L’olive et le haricot : de la terre, du ciel, et du moulin
En Israël, tout commence par des haricots. Le haricot est une « kitniyot », un joli petit mot tellement singulier ! Pour les ashkenazim, le haricot est interdit de Pessah.
Pour les sefardim au contraire, il est toléré. Il n’en reste pas moins qu’un haricot est un haricot, qu’il produit de la farine, qu’il pousse en rampant et qu’avec un bon tuteur, il peut s’élever jusqu’à toucher ciel.
Les cotilédons du harioot, on ne sait s’ils montent ou s’ils descendent. Mais on sait qu’ils sont un enchevêtrement de possibilités.
Le haricot st un légume : il pousse par terre. Au contraire du fruit, qui lui pousse en l’air. Pour cette raison, le fruit et le légume ne se confondent pas et se conglomèrent dans l’universalité de leur règne : le végétal qui lutte pour la lumière et fait la guerre pour un peu de sucre et de chlorophylle.
L’olive, elle, est un fruit. Il commence dans la patience et finit pressé. Comme le raisin. Comme nous. Sa valeur et son goût attendent le nombre des années. Comme le blé, comme le haricot, l’olive achève ses jours au moulin. L’or qui suinte du pressoir est sans prix. Il sert aux lumières de Hanukah.
Il en faut peu, très peu, pour éclairer les esprits et redonner à Israël sa vigueur. Au Temple son lustre, à la louange sa force, à la foi son éclat. Si le haricot croît dans le secret de sa gousse, l’olive mûrit à la lumière du sud et de l’est. On la récolte deux fois selon sa couleur. On la presse aussi deux fois.
Ainsi, la terre donne son fruit et son légume, comme l’Homme donne son acte et sa parole selon le pressoir ou le moulin où il est soumis, acte et parole ainsi transformés et purifiés, chacun selon sa racine, chaque racine selon son espèce, chaque espèce selon son genre, les uns faisant jus comme la courge ou le raisin, les autres farine comme haricot.
Et d’autres, l’huile, comme celle du sacerdoce, celle qui éclaire le repas et fait briller le front du juste. L’eau et le pain, l’huile, et, pourrait-on ajouter : le vin, pour résumer.
Des « fins de haricots », des années de sécheresse, des vendanges aigres, des pains sans levain, les « hébreux » en ont vu d’autre… Bien d’autres… Ils s’en sont même nourris. C’est même à partir de cela qu’ils sont devenus ce qu’ils sont.
La mer (bien que ce ne furent pas les flots impétueux de la Méditerranée) s’est ouverte une fois… Elle pourra s’ouvrir une seconde fois.
Probablement d’ailleurs la plus profonde et la plus vaste : celle des cœurs endurcis. Il me semble que la prière est faite pour ça… Le moulin de la prière. La meule de la supplication. L’or qui suinte de la supplication est sans prix. Le jus du pressoir a la valeur de l’Eternité.
Et des prières, les « hébreux » en ont vu d’autres; bien d’autres… Le rocher (bien que ce ne fut pas l’Everest, mais bien plus petit mais beaucoup plus dur, sec et brûlant que l’Everest) s’est bien fendu en deux…
Il pourra bien s’ouvrir une seconde fois. Probablement d’ailleurs le plus dur, le plus épais, celui qui recouvre l’immensité magmatique des haines : le rocher de l’espérance. Le rocher dont on fait les meules autour desquelles sont bâtis les moulins où suintent le jus et l’huile, où la farine est ensachée.
Alors peut-être, peut-être, il se pourrait qu’on voie du rocher fendu de l’espérance moulue jaillir les flots impétueux de l’huile du courage et du jus du pardon.
Je dis bien peut-être. Mais des miracles, les « hébreux » en ont vu d’autres.. Bien d’autres… De quoi arroser abondament les haricots. Jusqu’au Déluge qui fait tourner les moulins de la prière.