L’image fallacieuse qui déforme l’Histoire
« Une image vaut mieux qu’un long discours », entend-on dire souvent. Et il est vrai que lorsque le dessin est fin, élégant et percutant, il fait mouche au premier coup d’œil et imprime bien mieux qu’une argumentation construite, forcément plus longue et plus fastidieuse à lire et à intégrer. Mais pour convaincante qu’elle soit, le succès d’une bonne illustration se fait souvent au prix de la sur-simplification du problème dont il est question. C’est pourquoi il vaut mieux privilégier la complémentarité, soit l’illustration d’un texte au lieu de s’en tenir à une image seule, potentiellement trompeuse comme les illusions d’optique peuvent l’être.
C’est ce qui arrive avec l’affiche ci-dessus qui est souvent mise en avant pour « décrire simplement » le conflit israélo-palestinien en quatre cartes. Parler de simplification dans ces cartes jetées en pâture aux personnes non familières avec l’histoire de ce conflit serait un énorme euphémisme.
Sur ces affiches qui ont fleuri sur les murs des capitales occidentales ces dernières années, ces quatre cartes sont présentées telles quelles, sans aucun commentaire autre que leurs brèves légendes. Sur l’apposition des couleurs jaunes, vertes et blanches, on ne peut pas dire que les choses soient vraiment fausses, mais y manque tout ce qui est caché sous le boisseau, ce qui rend ces cartes particulièrement pernicieuses.
S’en tenir uniquement à ces coloriages superficiels ne reflète en rien le déroulé des événements qui ont conduit à cette diminution progressive du vert au profit du blanc. À l’instar des explications de textes de notre enfance, tentons une explication d’image pour tenter d’en débusquer les très nombreux sophismes.
La première carte, 1946
La tromperie commence, et de quelle manière, dès la première carte de 1946 : le jaune se rapporte aux « Implantations juives en Palestine mandataire », ce qui effectivement correspond à la réalité de l’époque. Mais par défaut, tout ce qui n’est pas jaune est colorié en vert et à ce titre est désigné mécaniquement comme Palestinien, ce qui ne rend absolument pas compte de la situation réelle sur le terrain.
Déjà, la légende indique « Territoires palestiniens » alors que la logique élémentaire aurait voulu que les surfaces de cette couleur soient libellées « Implantations arabes en Palestine mandataire ».
En réalité, le coloriage qu’il faudrait appliquer est celui figurant sur la carte ci-dessous établie en 1945 par les Britanniques. En bleu figurent les implantations juives, qui recouvrent à peu près les tâches jaunes de la carte de 1946 et en vert figurent les terres possédées par les Arabes[1].
On notera que dans cette carte le gros du territoire n’est ni bleu ni vert mais blanc ce qui signifie que d’un point de vue légal il « n’appartient à personne » et en toute logique devrait être considéré comme des terres domaniales de l’État, relevant donc des autorités anglaises en charge de l’administration de cet espace en 1946.
Ainsi, l’impression chromatique simpliste de la première carte coloriée en vert à plus de 95% est bien moindre avec l’apposition des vraies couleurs, plus complexe mais plus conforme à la réalité de cette année-là. Mais comme disent parfois les directeurs commerciaux, « on n’a jamais l’occasion de faire deux fois une première impression », et c’est bien l’intention qui est recherchée avec les couleurs de la carte initiale.
De plus, mettre une couleur quelconque sur toute la partie sud de cette région pendant les années 1940 n’est pas pertinent car celle-ci était quasi inhabitée : il s’agit du désert du Neguev ; seule une poignée de bédouins y vivaient assez difficilement. Pour mémoire, Beer Sheva et Eilat qui sont aujourd’hui des villes florissantes dans le sud d’Israël, qui comptent respectivement 200 000 et 50 000 habitants, étaient à l’époque des hameaux insignifiants.
Mais plutôt que les km², ce sont les populations qu’il faudrait prendre en considération.
En 1946, la population juive s’établissait à 630 000 âmes alors qu’elle comptait autour de 80 000 habitants vers 1917. La population arabe quant à elle s’établissait à 1 200 000 âmes en 1946 alors qu’elle comptait 700 000 habitants vers 1917.
Cela signifie que, par croissance naturelle ou par émigration, les deux communautés se sont agrandies d’un demi-million de personnes pendant cette période du mandat britannique.
Outre les Juifs sionistes qui sont venus en masse s’établir en Palestine, il y a également eu une immigration arabe significative dans ce territoire pour profiter des opportunités créées par la présence des autorités britanniques et par le dynamisme d’une nouvelle activité économique que les Juifs se sont efforcés de développer[2].
Sauf à établir une discrimination flagrante et douteuse, on ne voit pas pourquoi au cours de ces trois décennies de 1917 à 1946 cette immigration arabe aurait été plus légitime que l’immigration juive.
Pour revenir à la carte de 1946, les espaces jaunes semblent occuper quelques 5% de l’espace alors qu’ils concernaient près d’un tiers de la population globale cumulée. Qui plus est, la quasi totalité de ces espaces jaunes se rapportent à des terrains qui ont été dûment achetés aux propriétaires légitimes de l’époque, selon des modalités conformes aux lois en vigueur.
On parle en permanence de colonialisme à l’égard d’Israël dans cette période pré-1948, mais cette entreprise de colonisation serait alors vraiment bien singulière ! A-t-on déjà vu une seule fois dans l’Histoire une colonisation quelconque au cours de laquelle les territoires « conquis » ne l’ont PAS été par des moyens militaires, souvent très féroces au demeurant, mais par des acquisitions légales de terrains, hectare par hectare, à leurs propriétaires légitimes ? Sans même parler de la métropole introuvable qui aurait profité du pillage des ressources de cette contrée supposée colonisée.
Le passage de la première carte de 1946 à la deuxième carte de 1947
Si on exclut la zone sud presque inhabitée en 1947, zone qui commence en aval de Gaza, on notera tout de même que le partage de l’ONU correspond peu ou prou aux espaces jaunes de la première carte, ou aux espaces bleus de la seconde.
On peut objecter, avec raison, que beaucoup d’espaces blancs entre ces tâches jaunes ont été rattachés à la partie attribuée aux Juifs, mais c’est un argument qui peut être également opposé à la partie attribuée aux Arabes. Et la transition du vert au blanc de la première l’image (1946) à la deuxième (1947) n’a que faire de ces considérations.
Reste que la partie attribuée aux Juifs comprenait effectivement 400 000 Arabes alors que la partie attribuée aux Arabes comprenait assez peu de Juifs, quelques milliers tout au plus. Certains pourraient faire observer que dans le contexte de l’époque, aucun Juif n’aurait pu survivre dans l’État arabe proposé, alors que la déclaration d’indépendance du 15 mai 1948 l’État d’Israël engageait les autorités à respecter les droits de tous ses habitants quels que soient leur race ou leur religion, le fait demeure.
Quoi qu’il en soit, et avec les réserves ci-dessus, le partage de l’ONU voté le 29 novembre 1947 a décidé que plus de 60% de la population habitant dans la partie attribuée aux Juifs était juive et que la quasi-totalité de la population habitant dans la partie attribuée aux Arabes était arabe.
Le passage de la deuxième carte de 1947 à la troisième carte de 1949-1967
Ce plan de partage fut accepté par la communauté juive, quand bien même beaucoup de Juifs considéraient qu’il leur était très défavorable. En revanche, la communauté arabe le refusa en bloc et dès le lendemain de la décision de l’ONU, des bandes armées palestiniennes emmenées par leurs dirigeants de l’époque (en particulier le grand mufti de Jérusalem, Amin al-Husseini) déclenchèrent des attaques très meurtrières contre les implantations juives pour manifester leur totale opposition à cette décision jugée inique.
L’objectif de ces attaques était incarné par un mot d’ordre partagé par la majorité de la population arabe : « Mettre les Juifs à la mer ». Moins de trois années après la prise de conscience de ce qu’a été la Shoah, on imagine l’effet d’un tel slogan sur la population juive, d’autant que ce mot d’ordre était étayé par des assauts incessants.
De novembre 1947 au printemps 1948, ces attaques firent des centaines de victimes et des dégâts matériels incommensurables avant que la Haganah, l’embryon de l’armée juive qui s’est transformée en Tsahal, ne passe à l’offensive au printemps 1948. En parallèle, à partir du 15 mai 1948, ces assauts palestiniens furent appuyés par l’invasion de pas moins de cinq armées arabes[3], de sorte qu’à la fin du printemps 1948, les opérations militaires s’établissaient comme décrit sur la carte ci-dessous.
La tragédie des réfugiés palestiniens a fini par complètement occulter cette situation militaire extrêmement critique d’Israël au lendemain de la déclaration d’indépendance, mais pour bien apprécier les événements de l’époque, il convient de garder constamment en mémoire cette carte-là.
Lorsqu’un État ainsi que sa population font face à de tels enjeux de survie, la prise en compte du sort des populations civiles de l’adversaire auto-déclaré, qui de surcroît a pris l’initiative du conflit armé, n’est forcément pas la première des priorités. Surtout que dans leur grande majorité celles-ci soutenaient, dans tous les sens de ce terme, les armées ennemies et leur objectif affirmé de nettoyage ethnique.
La guerre ainsi déclenchée après la décision de l’ONU a duré une quinzaine de mois et fut extrêmement meurtrière pour la communauté juive attaquée, qui a déploré plus de 6300 victimes, soit 1% de sa population. Un prix exorbitant à payer pour une guerre déclenchée sciemment par la partie adverse qui avait l’objectif affirmé et fièrement revendiqué d’en finir avec la population juive d’une manière ou d’une autre.
Le sort des armes ne lui ayant pas été favorable, une grande partie des populations civiles de la partie arabe ont fui les combats, quand bien même entre 10% et 20% de cet exode est le résultat d’expulsions manu-militari par les Israéliens.
Les historiens Benny Morris et Ephraïm Karsh qui font autorité sur le sujet des réfugiés palestiniens expliquent qu’une partie de ces expulsions procédèrent de considérations militaires dans des régions où les combats avaient été très violents sur tous les fronts, et l’armée israélienne ne voulait pas laisser des villages plus qu’hostiles sur des espaces qu’elle venait de conquérir difficilement.
D’autres considérations ont joué, parmi lesquelles la fuite avant les combats des élites palestiniennes fin 1947, quelques appels de dirigeants arabes à évacuer les zones de confrontations armées pour mieux y revenir dans le sillage des armées arabes que l’on escomptait victorieuses[4], et le choc et le retentissement causés par le nombre de victimes dans le village de Deir Yassin où plus d’une centaine de civils périrent de manière très controversée lors de la prise de ce village, provoquant une panique générale dans une partie de la population palestinienne[5].
Quoi qu’il en soit, les lignes d’armistices se sont établies, comme le montre la carte 3, avec les arrangements suivants, plus ou moins admis par la communauté internationale : l’Égypte serait en charge de l’administration de la bande de Gaza et la Cisjordanie serait annexée en 1950 par la Transjordanie qui deviendrait ainsi le royaume de Jordanie.
Sans le dire explicitement, à l’époque il a été considéré de facto que l’État arabe qui aurait dû être créé disparaissait au profit d’une souveraineté jordanienne et égyptienne sur une partie de ce territoire. Par rapport au plan de partage initial de l’ONU, l’agrandissement de l’État d’Israël pendant cette guerre a quelque part été admis comme « légitime » par la communauté internationale (hors pays arabes) au regard de la très violente agression à laquelle ce pays avait dû faire face. Et c’est cette situation qui a prévalu pendant les 18 années qui séparent la signature des armistices avec les États arabes (hors Irak) début 1949 et le déclenchement de la guerre de 1967.
Le passage de la troisième à la quatrième carte à partir de 1967
Cette guerre de 1967 qui devait bouleverser l’ensemble du Proche-Orient de l’époque s’est déclenchée suite à la rupture par Nasser des accords qui avaient été conclus en 1957. Il y a d’abord eu l’exigence du dirigeant égyptien du retrait des casques bleus de la péninsule du Sinaï, exigence acceptée par l’ONU et très vite mise en œuvre par son secrétaire général U-Thant, laissant les armées égyptiennes s’approcher dangereusement de la frontière entre les deux pays.
Puis le blocus du port d’Eilat décrété par Nasser, blocus considéré dans toutes les relations internationales comme un casus belli. La mise en place d’un commandement unique des armées égyptienne, syrienne et jordanienne a encore fait augmenter la tension d’un cran. À toutes ces considérations, il convient d’ajouter des incursions périodiques meurtrières de terroristes depuis les territoires de Gaza, de Jordanie et de Syrie qui faisaient chaque année plusieurs dizaines de victimes.
Enfin, une ambiance de curée et de pogrom généralisé s’est emparée de la rue arabe en ce fatidique mois de mai 1967, au point que la presse a publié des caricatures on ne peut plus explicites[6]. Cette atmosphère délétère a balayé les dernières hésitations du gouvernement israélien qui a lancé une attaque préventive pour ne pas avoir à subir un assaut simultané et généralisé des armées arabes sur trois fronts, comme en 1948. Il faut se souvenir que les dirigeants arabes de l’époque annonçaient un tel assaut comme imminent, et que celui-ci permettrait à leurs yeux de purger cette terre de Palestine de la « souillure » que constituait l’État d’Israël et sa population juive.
Là encore, le sort des armes a été favorable à Israël qui a ainsi été amené à occuper la péninsule du Sinaï, le plateau du Golan syrien, la bande de Gaza et la Cisjordanie. La péninsule du Sinaï a été entièrement restituée à l’Égypte dans le cadre des accords de paix signés entre les deux pays en 1979.
La bande de Gaza a été occupée par les Israéliens de 1967 à 2005 et évacuée depuis. Le blocus décrété par Israël, après les premier tirs de roquettes en provenance de ce territoire et les premières incursions vers Israël de terroristes depuis des tunnels, avait pour but d’éviter de faire rentrer du matériel militaire dans cette enclave.
Le plateau du Golan est resté sous souveraineté israélienne par manque d’accord avec la Syrie (d’ailleurs, étrangement, le Golan ne figure pas sur la dernière carte alors que cela aurait pu appuyer le propos …).
Quant à la Cisjordanie, elle s’est effectivement trouvée de plus en plus morcelée sous l’effet conjoint d’une part des innombrables attaques terroristes des groupes palestiniens, surtout de 1995 à aujourd’hui, qui ont entraîné la construction d’un mur de séparation, et d’autre part et surtout de l’émergence d’un mouvement raciste, fasciste et messianique qui s’est développé dans la société israélienne et qui la mine depuis maintenant plusieurs années.
L’enchaînement des quatre cartes
En faisant défiler son regard de gauche à droite sur l’image initiale où figurent ces quatre cartes, l’effet insidieux escompté se produit automatiquement : « les Juifs sionistes sont venus peu avant 1946, et se sont emparés de presque tous les territoires palestiniens transformant des terres vertes en terres blanches, ne laissant que des miettes aux « vrais » détenteurs de cet espace ».
Avec un tel bagage mental, comment s’étonner qu’une multitude d’ignorants défilent dans les rues de toutes les capitales avec un slogan « Libérer la Palestine, de la rivière à la mer ». Mais comme ce texte s’efforce de le montrer, le déroulé des événements ne correspond en rien à ce que ces quatre cartes suggèrent. Quelques points de repère :
- Avant l’arrivée des premiers sionistes à la fin du 19ème siècle, ce territoire était une région reculée et délaissée par les occupants de l’époque, soit les Ottomans. Mark Twain qui avait fait le voyage en 1867 la décrit comme une terre de désolation abandonnée par tous, très violente de surcroît.
- Avec la fin de la Première Guerre mondiale ponctuée par la déclaration Balfour qui promettait aux Juifs un foyer national dans ce territoire, une immigration conséquente de Juifs sionistes, la plupart du temps opprimés dans leur pays, s’est amorcée, et une activité économique s’est créée.
- Le refus arabe s’est manifesté très tôt et malgré quelques rares occasions manquées de conciliation, sa position officielle a constamment été de mettre tous les Juifs à la mer pour conserver un caractère exclusivement arabe à ce territoire.
- Le plan de partage de l’ONU de 1947 aurait pu constituer une solution de compromis mais il a été rejeté par les Arabes qui ont pris les armes pour s’y opposer. La défaite militaire a enterré pour des décennies cette possibilité d’un État arabe, et c’est comme cela que la répartition des territoires dépeinte dans la troisième carte s’est stabilisée.
D’autres cartes potentielles
Dans le même esprit, on pourrait esquisser d’autres cartes qui mettrait en évidence d’autres injustices bien plus graves encore, mais dont une entreprise de redressement de torts serait de nature à bouleverser l’ordre international en créant d’innombrables nouvelles zones de conflits, ou plutôt en ravivant d’anciennes lignes de fractures :
- Évolution de la colonisation des grands pays au 19ème siècle, quelques décennies à peine avant l’émergence du Sionisme, au détriment des populations autochtones : États-Unis, Australie, Russie, Brésil ou Argentine.
- Déplacements forcés de millions d’habitants, ponctués de massacres abominables, lors de la fin des quatre empires au sortir de la Grande Guerre : empires russe, allemand, austro-hongrois et ottoman[7].
- Le sort de dizaines de millions de personnes déplacées en 1945 ; Allemands, Polonais, Juifs, Roumains, Moldaves, etc…
- La répartition des populations musulmane et hindoue lors de l’indépendance de l’Inde et du Pakistan en 1949, ou bien des Musulmans et de Chrétiens orthodoxes lors de l’indépendance de la Turquie en 1923, etc…
Quelque soit le critère considéré, les tragédies des peuples qui ont résulté des événements que de telles cartes pourraient illustrer n’auraient rien à envier à ce qui est dénoncé dans cette image, de manière on ne peut plus erronée, pour le peuple palestinien.
Un dernier point pour conclure. Lorsque l’Histoire finit par accoucher d’une situation, on ne peut jamais revenir en arrière pour faire comme si ce qui est advenu n’avait pas eu lieu. De très nombreux événements se sont produits pour lesquels certains protagonistes souhaiteraient sûrement remonter l’horloge du temps et se replacer avant telle ou telle séquence pour agir autrement et infléchir ainsi le cours des choses.
Dans ce registre, une partie des terres attribuées à l’État arabe dans le partage de l’ONU de 1947 ont effectivement disparu dans la tourmente de la guerre de 1948 que les Palestiniens ont déclenchée[8]. Ils ne les retrouveront sans doute jamais et il est vain de s’en remettre à une Justice illusoire qui de toutes façons est un concept à géométrie très variable dans les relations internationales.
Plutôt que d’invoquer une telle Justice, les Palestiniens devraient prendre acte que le rouleau compresseur de l’Histoire est passé, et penser à leur présent et leur avenir pour éviter de se focaliser de manière obsessionnelle sur un passé révolu, fantasmé et devenu hors-sol.
En termes géopolitiques, ce concept de Justice est toujours une chimère controversée alors que le compromis, avec tous ses défauts, s’inscrit dans le réel. Malheureusement, en suggérant une appropriation on ne peut plus simpliste de ce territoire par le mouvement sioniste, les cartes qui apparaissent sur l’image traitée dans ce texte ne favorisent pas du tout un tel changement d’attitude, et c’est bien regrettable.
[1] Il convient encore et toujours de rappeler qu’à l’époque, peu de gens utilisaient ce terme de « Palestiniens » pour désigner les Arabes vivant sur ce territoire administré par les Britanniques. À tout prendre, ce qualificatif de Palestiniens était plutôt réservé aux Juifs qui y résidaient.
[2] https://frblogs.timesofisrael.com/peuplement-de-la-palestine/
[3] Les États arabes qui ont envahi Israël le 15 mai 1948 sont l’Égypte, la Syrie, le Liban et la Jordanie et l’Irak.
[4] Le récit israélien tend à surévaluer cet argument d’appel des autorités arabes à fuir les combats alors qu’en réalité il n’a pas tant joué que cela. Surtout que lorsqu’elle a pris conscience du phénomène massif de cet exode et de ses conséquences potentielles, la direction arabe a vite changé ses mots d’ordre en ordonnant aux civils de rester sur place. L’ouvrage de Ephraïm Karsh, « Palestine Betrayed », retrace assez précisément la chronologie et le récit des événements tragiques de cette période.
[5] Cet épisode reste controversé mais n’est certainement pas à l’honneur de l’armée israélienne, ou plutôt de sa composante Irgun Tvaï Leumi (IZL) dont les membres ont jeté des grenades dans des maisons et des caves où des civils s’étaient réfugiés. L’argument avancé par lZL comme quoi le village abritait des combattants reste peu convaincant au regard du grand nombre de victimes civiles.
[6] Il existe un recueil de ces caricatures publiées par la presse arabe qui ne laisse aucun doute sur le sort funeste qui attendait la population juive si les armées arabes avaient prévalu. Voir https://www.amazon.com/Annihilated-Selection-Cartoons-Aneanti-Caricatures/dp/B00NIVIMZS
[7] L’ouvrage de « The Vanquished » de Robert Gerwarth retrace l’anarchie qui s’est emparée des espaces occupés par ces empires à la fin de la première guerre mondiale. Ces espaces ont connu des épisodes de très grande violence, épisodes aujourd’hui oubliés.
[8] Il s’agit ici des terres attribuées à l’État arabe en 1947 et qui sont situées à l’intérieur de la ligne verte qui délimite les frontières de l’État d’Israël à la veille de la guerre des Six Jours.