L’économie d’Israël en vacances prolongées
La rentrée de septembre n’a pas le même sens pour tous les Israéliens : les élèves du secondaire restent à la maison pour cause de grève des enseignants, alors que les députés bénéficient de trois mois de vacances parlementaires.
Les députés israéliens sont partis en vacances le 28 juillet dernier ; les débats à la Knesset ne reprendront que le 27 octobre prochain, soit exactement trois mois de pause parlementaire.
À un moment où l’économie a besoin de législation pour continuer à tourner en période de guerre, cette pause parlementaire paraît exagérée ; de nombreux débats autour de plusieurs lois importantes ont été interrompus et ne reprendront qu’avec la rentrée des parlementaires, après les fêtes juives du Nouvel an, Kippour et Souccot.
Dossiers en attente
L’économie israélienne se trouve donc plongée dans trois mois d’incertitude. Parmi les dossiers en attente :
- le budget 2025, la cherté de la vie,
- l’indemnisation des familles déplacées,
- la planification à long terme des dépenses militaires,
- les aides aux commerces défaillants,
- etc…
En ce début septembre 2024, le ministre des Finances n’a toujours pas trouvé le temps pour préparer le projet de loi de finances 2025, qui aurait dû être présenté en Conseil des ministres avant la fin août.
Pour parer au plus pressé, le Conseil des ministres a approuvé, il y a quelques jours, une rallonge de 3,4 milliards de shekels au budget 2024 pour financer les aides aux familles déplacées jusqu’à la fin de l’année ; le problème est que ce correctif budgétaire exige un vote des députés qui rentreront de vacances fin octobre…
En attendant des décisions qui permettraient de combler le déficit budgétaire qui atteint déjà 8,1% du PIB (155 milliards de shekels), le gouvernement met la main dans la poche des Israéliens : durant l’été, chaque salarié a été mis à contribution en « donnant » un jour de congé payé pour financer l’effort de guerre, sans compter les fortes hausses de la TVA et de la taxe d’habitation prévues pour 2025.
Plan Marshall
Les députés auraient pu profiter de cet été pour prendre des mesures nécessaires à une guerre qui se prolonge : les familles déplacées, les réservistes et les victimes de guerre ont besoin de se savoir soutenus moralement et financièrement, tâche qui revient aux élus du peuple.
De même, les députés auraient pu mettre à profit la trêve estivale pour convaincre le gouvernement de lancer un plan économique pour l’après-guerre ; l’attente actuelle retardera le redémarrage tant attendu de l’activité lorsque le conflit s’atténuera ou s’éloignera.
Israël a besoin de l’équivalent du Plan Marshall que les États-Unis avaient mis en place en 1948 pour aider à la reconstruction des villes et des installations bombardées lors de la seconde guerre mondiale.
Stand-by
La retombée immédiate de cet état de stand-by dans lequel est plongée l’économie a été la décision prise le 12 août dernier par l’agence internationale Fitch d’abaisser la note de crédit d’Israël ; Fitch avait longtemps repoussé sa décision, donnant aux dirigeants israéliens (gouvernement et députés) le temps de se ressaisir pour améliorer la gestion de la guerre.
Fitch s’est finalement aligné sur Moody’s et Standard & Poor qui avaient abaissé leur note en début d’année (respectivement en février et avril dernier), préconisant notamment une plus grande rigueur budgétaire face aux déficits qui dérapent.
La baisse de la note d’Israël par les trois agences se traduit immédiatement par le renchérissement des emprunts contractés par Israël pour financer la guerre ; on peut estimer qu’Israël déboursera autour de 5 milliards de shekels par an en intérêts supplémentaires, autant d’argent qui amputera les services publics.
Les retombées économiques du conflit vont dépendre de sa durée, de son ampleur et de son intensité ; mais si les décideurs sont en vacances, en trêve estivale ou en stand-by, l’incertitude va amplifier le coût de la guerre, et retarder le retour à la normale.