Mont du Temple : qui sont véritablement les fous ?

Des fidèles musulmans assistant aux prières du matin pendant le Ramadan, dans l'enceinte de la mosquée Al Aqsa au sommet du mont du Temple, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 6 avril 2024. (Crédit : Jamal Awad/Flash90)
Des fidèles musulmans assistant aux prières du matin pendant le Ramadan, dans l'enceinte de la mosquée Al Aqsa au sommet du mont du Temple, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 6 avril 2024. (Crédit : Jamal Awad/Flash90)

Ami lecteur, je sais que tu as déjà une opinion assez tranchée sur le sujet de l’accès au Mont du Temple. Tu penses vraisemblablement qu’un Juif ne devrait pas y Monter, pour de multiples raisons.

C’est compréhensible, tous te donnent raison : les politiques (avec quelques exceptions notoires), les rabbins, les militaires, les médias, l’opinion internationale…

Le consensus est tel qu’il y a quelques jours le Président Biden a remercié l’éminent Rabbin Dov Lando, à la tête de la prestigieuse Yeshiva Slabodka, pour son opposition à tout accès juif à ce site.

Alors pourquoi aborder ce sujet maintenant ?

N’avons-nous pas assez à faire et à penser depuis le 7 octobre pour se concentrer sur ce dossier classé ?

Pourquoi ce sujet fait-il régulièrement la une des journaux, devenant un marronnier israélien ?

Pour y voir plus clair sur ce que représente le cœur névralgique du peuple juif, un bref rappel historique est capital.

Le Mont du Temple est une colline surplombant la vieille ville de Jérusalem, sur laquelle Abraham fut sur le point de sacrifier son fils Isaac, puis sur lequel le roi Salomon bâtit le premier Temple.

Détruit par l’empire de Babylone 400 ans plus tard, il sera rebâti par les Juifs revenus d’exil, sous l’égide du nouvel empereur Perse dont l’empire avait rapidement supplanté celui de Babylone.

Ironie de l’histoire, selon la tradition juive, l’empereur qui a autorisé le retour de ces Juifs et leur projet de reconstruction est Darius, qui n’est autre que le fils de A’hashverosh et Esther, sur les conseils d’un certain Mordekhaï.

Le second Temple sera également détruit par les armées romaines de Titus, il y a près de 2 000 ans.

Le Mont du Temple est, selon la tradition juive, l’endroit le plus saint du monde.

Près de 700 ans après la destruction du second Temple, une nouvelle religion, se réclamant également de l’héritage d’Abraham apparut et se répandit rapidement : l’Islam.

Très rapidement, le Calife Omar ibn al-Khattâb, compagnon de Mahomet dont l’accession au pouvoir est à l’origine du schisme entre Sunnites et Chiites, lança la construction de la mosquée d’Al Aqsa et du dôme du rocher.

Le Mont du Temple, renommé esplanade des mosquées par les Musulmans, devint le symbole du tragique exile subi par les Juifs.

Ces derniers ne l’oublièrent jamais.

Ils continuèrent pendant près de 2 000 ans à pleurer la destruction du second Temple lors de Tisha BeAv.

Ils continuèrent à évoquer cette tragédie à l’occasion de chaque mariage célébré religieusement, au cours duquel la cérémonie ne prend fin qu’une fois un verre cassé et la récitation par le marié de la formule consacrée « Si je t’oublie, Jérusalem, que ma main droite se dessèche ».

Tout le monde connaît la suite de l’histoire.

Les Juifs n’obtinrent le contrôle du Mont du Temple qu’à la faveur de la guerre des 6 jours.

Jusqu’alors entre les mains de la Jordanie, les Juifs eurent la surprise de se retrouver un beau matin en possession de ce fameux Mont du Temple, évoqué depuis deux millénaires.

Surpris par ce gain, les militaires israéliens, aux premiers rangs desquels le général Moshe Dayan, mirent en place le célèbre « statu quo » interdisant aux Juifs de venir prier sur le Mont du Temple, le site restant sous tutelle musulmane via le WAQF jordanien.

Ironie de l’histoire, c’est cette fois un gouvernement Juif et son armée qui interdirent l’accès au Mont du Temple aux descendants des Judéens qui en avaient perdu le contrôle 2 000 ans auparavant.

Ami lecteur, tu auras aisément compris qui sont les fous dans cette histoire.

Les fous sont ceux qui parlent de Jérusalem comme « capitale une et indivisible du peuple Juif », mais qui placent sous tutelle étrangère et musulmane son cœur névralgique.

Les fous sont les militaires qui pensent assurer l’intégrité physique du peuple juif en calmant momentanément les tensions autour de ce site explosif.

Les fous sont les politiques qui ont créé et qui maintiennent ce « statut quo » qui ne fait qu’affaiblir les revendications légitimes d’un peuple sur sa terre historique.

Les fous sont ceux qui parlent de « provocation » lorsqu’un représentant de l’État juif ose revendiquer le moindre droit sur cet emplacement stratégique.

Les fous sont les rabbins qui n’ont émis aucune nuance entre l’interdiction religieuse de se rendre sur le site et son caractère nécessairement juif, ce qui n’aurait pourtant été qu’un rappel historique de ce qui a précédemment existé (à ce titre, le fait que Joe Biden félicite le Rabbin Dov Lando devrait sérieusement alerter ce dernier sur les dangers de ses positions et de celles de ses pairs).

Les fous sont tous ceux qui ont laissé les musulmans revendiquer et s’approprier le Mont du Temple, en dépit de toute logique et de cohérence historique, délégitimant ainsi l’entier récit du retour des enfants d’Israël au sein de leurs terres ancestrales.

À l’aune de la tragédie du 7 octobre, il est temps de réparer les erreurs du passé, et de proclamer le caractère juif du Mont du Temple.

Je suis parfaitement conscient des conséquences immédiates que cela entraînerait.

Je suis cependant également conscient des conséquences désastreuses que nous avons déjà subies, la dernière en date étant l’opération terroriste du 7 octobre « déluge d’Al Aqsa », nommée précisément après ce lieu.

Ami lecteur, rétablir la vérité et retrouver une cohérence ne nous affaiblira pas.

Ce sont au contraire les marques de faiblesses et les compromissions qui nous détruiront.

 

 

 

à propos de l'auteur
Arié Krawiec est un avocat d'affaires parisien, marié et père de deux enfants. Passionné par l'actualité et la politique internationale, en particulier celle qui concerne Israël et le Moyen-Orient, Arié a son cœur et son esprit constamment tournés vers cette région. Convaincu que la solution à la crise que traverse Israël ne peut venir des élites politiques actuelles, Arié espère promouvoir de nouvelles idées et de nouveaux débats.
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