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Un État palestinien – Et si on envisageait un plan B ?

Une passerelle en bois entre le Mur des Lamentations et la porte Mughrabi de l'enceinte du Mont du Temple dans la Vieille Ville de Jérusalem. (Crédit : Nati Shohat / Flash90)
Une passerelle en bois entre le Mur des Lamentations et la porte Mughrabi de l'enceinte du Mont du Temple dans la Vieille Ville de Jérusalem. (Crédit : Nati Shohat / Flash90)

Lettre ouverte aux ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne

Objectif : Création de deux États tels que voulus par la Résolution 181 du Conseil de sécurité de l’ONU en 1947 : un État juif et un État arabe

Mesdames et Messieurs ;

Nous vivons dans un monde en ébullition secoué par un nombre incroyable de conflits. Mais il en est un qui les détrône tous, un qui réussit cet exploit de nous faire oublier nos misères en multipliant ses appels au secours, appels auxquels la communauté internationale s’est empressée de répondre. J’ai nommé le sempiternel conflit israélo-palestinien.

Pour la quasi-totalité des 191 États, pour tous ceux qui se disent « Amis d’Israël », qu’ils soient Juifs ou non-Juifs, une solution – et une seule – semble couler de source : « Deux États pour deux peuples ». Seule solution, nous dit-on, « susceptible de garantir aux parties impliquées et à leurs voisins une paix et une sécurité durables, et seule reconnue comme juste et équitable par les Résolutions des Nations Unies ».

Que ne promettrait-on pas pour convaincre Israël de répondre aux demandes de celui que le Pape avait qualifié en 2014 d’« ange de la paix » et que vous, représentants de l’Union européenne , appelez « le partenaire pour la paix » ?

De toute façon, à supposer que vous arriviez à vos fins et que l’État palestinien soit proclamé par la quasi-totalité des États, il resterait encore à obtenir d’Israël qu’il veuille bien reconnaître cet État comme voisin. Or, rien n’est moins sûr.

D’ailleurs, le 21 janvier dernier, Netanyahu a rejeté l’appel des États-Unis pour mettre en œuvre la solution à 2 États, ce qui a profondément irrité, une fois de plus, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

Et voilà que maintenant la majorité des députés de la Knesset a répondu « Non » à la solution que tous privilégient. Toute la classe politique européenne est choquée, outrée, scandalisée par une telle déclaration. Encore une fois, l’ONU s’en mêle immédiatement en déclarant par la voix d’Antonio Guterres, qui ne porte pas Israël dans son cœur et qui ne rate pas une occasion pour attaquer l’État juif, « Le rejet clair et répété de la solution à deux États, exprimé la semaine dernière aux plus hauts niveaux du gouvernement israélien, est inacceptable ».

Un petit rappel pour les nuls

Deux États pour deux peuples, un État juif et un État arabe, c’était la décision du Conseil de sécurité en 1947. Les États arabes avaient rejeté cette division du territoire, les Juifs l’avaient acceptée et avaient alors proclamé un an plus tard l’Indépendance d’Israël.

Pourquoi le refus des Arabes ? Ils exigeaient toute la terre de Palestine, du Jourdain à la mer, et faute de pouvoir l’obtenir par la voie diplomatique, ils comptaient recourir à la force militaire. À en juger par le nombre de Juifs pour défendre Israël, les Arabes pensaient n’en faire qu’une bouchée. Mal leur en prit : Trois guerres (1948, 1967 et 1973), trois défaites retentissantes et une humiliation difficile à accepter.

Depuis la Re-naissance de l’État juif, 76 ans se sont écoulés, 76 ans que les « Palestiniens » ont passés à semer la terreur parmi les civils israéliens, à multiplier les attentats, les détournements d’avion, les prises d’otages, les lancements de roquettes… En vain !

Désespérés de n’avoir pas réussi à éradiquer cet État, ils ont préparé méticuleusement pour le 7 octobre 2023 un pogrom génocidaire, d’une sauvagerie inqualifiable, au terme duquel les Juifs auraient été éliminés et leur territoire serait devenu un État islamique. En vain ! Les Juifs ne semblent toujours pas disposés à quitter le territoire que les Arabes convoitent, et dont ils revendiquent la propriété.

Alors, face à multiplicité des échecs, ils ont lancé des appels au secours à la communauté internationale. Vous les avez entendus. Mais la mise en commun de votre matière grise n’a rien pu pondre d’autre, pour mettre fin au conflit israélo-palestinien, que la sempiternelle solution de 2 États.

Pour faire pression sur Israël, 3 pays ont ajouté leurs noms à la liste des 145 sur 193 qui ont déjà reconnu l’État palestinien. Fort bien!

L’Amérique, bien que favorable à 2 États, veut que cette solution soit l’aboutissement de négociations entre les parties et non une reconnaissance unilatérale. Fort bien !

Un plan B ? Pourquoi pas ?

Après tout, le président égyptien Sissi avait envisagé la formation d’un État palestinien qui aurait compris la bande de Gaza et le Sinaï. Une proposition qui aurait permis de séparer ces 2 peuples, et qui enchanta Israël. Elle avait au moins le mérite de sortir des sentiers battus. Mais elle fut rejetée.

Et s’il existait une autre proposition ? Contrairement à ce qu’affirmait la Ligue arabe en mars 2014, Israël n’est en rien responsable de l’embourbement des négociations de paix.

Et même si tout semble figé, même si on ne se risque pas, pour le moment du moins, à parler d’un État palestinien, il nous semble toutefois que tout espoir d’en arriver à une entente n’est pas perdu, qu’Israël pourrait accepter un retour aux « frontières » de 67, et donc offrir aux Palestiniens les territoires qu’ils demandent, ce qui permettrait de revenir au plan des Nations-Unies : un État arabe et un État juif. Et la paix pour tous !

1. Étape 1 : Reprise des négociations 

  • État palestinien : Abbas énonce une condition sine qua non : « État arabo-musulman ».

Par souci d’équité et de justice, il faut, selon nous, qu’Israël puisse jouir du même droit que celui accordé aux Palestiniens.

  • Israël : Netanyahu énonce une condition sine qua non : « État-nation du peuple juif »

C’est du donnant-donnant. Vous, les grands de ce monde, qui avez entre vos mains l’avenir de millions d’êtres humains, avez-vous une objection à cette reconnaissance mutuelle ? Certainement pas ! D’ailleurs, déjà en 2016, Kamala Harris insistait sur le fait qu’une paix durable ne pourrait avoir lieu que si les Palestiniens non seulement respectaient leur reconnaissance, et leurs garanties de sécurité envers Israël, mais reconnaissaient explicitement Israël comme « État juif »[1]. Tiendrait-elle les mêmes propos aujourd’hui ? Pardonnez-moi d’en douter.

Vous n’ignorez pas qu’Israël, à plusieurs reprises, a tenté d’obtenir l’accord des Palestiniens avant de s’asseoir à la table des négociations. Mais chaque fois, l’État juif s’est heurté à un refus catégorique. Ainsi, par exemple, en mars 2014, le Conseil révolutionnaire du Fatah a approuvé par acclamation Abbas dans « son refus de reconnaître la judéité de l’État d’Israël ».

Quelques jours après, ce sont les ministres arabes des Affaires étrangères qui ont tous rejeté la demande d’Israël voulant que les Palestiniens reconnaissent l’existence d’un État juif, sous prétexte que cela nuirait aux droits des réfugiés palestiniens.

Quant au Hamas, sa Charte, revue et amendée en 2017, est on ne peut plus claire. Jugez-en par vous-mêmes à la lecture des articles suivants :

  • Art.19 : Il n’y aura aucune reconnaissance d’une légitimité de l’entité sioniste.
  • Art. 20. Le Hamas rejette toute alternative à la libération complète et achevée de la Palestine, du fleuve à la mer.
  • Art. 21. Rejet catégorique des Accords d’Oslo
  • Art. 27 : Un véritable État palestinien est un État qui a été libéré. Il n’y a pas d’alternative à un État palestinien totalement souverain sur l’ensemble du territoire national et du sol palestinien, avec Jérusalem comme capitale.

Pour clore le débat, le 17 mars 2014, en présence d’Obama, le président de l’Autorité palestinienne a rappelé que l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) avait reconnu en 1988 la « légitimité » d’Israël, puis en 1993, « l’État d’Israël », laissant sous-entendre que cela devrait suffire.

C’est, Mesdames et Messieurs, un point de vue que vous partagez peut-être avec l’ensemble du monde arabe. Pourquoi ne pas se contenter de la reconnaissance qu’Israël existe ?

Un petit rappel : Israël, État-nation du peuple juif

Adoptée le 19 juillet 2018 par la Knesset, la loi Israël, État-nation du peuple juif, une des lois fondamentales d’Israël, définit Israël comme « l’État-nation du peuple juif », précisant que « le droit d’exercer l’auto-détermination au sein de l’État d’Israël est réservé uniquement au peuple juif ». Elle confirme la Résolution 181 du Conseil de sécurité qui créait en novembre 47 un État juif aux côtés d’un État arabe, et ce qui est déjà inscrit dans la Déclaration d’indépendance.

Certes, me direz-vous, alors pourquoi le Premier ministre d’Israël a-t-il décidé d’officialiser en quelque sorte la décision de l’ONU ?

Il est vrai que pendant près d’un demi-siècle, l’existence d’Israël en tant qu’État-nation juif était acceptée de tous. Du moins le croyait-on puisque jamais on n’a eu à débattre de la légitimité d’Israël en tant qu’État juif, ni même en tant qu’État. Après tout, le droit à l’existence de quelque pays que ce soit ne s’est jamais posé. Pourquoi la question se poserait-elle à propos de l’État juif ?

Parce que les temps ont changé, parce que même si son appartenance à l’ONU devrait suffire à le légitimer, fût-il une dictature, certains n’hésitent pas à remettre en question même le droit d’Israël à exister. « Alors, une majorité absolue veut garantir le caractère juif de notre État pour les générations à venir », avait alors déclaré le Premier ministre.

Il était devenu urgent, en effet, que l’État juif réaffirme son identité,

  1.  pour répondre au refus systématique des Palestiniens de reconnaître Israël comme étant un État juif ;
  2.  pour que cessent les tentatives répétées de délégitimation de l’État juif, surtout, après que la communauté internationale a donné son accord à l’arabisation des lieux saints juifs.

D’ailleurs, depuis le 7 octobre, tout est mis en œuvre de la part des Palestiniens, mais aussi par un certain nombre d’États, pour délégitimer l’État juif.

Rôle des ministres des Affaires étrangères

Mesdames et Messieurs, votre rôle dans cette première étape est capital. Comme les Juifs ont échoué à obtenir cette reconnaissance, condition sine qua non pour la reprise des négociations, peut-être aurez-vous plus de poids auprès d’Abbas pour l’obtenir.

Je vous concède que ce ne sera pas facile, mais si vous mettez autant d’énergie à convaincre les Palestiniens de se soumettre à cette condition que vous en mettez à répéter aux Israéliens qu’il faut 2 États, vous ouvrirez la porte à des négociations positives, qui auront des chances d’aboutir à la paix.

L’Étape 1 s’achèverait donc par la reconnaissance par Israël d’un État palestinien arabo-musulman et, par la Palestine, d’Israël en tant qu’État-nation du peuple juif.

Étape 2 : Deuxième condition

Abbas insiste sur une autre de ses exigences : État judenrein (aucun juif). Il n’a pas tort, surtout aujourd’hui après dix mois de guerre à Gaza.

Le gouvernement israélien ne s’y opposera pas, pour autant que l’État juif jouisse du même droit, donc qu’il soit un État muslimrein (aucun musulman).

Là encore, c’est une question d’équité ; c’est du donnant-donnant.

On aura donc deux États : Palestine : État judenrein (aucun juif) vs Israël : État muslimrein (aucun musulman).

L’UE et l’Amérique devront donc œuvrer à convaincre les Palestiniens que c’est une question d’égalité, difficilement contestable.

Étape 3 : Le plan de partage : territoires et capitales

Qu’on me permette d’abord un autre petit rappel pour les nuls,

  • Les « territoires palestiniens occupés », : primo, ce ne sont pas des territoires « palestiniens » puisque juridiquement, la Palestine n’existait pas comme État ; secundo, ils ne sont pas « occupés » (on ne peut pas « occuper » sa propre terre), ils sont, à la rigueur, « disputés ».
  • « Frontières » de 67 : il n’existait pas de frontières. On parle de « la ligne verte » ou ligne d’armistice, ou de démarcation du 3 avril 1949, entre Israël et les États qui lui ont déclaré la guerre: Syrie, Liban, Transjordanie et Égypte. Au terme de cette guerre, le Sinaï et la bande de Gaza passent sous contrôle égyptien.

En 67, Israël conquiert des territoires occupés par l’Égypte (Gaza + Sinaï), la Jordanie (Transjordanie + Jérusalem Est) et la Syrie (Plateau du Golan).

Depuis la Guerre des Six jours, des négociations ont eu lieu au terme desquelles l’Égypte et la Jordanie ont signé avec l’État juif des traités de paix.

  • Le Sinaï a été restitué à l’Égypte en 1979 après le traité de paix israélo-égyptien ;
  • Le plateau du Golan, territoire situé dans le Golan, en Syrie, a été annexé par Israël; .
  • Jérusalem-Est désigne la partie de Jérusalem à l’Est de la Ligne verte. Occupée par la Jordanie depuis 49, elle est conquise par Israël pendant la guerre des Six jours, puis annexée au territoire d’Israël selon la loi fondamentale du 31 juillet 1980, en dépit du refus de la communauté internationale.

Par conséquent, devront être restitués aux Palestiniens pour former l’État de Palestine les territoires suivants qui appartenaient respectivement à l’Égypte et à la Jordanie :

  • Gaza : occupée jusqu’en 2005, date à laquelle Israël s’est retiré, considérée par la communauté internationale comme un territoire occupé.
  • La Cisjordanie (autrefois Judée-Samarie), considérée depuis 67 comme un territoire « occupé ».

La capitale de Palestine et les lieux saints : Elle ne pourra se trouver qu’en territoire palestinien, cela va de soi. Quant aux lieux saints, Israël autorisera les Palestiniens à se rendre à la mosquée Al-Aqsa comme le fait l’Arabie saoudite pour La Mecque.

La capitale d’Israël: Jérusalem en totalité. Quant aux lieux saints juifs situés en Palestine, ils feront l’objet de négociations.

Étape 4 : Transfert des populations 

Elle concerne le transfert des populations musulmanes d’Israël vers le territoire palestinien, et celui des Juifs des « colonies » vers l’État d’Israël.

Quant aux 720 000 réfugiés palestiniens et aux 600 000 juifs chassés des pays arabes, Israël et l’État palestinien en discuteront.

CONCLUSION Une relation Gagnant-gagnant !

Côté palestinien

  1. Un cadeau dont le prix est inestimable, le plus beau des cadeaux : LA LIBERTÉ ! Être libre, c’est vivre dans son pays, au milieu des siens ; c’est pouvoir resserrer les liens familiaux, vivre les fêtes en famille, les réunions patriotiques, etc.
  2. Fin des emprisonnements dans les prisons israéliennes et libération de tous les prisonniers qui retrouveront la liberté et leurs familles ;
  3. Fin de l’apartheid israélien pour les Arabes d’Israël ;
  4. Fin des arrestations arbitraires, des pratiques discriminatoires juridiques, et économiques. Les lois seront les mêmes pour tous.
  5. Fin des longues attentes pour passer des check-points pour aller gagner sa vie, etc…

Côté israélien 

  1. Un cadeau inestimable : Fin des guerres, fin des attentats, fin de l’insécurité.
  2. Restitution en totalité de la Judée-Samarie aux Palestiniens qui prendra officiellement le nom de Cisjordanie ;
  3. Fin des condamnations innombrables de terroristes.

Même s’il s’agit d’un partage équitable, qui permet la création d’un État palestinien reconnu par Israël, les Palestiniens le rejetteront car l’État palestinien qu’ils visent doit s’étendre du Jourdain à la mer. Ils en rêvent depuis 76 ans, et continueront à caresser leur rêve jusqu’à la fin des temps.

[1] Source : https://www.iranintl.com/en/202407216805

à propos de l'auteur
Dora a été professeur de français pendant 30 ans au Collège français de Montréal. Elle a été chroniqueuse pour Radio-Shalom Montreal, puis pour Europe-Israël.
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