L’influence de l’artiste israélien Yaacov Agam sur le légendaire Yves Klein

Yaacov Agam et l'auteur de l'article Frédéric Sroussi au Musée Agam, situé en Israël.
Yaacov Agam et l'auteur de l'article Frédéric Sroussi au Musée Agam, situé en Israël.

J’ai eu le plaisir de côtoyer pendant de longues années le grand artiste israélien Yaacov Agam. Exposé dans les plus grands musées du monde – du MOMA de New-York au Guggenheim Museum en passant par le Centre Georges Pompidou – il est un des pionniers de l’art cinétique (du grec kinêticos, « mobile ») qu’il théorisa mieux que quiconque, non pas tant à l’aide de textes didactiques, mais au travers d’une œuvre toute entière, vouée au mouvement et à sa philosophie sous-jacente, relative à la pensée juive. Mais en quoi l’œuvre cinétique d’Agam est-elle sous-tendue par le judaïsme ? Eh bien, pour l’artiste israélien, le mouvement a tout à voir avec la «quatrième dimension», la dimension temporelle qui pour lui diffère de façon essentielle de l’art statique qu’il assimile à la mort, et à une forme d’« idolâtrie ».

C’est tout cela qui impressionna et intéressa le fondateur du surréalisme André Breton, qui prit Agam sous son aile au début des années 1950. André Breton renomma même l’une des œuvres en relief et interchangeable de l’artiste israélien, en choisissant pour ce faire un mot issu du folklore yiddish : Dibbouk (1954).

Agam fréquenta les plus grands noms de l’art du XXème siècle tels que Salvador Dali, Marcel Duchamp, Alexander Calder, André Breton, Fernand Léger, Jesús-Rafael Soto, Jean Tinguely, etc…

 

Il faut savoir qu’Agam me raconta qu’il fut le dernier artiste à avoir vu Yves Klein vivant (en 1962). Les deux maîtres de l’art moderne s’étaient attablés à la terrasse d’un café parisien comme à l’accoutumée, quand, au détour d’une conversation, Yves Klein dit à Agam qu’il se sentait très fatigué et qu’il préférait rentrer. Le lendemain, Yves Klein, malheureusement mourut d’une crise cardiaque. Agam me dit pourtant qu’il ne crût pas au décès de Klein, qui n’avait que trente-quatre ans, et était un grand sportif (ceinture noire de Judo). Agam pensa alors qu’Yves Klein avait simulé sa mort pour réaliser un des happenings dont il avait le secret ! Aux obsèques d’Yves Klein, Agam pensait que celui-ci allait sortir de son cercueil comme un beau diable ! Il n’en fut rien…

En parlant avec Agam des célébrissimes Monochromes bleus – qui font toujours la renommée mondiale d’Yves Klein – l’artiste israélien me raconta qu’au début, Klein peignait de magnifiques monochromes de couleurs différentes. C’est lors d’une visite dans l’atelier de l’artiste français qu’Agam suggéra à Yves Klein de faire une exposition de monochromes tous présentant la même couleur ! Klein adora l’idée et il choisit le bleu, devenu l’iconique « bleu Klein ».

C’est ainsi que Yaacov Agam influença l’œuvre du légendaire Yves Klein. Aujourd’hui, mon ami Yaacov Agam a 96 ans, et il est temps de révéler cette anecdote que l’histoire de l’art n’avait pas encore écrite…jusqu’à maintenant.

à propos de l'auteur
​Frédéric Sroussi est journaliste et essayiste. Il a collaboré, entre autres, au Journal du Parlement français, à l'édition française du Jerusalem Post, à la revue de l'Instituto Centroamericano de Prospectiva e Investigación (ICAPI), à la revue France-Israël Information, à Front Populaire, Tribune Juive et Atlantico. Il est aussi l'auteur de trois essais dont un ouvrage collectif pour les éditions du Centre Pompidou de Paris.
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