Trump, le messie

Le candidat républicain à l'élection présidentielle et ancien président des États-Unis Donald Trump termine un meeting de campagne au J.S. Dorton Arena à Raleigh, en Caroline du Nord, le 4 novembre 2024. (Crédit : AP Photo/Evan Vucci)
Le candidat républicain à l'élection présidentielle et ancien président des États-Unis Donald Trump termine un meeting de campagne au J.S. Dorton Arena à Raleigh, en Caroline du Nord, le 4 novembre 2024. (Crédit : AP Photo/Evan Vucci)

En Israël, son retour a été salué comme celui du Messie. On a même vu le président d’une commission parlementaire (Simha Rotman) ouvrir la séance en lui dédiant une prière. Les ministres se sont précipités pour saluer son élection, Itamar Ben Gvir allant jusqu’à écrire « God bless Trump ».

Le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, s’adressant à ses « Chers Donald et Melania » a salué « une grande victoire ». Cet enthousiasme gouvernemental est partagé par une majorité d’Israéliens persuadés que Donald Trump soutiendra Israël en toutes circonstances.

Il est vrai qu’au cours de son premier mandat, Donald Trump a fait à Israël des « cadeaux » (l’expression est de lui) : transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem reconnue comme capitale de l’État juif ; reconnaissance de la souveraineté israélienne sur le Golan.

Mais Donald Trump estime qu’il n’a pas été payé de retour par un Benjamin Netanyahu refusant de le soutenir dans sa campagne sur « l’élection volée » en 2020, et allant jusqu’à féliciter l’heureux élu, Joe Biden. Plus encore, Donald Trump, dans son discours de victoire le 6 novembre au matin, a affirmé : « Je ne vais pas commencer des guerres. Je veux les finir ».

Nul doute qu’il pensait à l’Ukraine, mais aussi à Gaza. D’ailleurs, trois jours avant le scrutin, dans le Michigan, État-clé où la population musulmane est importante, il s’était engagé en ce sens auprès des leaders de cette communauté. Son message est bien passé.

Il a remporté le Michigan, obtenant même 45 % des suffrages (contre 12% en 2020) dans la ville de Dearborn, la musulmane. L’intérêt de Donald Trump pour un cessez-le-feu à Gaza n’avait pas que des motivations électorales. Il entend bien compléter les accords d’Abraham en signant avec l’Arabie saoudite un traité historique lui permettant de vendre au Royaume des avions F35 et des installations nucléaires civiles.

On dit même qu’il serait intéressé à négocier avec l’Iran. Car Donald Trump ne veut pas engager les États-Unis dans des conflits où ils n’ont rien à gagner. Des conflits qui coûtent cher au Trésor américain : 20 milliards de dollars d’aide militaire à Israël depuis le 7 octobre 2023. Un altruisme financier inacceptable pour une administration républicaine qui alignera sa politique étrangère sur le principe « America First ».

Benjamin Netanyahu ne s’est pas trompé. Le 5 novembre, Donald Trump a remporté « une grande victoire ». Il n’est pas certain que ce sera aussi celle d’Israël. L’Histoire juive est pleine de faux messies.

à propos de l'auteur
Philippe Velilla est né en 1955 à Paris. Docteur en droit, fonctionnaire à la Ville de Paris, puis au ministère français de l’Economie de 1975 à 2015, il a été détaché de 1990 à 1994 auprès de l’Union européenne à Bruxelles. Il a aussi enseigné l’économie d’Israël à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 1997 à 2001, et le droit européen à La Sorbonne de 2005 à 2015. Il est de retour en Israël depuis cette date. Habitant à Yafo, il consacre son temps à l’enseignement et à l’écriture. Il est l’auteur de "Les Juifs et la droite" (Pascal, 2010), "La République et les tribus" (Buchet-Chastel, 2014), "Génération SOS Racisme" (avec Taly Jaoui, Le Bord de l’Eau, 2015), "Israël et ses conflits" (Le Bord de l’Eau, 2017), "La gauche a changé" (L'Harmattan, 2023). Il est régulièrement invité sur I24News, et collabore à plusieurs revues.
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