Yuli, le dissident

Yuli Edelstein n’a pas hésité à s’absenter de l’hémicycle lors d’un vote important, conduisant le Likoud à prendre des sanctions contre lui. Au sein de la formation du Premier ministre, on murmure que Binyamin Netanyahou vient de perdre un des trente-deux élus de son parti, ramenant sa coalition à un total de 63 parlementaires (sur 120). Yuli Edelstein n’est pas n’importe qui.
Député dès 1996, membre du gouvernement à plusieurs reprises, il a présidé la Knesset entre 2013 et 2020. Ensuite, ministre de la Santé pendant un an, il fit preuve dans la lutte contre la pandémie d’une fermeté lui valant quelques déboires.
Figurant habituellement dans le top five des primaires, il finit au 18ème rang en 2022, et ne fut pas appelé à siéger au sein du gouvernement. Une humiliation pour cet homme orgueilleux qui considéra cette mauvaise manière comme le déliant de toute obligation à l’égard d’un Binyamin Netanyahou qui ne fut jamais son mentor.
D’autant que pour Yuli Edelstein, la dissidence est une compagne familière. Né en Ukraine en 1958, ayant appris l’hébreu avec ses grands-parents, et voulant dès son plus jeune âge l’enseigner et faire son alya, il fut arrêté en 1984, condamné et enfermé dans les geôles du régime soviétique.
Libéré en 1987, il s’installa dans le pays de ses rêves et mena avec son ami Nathan Sharansky la conquête de l’électorat russophone, en l’ancrant bien à droite pour apporter à Binyamin Netanyahou les quelques sièges indispensables à une coalition. Une fusion de leur formation avec le Likoud devait parachever ce parcours bien balisé.
Las ! L’ouverture d’esprit au sein du grand parti de droite ayant ses limites, Yuli Edelstein fut bloqué dans son ascension par les Yariv Levin, Amir Ohana et autres Dudi Emsalem, ces chouchous de militants du Likoud que l’extrémisme n’a jamais effrayés. Non que Yuli Edelstein soit un modéré. Avec sa kippa tricotée et sa pratique religieuse revendiquée, il habite le Goush Etsion, dans ces territoires contestés qu’il voudrait voir annexés pour former le « Grand Israël ».
Comme tous les anciens « prisonniers de Sion », il sait ce que veut dire une justice aux ordres, et son histoire personnelle n’est pas pour rien dans son aversion à l’égard du projet de « réforme » du système israélien. Nul doute également que, voyant les portes du pouvoir au sein du Likoud se fermer devant lui, il cherche une autre issue.
Son ami et compatriote Zeev Elkin est prêt à l’accueillir à bras ouverts au sein du parti de Benny Gantz, ce « Camp de l’Etat » transformé en refuge pour personnalités de droite devenues SDF politiques. Yuli Edelstein n’a pas encore annoncé son ralliement, mais peu importe.
La vraie question est de savoir si cette dissidence restera isolée ou si d’autres élus du Likoud exaspérés par le grand chef charismatique et ses acolytes feront preuve du même courage politique que l’ancien refuznik.