Ukraine, la fin des moyens, faute d’avoir les moyens de la fin
Le soldat Zelensky est aux abois. Qui veut et qui peut encore le sauver ? C’est la question qui se pose trois semaines avant l’élection américaine.
Le plan de la victoire
Le président ukrainien a présenté son « plan de la victoire » au parlement de Kiev en cinq points et trois annexes secrètes (non dévoilées) :
- Devenir membre de l’OTAN. L’ambassadeur américain auprès de l’OTAN a déjà précisé que les conditions ne sont pas réunies.
- Permettre l’élargissement des opérations ukrainiennes à d’autres zones du territoire russe. Obtenir (des alliés) des équipements pour les réservistes de Kiev, le renforcement du système de défense aérienne, développer le système d’interception des drones et missiles russes, des investissements pour amplifier la production locale d’armement de défense, supprimer les restrictions d’utilisation de missiles de longue portée, mise en œuvre d’une collaboration dans les systèmes d’observation par satellite et dans le renseignement. En clair un accès en temps réel au renseignement américain, avec une annexe secrète.
- Création d’une « zone de dissuasion stratégique » (non nucléaire) sur l’ensemble du territoire, dans le but d’empêcher toute intervention militaire de la Russie (qui contient la seconde annexe secrète). Ce dernier sujet aurait déjà fait l’objet d’échanges avec les États-Unis, l’Angleterre, la France, l’Italie et l’Allemagne.
- Ce chapitre concerne le potentiel économique stratégique de l’Ukraine, qui propose la conclusion d’un accord avec ses alliés, sur la protection commune des ressources critiques ainsi que des investissements en vue de développer ce potentiel. Sont concernés, les ressources naturelles et les métaux rares valant des milliards de dollars tels que l’uranium, le lithium, le graphite, le titanium et d’autres, représentant un avantage significatif dans leur utilisation dans la guerre moderne. Ce sujet comporte une annexe secrète.
- Ce dernier chapitre concerne la sécurité et l’après-guerre (ah ! quand ?). Il suggère, avec l’accord des alliés de l’Ukraine, le remplacement de certains contingents américains stationnés en Europe par des unités ukrainiennes – qui ont acquis une expérience dans la guerre moderne dont l’utilisation d’armes occidentales et en collaboration avec l’OTAN ; irréaliste.
Les pressions se font plus pressantes et plus nombreuses de toutes parts, ça passe ou ça casse dirait-on dans la rue. Il a énormément promis et il a beaucoup demandé, exigé, spéculé, serré inlassablement les mains de tous les dirigeants occidentaux des deux côtés de l’Atlantique. Il a même exigé une invitation immédiate d’adhésion à l’OTAN, refus. Ce qui aurait eu des implications considérables pour les membres de l’alliance. Le compte n’y est pas. C’est ce qui explique le porte-à-porte qu’il s’applique à faire ces derniers jours en Europe. Il a très peu à attendre de la France, très empêtrée dans ses propres problèmes, sauf des poignées de mains et des sourires.
Le risque de l’effondrement
Au risque de passer pour un « munichois » ou un défaitiste, il faut rappeler qu’au terme du format de Normandie qui réunissait Russie, Allemagne, France, Ukraine, cette dernière avait pris de nombreux engagements qui ne furent jamais tenus, notamment des élections dans le Donbass. Alors, après plus de deux années de guerre arrive le temps de l’addition. Elle est très lourde.
Le président ukrainien veut obtenir à toute force des Occidentaux l’accord d’utiliser des missiles de longue portée. Jusque-là, l’OTAN, les européens et Washington y mettent leur veto, échec. Sa dernière trouvaille : les Occidentaux (lisez l’Allemagne, la France, l’Angleterre) devraient abattre les drones russes depuis leur territoire ; irréaliste : cela constituerait un casus belli direct avec Moscou.
Zelensky s’est déjà rendu à Berlin quatre fois. On constate qu’il s’efforce de faire porter le poids sur l’Allemagne après avoir souligné « vouloir en faire son deuxième allié le plus important après les États-Unis », mais Berlin reste très prudent face à ce rôle que Zelensky veut lui faire jouer.
Ne joue pas aux échecs qui veut avec le président russe.
Les faits
Son plan a reçu un accueil très mitigé en Ukraine. On ne voit pas de soutien politique réel au parlement, car il voudrait faire porter le fardeau largement sur les partenaires européens plutôt que sur son pays. C’est devenu le pari d’un homme seul, car au sein d’alliés largement confrontés à leurs propres difficultés (la coalition allemande tangue, les États-Unis votent début novembre, la France se bat contre son ombre, l’Angleterre qui est passé à gauche a de nombreux chats à fouetter chez elle). On voit bien que toutes les mesures proposées en feraient un membre de l’OTAN de facto sinon de jure. Ce que les alliés ne sont pas prêts à valider. L’idée de vouloir remplacer le contingent américain par des troupes ukrainiennes est hors de la réalité.
L’annonce de l’arrivée d’un premier contingent de militaires nord-coréens a fait l’effet d’une bombe, surtout qu’on annonce aussi qu’il s’agirait dans l’immédiat de 12.000 hommes avec armes et bagages.
Le Bundestag allemand a rejeté la demande ukrainienne de recevoir des missiles Taurus par 182 députés pour sur 480. Ce qui indique bien la limite allemande aux demandes faites.
En Ukraine
Le nombre de désertions a augmenté considérablement.
En 2022 on dénombre près de 9.000 inculpations pour refus de rejoindre l’armée. En 2024 ce chiffre a déjà doublé, on s’attend à plus de 50.000 refus de servir. Ce qui pourrait entraîner une baisse de l’âge de mobilisation.
La guerre bouleverse la démographie. On s’attend à une très forte diminution de la population. Selon les experts, la population supérieure à 50 millions dans les années 90 serait descendue à 35/37 millions actuellement et pourrait encore baisser à près de 30 millions si la Russie conserve le Donbass, voire encore moins d’ici 2040. Il est aussi question d’abaisser l’âge du service militaire aux moins de 25 ans, avec les conséquences négatives que cela entraînera.
La forte hausse des impôts (de 1,5 à 5%), inévitable pour soutenir l’effort de guerre, est très impopulaire. La corruption reste omniprésente. Pendant que l’armée de Kiev recule dans la zone de Koursk où elle subit revers après revers, l’armée russe grignote inexorablement le territoire à l’Est.
La majorité des médias occidentaux ont été séduit par la force de persuasion du président ukrainien, au point de se laisser aveugler et de surenchérir à leur tour. Il s’agit de reconnaître qu’ils n’ont pas résisté à la propagande qui laissait penser que l’armée de Kiev pourrait durablement tenir tête à celle du Kremlin. On voit bien actuellement que les alliés occidentaux ne sont pas prêts ni en mesure de répondre à toutes les demandes de l’Ukraine. La dure réalité commence à apparaître.
Reçu avec faste par tous les dirigeants occidentaux, sans pour autant obtenir une suite à ses demandes de plus en plus pressantes.
Quelle issue avant l’éclatement du pays
On entend cependant des personnalités encore peu nombreuses, de la vie civile, de l’establishment militaire et politique, s’exprimer en vue d’une solution négociée. On peut d’ailleurs être très étonné que tous les chefs d’État européens qui prônent le cessez- le-feu au Moyen-Orient et qui soulignent que seule la négociation débouchera sur une solution, n’adoptent pas le même discours pour l’Ukraine. Aveuglement ou jusqu’au-boutisme ?
Il ne s’agit pas de confondre la réalité avec les apparences de la réalité. Ce qui reste, à l’évidence, souvent le cas des médias en mal de gros titres. C’est particulièrement vrai dans les propos tenus à propos du Moyen-Orient. Dr Jekyll et Mr Hyde sont passés par là et sont très souvent de mauvaise foi.