardiens de la Révolution. Selon elle :
Il ne s’agit pas tant de coopération entre deux États que d’un signe avant-coureur d’une lutte qui va ravager l’Afrique du Nord, déstabiliser les portes de l’Europe, et déplacer l’équilibre géopolitique de la Méditerranée vers des voies opposées aux intérêts des démocraties.
Cette mise en garde repose sur des rapports des agences de renseignement[5] et sur d’autres sources fiables : l’Algérie est condamnée à devenir l’avant-poste de l’Iran en Afrique du Nord. L’objectif de Téhéran serait, selon Catherine Perez-Shakdam, non seulement d’exercer une influence idéologique, mais aussi d’étendre le champ de ses opérations et sa domination, afin de menacer la sécurité en Europe et au-delà.

Mais ce n’est pas tout. Le Front Polisario, ce mouvement politique armé luttant contre le Maroc pour l’indépendance du Sahara occidental, est soutenu par l’Algérie, et de manière de plus en plus visible, par les Gardiens de la Révolution. On reconnaît là la stratégie iranienne qui consiste à soutenir les acteurs non-étatiques pour étendre sa zone d’influence, comme ce fut le cas pour le Hezbollah au Liban et pour les Houthis au Yémen.
On peut bien sûr craindre que les facteurs de déstabilisation, de la France en particulier, seront multiples avec l’influence croissante de l’Iran dans cette région. De la gestion des flux migratoires de l’Afrique vers l’Hexagone, jusqu’à la politique des otages que l’Iran pratique allègrement et dont on peut se demander si l’arrestation de Boualem Sansal n’est pas un avant-goût, la France, surtout si elle fait preuve de faiblesse, n’est pas au bout de ses peines.
Croyant affronter la séquelles de la colonisation, elle ne s’attend pas à avoir face à elle le bras armé d’un régime islamiste théocratique.
Info n°2 : les allocations palestiniennes aux familles des terroristes ne sont rien d’autre que des primes de tueurs à gage. Et elles ne sont pas supprimées.
Le 10 février 2025, la presse du monde en général, française en particulier, annonçait que l’Autorité palestinienne mettait fin à son système de paiement d’allocations aux familles des prisonniers et martyrs.
On le sait, ces allocations, indirectement financées grâce aux aides financières fournies à l’Autorité palestinienne par l’Union Européenne et par les États-Unis, favorisent non seulement les actes de terrorisme eux-mêmes, mais aussi leur « efficacité ».
Il faut le savoir, les allocations ne sont pas payées en fonction des besoins des familles du terroriste. Le barème mensuel est fonction du nombre d’années de prison auxquelles le terroriste est condamné.
Plus la peine est lourde, et donc plus l’acte a causé de victimes, plus élevée sera l’allocation. En cas de « martyr », c’est-à-dire que le terroriste serait tué au cours ou du fait de son acte, l’allocation pour sa famille sera payée « à vie ».
Il est important de savoir que les bénéficiaires de cette générosité palestinienne, sont tous les Arabes de la région : qu’ils soient résidents de l’Autorité palestinienne ou même Arabes israéliens ou résidents de Jérusalem. Ces deux dernières catégories sont même bénéficiaires de suppléments par rapport à leur frères de Ramallah. Les cyniques y verront là le signe d’une discrimination honteuse.
Ce système ne résiste à aucun examen de moralité : comme pour des tueurs à gage, « plus on tue, plus on gagne »[6].

Alors oui, l’Union Européenne, les États-Unis, demandent depuis plusieurs années que ce programme soit interrompu. C’est tout à fait légitime, non seulement parce qu’il s’agit de comportement immoraux, mais aussi surtout parce que ces « récompenses à tuer », sont en fait financées avec les aides qu’ils versent. Et pourtant, rien n’y fait. Le programme reste en place.
Qu’est-ce qui explique la récente déclaration de l’Autorité palestinienne ?
Le précédent Président américain, Joe Biden, avait demandé à Mahmoud Abbas de supprimer ce programme s’il voulait que la gestion de Gaza après la guerre lui soit confiée. On peut comprendre que la secousse ressentie par le monde arabe devant le plan Trump d’évacuer la bande de Gaza cause ce genre d’acte désespéré pour essayer de sauver la situation. Mais ne nous y trompons pas : il s’agit simplement d’un maquillage pour prétendre répondre aux demandes européennes et américaines.
Comme le confirme Amer Issa, un dirigeant du Fatah en Syrie, sur Awda TV le 20 février 2025 :
[Cette annonce de l’AP quant à l’interruption des paiements] est une tentative de protéger le versement de ces allocations aux familles des martyrs, des blessés, des prisonniers. Nos leaders palestiniens sont sous pression quotidienne des Américains, des Européens et des Arabes pour suspendre ces aides. Mais ils ont refusé pendant des années. […] Nous en avons changé le libellé dans l’objectif de préserver l’honneur des martyrs, des familles et des prisonniers.
En d’autres termes, ce dirigeant du Fatah explique sans honte le fait qu’ils trompent les États-Unis et l’Union Européenne, sans aucune crainte de répercussions. Ils ont raison. Qui exprime des menaces sans jamais les mettre à exécution, perd toute crédibilité.
Il y a peu d’espoir que l’Union Européenne, prête à continuer à se faire manipuler par le Fatah, agisse en conséquence. En revanche, de la part des États-Unis de Trump, on peut légitimement être optimiste.
Pour en savoir plus : https://www.memri.org/tv/fatah-official-amer-issa-rejects-claims-stop-payment-prisoners-martyrs
Info n°3 : un supermarché à Gaza. Des images « insoutenables ».
Hamas TV, sans doute désireux de montrer ce qu’il se passe à Gaza « sur le terrain », entre deux mises en scènes macabres de libération d’otages juifs, est allé faire un reportage dans des supermarchés de Nuseirat et Deir Al-Balah.
Les images sont « insoutenables ». Le supermarché est très bien achalandé. 80% des marchandises sont disponibles, les prix sont même plus bas « qu’avant la guerre », aux dires des clients qui semblent heureux et bien nourris.

Et pourtant, des dizaines d’otages juifs sont toujours détenus dans les tunnels, dans les maisons sans doute à quelques centaines de mètres de là, depuis plus d’un demi-millier de jours.
Ce qui est insoutenable est simple : Antony Blinken s’est vanté, dans son interview testament de janvier 2025[7], d’avoir forcé Israël, 5 jours à peine après le 7 octobre, à laisser entrer de l’aide humanitaire dans Gaza sous peine d’annuler la visite de Joe Biden prévue quelques jours plus tard. Israël céda.
La bonne conscience du monde entier fut soulagée. Plus soucieux de ne pas interrompre l’entrée de marchandises dans Gaza, même durant quelques jours, que du sort d’otages juifs bébés, femmes, vieillards, la « communauté Internationale » continua de faire pression sur Israël.
Mais aujourd’hui que les supermarchés sont pleins, et qu’il reste plus de 60 otages dans Gaza, où est le monde ? Où est sa bonne conscience ? Où est la pression sur les geôliers gazaouis ? Où sont les appels à l’humanité, à l’humanitaire ?
Cette question est rhétorique : comme la Croix-Rouge l’a bien montré, l’aide humanitaire concerne l’humanité, sauf les Juifs.
Pour en savoir plus et voir la vidéo (attention, images « difficiles ») : https://www.memri.org/tv/hamas-tv-report-supermarket-gaza-well-stocked-back-to-normal
Info n°4 : des appels à la guerre en plein New York
Nasrallah, l’ancien leader du Hezbollah, occupé par les 72 vierges, a sans doute déposé son beeper sur la commode. Il n’a donc probablement pas reçu le message des slogans entendus en plein New York au moment de ses funérailles qui se tenaient à Beyrouth. Dommage pour lui. Cela l’aurait mis de bonne humeur.
Reprenons [19]48 ! Frappons Tel Aviv ! Houthis, faites chavirer un nouveau navire .
Célébrons le legs de notre leader bien aimé ! Sayyed Hassan Nasrallah, n’était pas qu’un grand leader, un être humain phénoménal, un général militaire, un martyr. Il était aussi une énigme, dont l’humilité, l’altruisme, et la vérité sont devenus le phare de la Résistance [contre Israël], au Liban, au Yémen, en Iran, en Irak, en Palestine et ailleurs.
Globalisez l’intifada. De New York à Gaza .
Oui, la liberté d’expression aux États-Unis est « magnifique ». Mais elle serait encore plus belle si ceux qui s’émeuvent des gestes peut-être fascistes de Elon Musk[8], se révoltaient aussi des appels à la violence qui eux, ne sont pas sibyllins.
Pour voir la liberté d’expression dans New York : https://www.memri.org/tv/nasrallah-hizbullah-vigil-nyc-beloved-leader-general
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[1] https://www.jpost.com/opinion/article-843358#google_vignette
[2] https://blogs.timesofisrael.com/what-my-interview-with-president-raisi-taught-me-about-iran/
[4] https://blogs.timesofisrael.com/author/catherine-perez-shakdam/
[5] Un article de 2021 déjà qui rapportait les analyses de l’agence de renseignement allemande sur l’exportation de la Révolution iranienne dans le monde : https://frblogs.timesofisrael.com/la-revolution-iranienne-exportee/
[6] Le « barême » de ces aides : https://palwatch.org/page/18359