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Renaud ne marche plus à l’ombre

Le remercier, le temps d’une chanson, d’avoir su écrire si justement ce que nous étions incapables de dire

Chacun a entendu cette semaine le nouveau titre de Renaud « Toujours debout » qui vient signer le retour du chanteur emblématique pour beaucoup d’entre nous de notre jeunesse.

Renaud est celui qui a conduit Mitterrand au pouvoir, celui qui accompagné d’un accordéon rend cet instrument agréable, celui qui a chanté la banlieue dont nous serions presque nostalgiques aujourd’hui avec ses loubards et ses sauvageons, celui qui fait rimer chanson et poésie.

Et puis il y a aussi le Renaud engagé en politique que je ne reconnaissais plus ou ne comprenais plus dans son obstination, voulant prendre partie pour la cause palestinienne, en se faisant le procureur de mauvaise foi de l’Etat d’Israël. Alors je continuais, avec une certaine nostalgie, à prendre plaisir à entendre ses chansons lorsqu’elles passaient à la radio tout en perdant l’enthousiasme d’avant.

Renaud s’est ensuite éclipsé durant une bonne décennie pour soigner ses addictions qui le rongeaient de l’intérieur et le détruisaient à petit feu.

Il nous revient, changé. Le monde aussi a changé, il y a eu les attentats de Paris et de Bruxelles, et Renaud semble ouvrir les yeux sur ce nouveau monde qui ne peut se résoudre à des combats jadis menés.

Plus un mot sur la Palestine mais, niché au cœur de son album, c’est le septième titre, une chanson : Hyper Casher. La voix éraillée est juste et rythmée pour chanter l’émotion de ce 9 janvier 2015 :

C’était un p’tit endroit pépère
Tout près du métro St Mandé
Qui vendait des produits casher
Pour les habitants du quartier
Un individu cagoulé
Suintant la haine de tous les pores
Armé comme un fourgon blindé
Est venu pour semer la mort

Soudain au magasin casher
Ce fut l’enfer, ce fut l’enfer

Il a tiré à tour de bras
Avec de la haine plein les yeux
Sur tous ceux qui portaient kipa
Sur les enfants, sur les p’tits vieux
Certains pleuraient les bras en l’air
D’autres se cachaient où ils pouvaient
Le sang glacé c’était la guerre
Tout près du métro St Mandé

Et dans le magasin casher
C’était l’enfer, c’était l’enfer

Mais quelle est cette époque immonde ?
Nous avons perdu l’essentiel
Avec de la peur plein le monde
Avec de la haine plein le ciel

Qu’ils reposent à Jérusalem
Sur la terre de leurs pères
Au soleil d’Israël

Je veux leur dédier ce poème
Leur dire qu’ils nous sont chers
Qu’on n’oubliera jamais (bis).

Oui Renaud a cessé de marcher à l’ombre et on ne peut que lui souhaiter que ce soleil d’Israël éclaire aussi les vivants et ses pas pour le remercier, le temps d’une chanson, d’avoir su écrire si justement ce que nous étions incapables de dire.

Ci-dessous, le lien pour écouter “Hyper casher”

http://sendvid.com/embed/hyw7jtwr

à propos de l'auteur
Gabriel est rabbin de la communauté Beth Yaacov, Aumônier israélite des hôpitaux et chroniqueur sur Judaïques FM. Ses thèmes de prédilection sont le judaïsme, la communauté juive, Israël et l’antisémitisme
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