Les sentiers de la perdition

Des législateurs israéliens assistent à la cérémonie de prestation de serment du Parlement israélien, à la Knesset à Jérusalem, le mardi 15 novembre 2022. (AP Photo/ Maya Alleruzzo, Pool)
Des législateurs israéliens assistent à la cérémonie de prestation de serment du Parlement israélien, à la Knesset à Jérusalem, le mardi 15 novembre 2022. (AP Photo/ Maya Alleruzzo, Pool)

Minute de silence, pour les victimes du terrorisme, la situation reste extrêmement tendue.

Le gouvernement sous la houlette de son PM (Premier ministre), met ou a mis en place depuis son avènement, une politique très axée sur les problèmes personnels des politiciens.

Les élus ne semblent pas préoccupés par la vie quotidienne de leurs citoyens. Une rapide revue des dernières activités de nos dirigeants le démontre, ils se sont principalement attelés aux bien-être des politiciens par une série de lois :

*La première, qui a été adoptée rapidement : c’est que la famille Netanyahu dans son ensemble (avec leur enfant, qui visiblement habite toujours chez papa maman) soit au bénéfice d’une prise en charge complète de leurs dépenses aussi dans leur domicile privé à Cesarea. Dernièrement encore une autre demande : leur voyage à Rome, ou plus de 60 chambres ont été louées, pour leur romantique voyage  anniversaire de mariage, sans compter les demandes de voyager au bénéfice d’un siège qui fait lit. Le tout avec un coût estimé à 1 million d’euro… oui rien n’est trop beau et puis c’est gratuit, alors pourquoi se priver ?

Ensuite, vient ce projet de loi, qui vise à autoriser les fonctionnaires à recevoir des cadeaux ou des rémunérations privées. En résumé, nous aurions de droit d’acheter un fonctionnaire, c’est plus ou moins curieux et surtout assez flippant. On peut facilement imaginer toutes sortes de dérives : par exemple vous allez chercher votre certificat – le fonctionnaire vous demande de payer la taxe, puis avec un sourire vous avertira, qu’il a beaucoup de travail, alors pour que votre certificat soit traité plus rapidement, un billet va faciliter la rapidité, et tout cela légalement. L’administration israélienne n’étant pas la plus simple, je vous laisse imaginer le prix de vos démarches…

La suite, n’est pas des moins effrayante, le ministère de l’Education a décidé que les livres achetés par les universités seraient soumis à approbation (quelque chose comme ça), ce qui veut dire que certains ouvrages ne seraient plus autorisés à l’achat par la bibliothèque et donc, pas disponible au public. Une censure qui ne dit pas son nom.

Si cela ne devait pas suffire, il y a la fameuse « refonte du système judiciaire » qui s’apparente à une prise de contrôle de la Cour Suprême, qui selon ses partisans (de la reforme) est rempli d’ashkénazes élitistes éloignés des problèmes de la société. Ah.

Cependant en lisant les propositions de loi du gouvernement, je peux relever facilement, que :

  • l’inflation,
  • la hausse du shekel,
  • Les monopoles,
  • la crise climatique,
  • les retraites ou la santé, ne sont pas au menu du jour.

Fin du constat. Ok, on veut réformer la justice, tout à fait, toute société doit évoluer et s’adapter. Ici, ce n’est pas le cas. Alors ce que je reproche (et je ne suis pas la seule, à voir le nombre des manifestants) en plus du fond de la réforme, c’est-à-dire sa politisation, c’est aussi sa forme.

De fait, et là ce n’est pas simplement cette réforme, mais toutes celles proposées par la Knesset, car même si on peut en tant que citoyen s’inscrire pour des questions… Une fois élus, les politiciens ignorent les citoyens, et ceci pour tous les partis politiques. A la knesset, les débats souvent houleux, et, se font sous l’oeil des TV, mais quel pouvoir a le citoyen ? A part manifester aucun.

Le citoyen vote pour la Knesset (et sa municipalité*) c’est tout. Il n’y a pas de Sénat, ou de Congrès, de fait la knesset représente la seule entité politique au niveau national. Pas de département ou canton, pas de constitution. L’état, c’est la Knesset, le président a une valeur plutôt symbolique. La Knesset sont des élus certes, mais 120 pour 9 millions d’habitants et une projection de 15, 2 millions en 2048.

En comparaison, la Suisse qui a plus ou moins le même nombre d’habitant actuellement, a une chambre basse (200) une chambre haute (46)  ce qui double le nombre d’élus juste pour l’état, sans compter les élus cantonaux (département), ce qui correspond au même système américain. En Israël, rien de tout cela. Le pouvoir est concentré à la Knesset et les députés le savent bien et ils en abusent déjà.

De plus, on l’a beaucoup répété dernièrement l’état israélien n’a pas de constitution. Et c’est là un des crimes reprochés à la Cour suprême, celui d’avoir établi des lois fondamentales en droit constitutionnel, garant des droits.

La démocratie, c’est pas seulement le droit de voter. C’est un système complet d’équilibre entre les différents pouvoir politique-législatif…

« Une grande partie de la structure du gouvernement fédéral aux États-Unis est mise en place pour fournir des freins et contrepoids supplémentaires afin d’empêcher le système d’abuser de son autorité »**

Ce qui me surprend aussi, c’est qu’une partie des citoyens applaudissent des deux mains et souhaitent cette réforme. On le voit dans d’autres pays, la démocratie devient un vase vide aux mains de politiciens corrompus.

Aujourd’hui en laissant le pouvoir aux mains des seuls politiques, et en brisant cet équilibre déjà fragile, nous prenons le risque et si l’on reprend les propositions de loi susmentionnés il est déjà là, est que cette poignée de politiciens vont sans aucun doute en abuser. Et le citoyen déjà laissé pour compte la plupart du temps sera confiné dans ce rôle de citoyen payeur.

A vous de voir.

Shabbat Shalom.

*A savoir que les maires ne fixent pas le taux d’arnona, mais ils sont fixés par le ministère de l’Intérieur

** citation https://spiegato.com/fr/quest-ce-que-lequilibre-des-pouvoirs

***La branche judiciaire des États-Unis est la troisième pièce de l’équilibre des pouvoirs fédéral, conçue pour interpréter les lois établies par le Congrès et renverser celles qu’il juge inconstitutionnelles. L’ensemble du système est composé de la Cour suprême et de plusieurs tribunaux fédéraux à travers le pays. Les députés sont généralement élus à vie sans être élus par les citoyens.

à propos de l'auteur
Nouvelle immigrante revenue de Suisse. Patricia est ingénieure, professeure de Sciences et artiste.
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