Pour sauver sa peau, Netanyahou nous conduira jusqu’au fond des ténèbres

La guerre qui nous a été imposée le 7 octobre 2023 pourrait durer des mois et même s’étendre et devenir régionale. Netanyahou, qui, sous son pouvoir et ses décisions, a échoué, refuse de reconnaître sa responsabilité ainsi que celle de son gouvernement. Il continue à s’accrocher au trône et à s’imposer comme le dirigeant ultime de la guerre. De toute évidence, son avenir politique reste au sommet de ses préoccupations. Cela rappelle le verset dans le livre des « Rois », chapitre 1 : « Tu as assassiné et tu hérites ? »

Tout au long de ses mandats de Premier ministre, Netanyahou a délibérément et avec ruse construit un bouclier personnel presque impénétrable. Il a écarté du Likoud tous ceux qui étaient reconnus pour leur talent, et surtout pour leur position libérale et démocratique. En même temps, il s’est entouré de valets, choisis avec soin, pour éviter de mettre en péril son leadership. Aujourd’hui, son entourage est sous le choc, avec la peur et l’incapacité de se dresser contre lui. Comme à Sodome, l’État d’Israël ne trouve pas cinq Justes pour le sauver.

Ses derniers recrutements sont également calculés, même lorsqu’ils sont injustifiés. Pour exemple : la nomination de Gal Hirsh comme responsable de la libération des otages, alors que celui-ci a échoué dans la deuxième guerre du Liban, que la commission de nomination l’avait rejeté comme candidat au poste de chef de police et qui lui aussi est empêtré dans un procès, comme Netanyahou.

Par craindre d’être éclipsé, Netanyahou a préféré Hirsh à Yossi Cohen, ancien chef du Mossad, homme de droite qu’il considérait jusque-là comme son successeur, parlant couramment arabe, connaissant personnellement quasiment tous les rois et dirigeants du monde arabe et qui a fait ses preuves.

Le peuple, à juste titre, est entièrement préoccupé par l’avenir des kidnappés. Malgré l’échec du renseignement et le retard de l’intervention de l’armée dans les premières heures du sanglant samedi noir, nous pouvons compter sur Tsahal qui mène la guerre. Leur victoire ne me fait aucun doute.

Cependant, écarter Netanyahou du pouvoir et l’empêcher de prendre des décisions est impératif, sans délai, et plus que jamais essentiel. En Roumanie et dans d’autres pays, les dirigeants qui ont conduit leur peuple au fond de l’abîme ont été évincés de force et définitivement. J’espère que nous n’aurons pas à leur ressembler.

L’opposition est tenue de concentrer toutes son activité parlementaire, publique et juridique sur cet objectif, au moyen de « mesures législatives constructives », qui conduiront à l’établissement d’une coalition provisoire unissant des membres éclairés du Likoud avec les partis sionistes du centre et de la gauche. Les Haredim, Shas et d’Agoudate Yisrael, deux partis contestés avant le 7 octobre, peuvent être aujourd’hui, un facteur décisif dans ce changement. Le Premier ministre britannique Arthur Neville Chamberlain n’a pas attendu la fin de la guerre pour céder sa place à Winston Churchill.

Netanyahou ne lâchera pas, ni volontairement ni par pression publique. Selon ses récentes déclarations, le risque de prolonger la guerre et même provoquer son expansion sur les différents fronts. Au plus fort de son audace, il nuit aux relations avec Joe Biden et avec les Démocrates en continuant à s’ingérer dans la politique interne des États-Unis. Selon les sondages bon nombre de démocrates, est de moins en moins pro Israël.

Pour sauver sa peau, Netanyahou risque de nous conduire encore plus profondément dans les ténèbres. L’opinion publique qui prévaut depuis le 7 octobre tend à croire qu’il est fini et devra démissionner immédiatement après la fin de la guerre. Je n’y crois pas. Il a toujours prouvé qu’il fait partie d’une espèce de dirigeants déconnectés de la réalité qui pense que le peuple est tenu de la servir et de l’admirer en tant que monarque ou en tant que messager de Dieu.

La guerre et l’échange de feu cesseront tôt ou tard. Si les kidnappés ne sont pas libérés dans leur ensemble, à tout prix et au plus tôt, et tant que la solution palestinienne à deux États n’est pas déclarée et programmée, la situation dans le pays ne retrouvera pas sa sérénité.

Netanyahou torpillera les travaux de la Commission d’État, qui sera sans aucun doute mise en place dès la fin de la guerre. Il se prépare déjà à faire endosser toute responsabilité par les chefs militaires, les responsables de la sécurité intérieure et les gouvernements qui l’ont précédé. Il accuse également la protestation des dix derniers mois contre la réforme de la justice. De toute évidence l’intensité du soulèvement qui suivra sera sans commune mesure, voire meurtrier.

Le dialogue dans la société deviendra alors irréconciliable. Netanyahou et ses partenaires messianiques continueront à diviser le peuple et à semer la haine. La plupart de ceux qui s’opposent à eux : les démocrates, ceux qui forgent une économie florissante, le sel de la terre, risquent, progressivement et malgré eux, d’envisager de quitter le pays. Resteront alors, les faibles, les messianiques qui s’accrochent à la terre et aux tombes de saints, les antisionistes, les Galoutyim et une grande partie des partisans de Shas.

La grande crainte serait alors, que l’État d’Israël ne soit plus majoritairement juif face aux Arabes israéliens et aux Palestiniens rattachés de facto au pays. Les Haredim (les ultra-orthodoxes) et les musulmans partisans d’un État théologique, sauront s’entendre au nom d’un Dieu commun…

à propos de l'auteur
Né en 1947 à Meknès au Maroc, il a vécu en Israël de 1962 à 1988 avant de s’installer à Paris en 1988. Éditeur franco-israélien, il a conçu et dirigé à Paris de nombreux projets culturels, en particulier : une galerie d’art israélien moderne, un club littéraire et artistique autour du judaïsme contemporain et une librairie-café méditerranéenne. Il a conçu et dirigé, en 1998 le stand Israël Hote d’honneur (400 m2) au salon du livre et de la presse de Genève. Auteur d’une thèse de doctorat socio-littéraire sur la littérature israélienne, traduite et publiée en français, depuis la création d’Israël (1948) jusqu’à nos jours, il a publié deux bibliographies : • 2000 titres à thème juif - 1420 biographies d’auteurs", préfacée par Emmanuel Le Roy Ladurie, éd. Stavit, Paris 1998 ; • Littératures d’Israël, éd. Stavit, Paris 2003. Auteur bilingue (Hébreu-Français), il a publié : • A L’Autre Parnasse - Confessionsde femmees dans un café littéraire, roman paru en hébreu et en français en 2011, en anglais et en espagnol en 2013, éd. StavNet. • A l'Ombre des Murailles - souvenirs d'enfance du mellah de Meknès, Maroc, paru en hébreu et en français en 2015, en anglais et en espagnol en 2023, éd. StavNet. • Israël : politique et société – De Ben Gourion à Netanyahu, paru en Français, en Anglais et Allemand en 2021, ed. StavNet. • Trilogie pour enfant, écrite en hébreu et accompagnée de traduction en Français, illustrée par Alec Borenstein. Papi, vient vite ! Papi, tu dérailles ?!, Papi vient au dsert ! Mickael Pariente publie régulièrement des articles d'opinion dans la presse israélienne : Le Haaretz, Times of Israel, Ynet, Itonout... et en France, Libération, Le Monde...
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