Querelles au sommet

Le ministre Benjamin Netanyahu et le chef d'état-major de l’armée israélienne Herzi Halevi suivant la frappe israélienne au Yémen depuis la salle des opérations de l’armée de l'air israélienne aux quartiers généraux de l'armée de la Kirya, à Tel Aviv, le 20 juillet 2024. (Crédit : Ariel Hermoni/Ministère de la Défense)
Le ministre Benjamin Netanyahu et le chef d'état-major de l’armée israélienne Herzi Halevi suivant la frappe israélienne au Yémen depuis la salle des opérations de l’armée de l'air israélienne aux quartiers généraux de l'armée de la Kirya, à Tel Aviv, le 20 juillet 2024. (Crédit : Ariel Hermoni/Ministère de la Défense)

Une réunion du gouvernement a donné lieu à des éclats de voix entre le Premier ministre, plusieurs ministres, et le chef d’Etat-major, Herzi Halévi, au sujet des poursuites judiciaires contre les soldats qui seraient impliqués dans de mauvais traitements à l’égard de détenus palestiniens. Les protestations de ministres extrémistes ne sont pas pour étonner, pas plus que celles de Benjamin Netanyahu : celui-ci sait parfaitement que son électorat réclame une conduite sans concession dans la guerre. Mais cette querelle en cache une autre : celle sur un accord relatif à la libération des otages qui impliquerait une cessation des combats.

On sait que Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir menacent de faire tomber le gouvernement dans cette hypothèse qui serait, selon eux, synonyme de capitulation. Ceci alors que les responsables de la sécurité, le chef d’État-major, le chef du Mossad et celui du Shin Bet, ont fait savoir publiquement – une démarche inhabituelle – qu’une cessation des combats temporaire ne nuirait pas à la défense du pays.

La pression de l’administration américaine est forte. Joe Biden, Kamala Harris, et même Donald Trump souhaitent un tel accord. Au cours de leur entretien à la Maison blanche en juillet, le président américain aurait dit à Benjamin Netanyahu, qui lui déclarait faire tout pour cela : « Ne me raconte pas de conneries ! » (Don’t bullshit me !). Joe Biden, avec ses homologues d’Égypte et du Qatar, vient de formuler une proposition de reprise immédiate des négociations en s’engageant à résoudre, à la fin des discussions, les problèmes qui resteraient sur la table.

Les familles des otages, soutenues par une majorité du public israélien selon les sondages, formulent leur demande de façon on ne peut plus pressante, avec un argument non contestable : chaque jour qui passe met en danger la vie des captifs. En bref, la pression sur le Premier ministre israélien est maximale. Est-ce la raison pour laquelle Benjamin Netanyahu a laissé deux de ses proches confier à la presse qu’il était désormais prêt à un tel accord, même s’il impliquait la chute de son gouvernement ? Ou s’agit-il d’un repli tactique en attendant de trouver un argument lui permettant de dire que c’est le Hamas qui ne veut pas ?

Il y a peut-être une autre raison à ce qui serait une volte-face de Benjamin Netanyahu : depuis deux semaines, la côte du Likoud et celle de son chef remontent dans les enquêtes d’opinion, et celui-ci envisagerait désormais plus sereinement de nouvelles élections.

à propos de l'auteur
Philippe Velilla est né en 1955 à Paris. Docteur en droit, fonctionnaire à la Ville de Paris, puis au ministère français de l’Economie de 1975 à 2015, il a été détaché de 1990 à 1994 auprès de l’Union européenne à Bruxelles. Il a aussi enseigné l’économie d’Israël à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 1997 à 2001, et le droit européen à La Sorbonne de 2005 à 2015. Il est de retour en Israël depuis cette date. Habitant à Yafo, il consacre son temps à l’enseignement et à l’écriture. Il est l’auteur de "Les Juifs et la droite" (Pascal, 2010), "La République et les tribus" (Buchet-Chastel, 2014), "Génération SOS Racisme" (avec Taly Jaoui, Le Bord de l’Eau, 2015), "Israël et ses conflits" (Le Bord de l’Eau, 2017), "La gauche a changé" (L'Harmattan, 2023). Il est régulièrement invité sur I24News, et collabore à plusieurs revues.
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