Le Prix Nobel de la paix devrait être attribué à Kfir Bibas, plus jeune otage du monde

Des manifestants brandissent des portraits d'otages détenus par le Hamas dans la bande de Gaza tandis qu'une vidéo mettant en vedette Kfir Bibas, qui, avec sa mère Shiri et son frère Ariel, est toujours détenu en otage à Gaza, joue derrière eux lors d'une manifestation à Tel Aviv, en Israël, le samedi 18 janvier 2025. (Crédit : AP Photo/Ohad Zwigenberg)
Des manifestants brandissent des portraits d'otages détenus par le Hamas dans la bande de Gaza tandis qu'une vidéo mettant en vedette Kfir Bibas, qui, avec sa mère Shiri et son frère Ariel, est toujours détenu en otage à Gaza, joue derrière eux lors d'une manifestation à Tel Aviv, en Israël, le samedi 18 janvier 2025. (Crédit : AP Photo/Ohad Zwigenberg)

Le 13 février 2006, Ilan Halimi était retrouvé nu, tondu, bâillonné, menotté, défiguré, le corps brûlé et agonisant le long des voies ferrées du RER C. Parce que Juif, il est mort seul, après 24 jours de torture, sous l’indifférence de ceux qui auraient pu parler plus tôt. Dix-neuf ans plus tard, en 2025, l’impensable se reproduit. Le silence tue encore.

Le 7 octobre 2023, parce que Juif, Kfir Bibas, bébé de 9 mois, était enlevé par le Hamas avec sa famille et devenait le plus jeune otage du monde. Depuis 16 mois, lui et 75 autres otages vivent l’enfer, torturés, isolés, affamés, oubliés.

L’indifférence d’hier a coûté la vie à Ilan Halimi. L’indifférence d’aujourd’hui condamne un bébé, Kfir Bibas, et les autres otages. Ne répétons pas l’histoire. Ne laissons plus l’oubli gagner.

Et pourtant, ce samedi 8 février 2025, l’histoire s’est répétée avec les bouleversantes images de la libération d’Or Levy, Ohad Munder et Eli Sharabi.

Ils sont vivants, mais dans un état qui rappelle tragiquement les rescapés des camps nazis. Amaigris, brisés, ils ont vécu l’enfer dans les tunnels de Gaza ou ailleurs. Et comme si cela ne suffisait pas, ils ont aussi perdu une partie de leur famille, assassinée par les monstres du Hamas.

Un choc, une colère, un cri d’alarme

Nous sommes sous le choc, révoltés par ces images insoutenables. Nous avions pourtant dit : « Plus jamais ça ! » Alors comment expliquer ce silence assourdissant d’une partie de nos médias et de nos politiques ? Où sont-ils ? Pourquoi cette passivité face à l’horreur ?

Des impacts de balles couvrent le mur de la chambre de l’otage Ariel Bibas, 5 ans, dans le kibboutz Nir Oz, en Israël, le vendredi 21 juin 2024. Ariel a été kidnappé le 7 octobre avec son petit frère, Kfir, aujourd’hui âgé deux ans, sa mère, Shiri, et son père, Yarden. (Crédit : AP Photo/Oded Balilty)

Il reste 76 otages encore détenus ou portés disparus. Dont un Français, Ohad Yahalomi, ainsi que deux enfants, Kfir Bibas (2 ans), Ariel Bibas (5 ans), ainsi que leur mère, Shiri Bibas. Yarden Bibas ayant été libéré seul, sans sa famille, la semaine dernière, en disant :

La lumière de ma vie est toujours à Gaza.

Depuis 16 mois, ces otages subissent l’indicible. Chaque jour compte désormais. Sur les 251 personnes enlevées durant l’attaque du 7 octobre 2023 qui a déclenché la guerre à Gaza, 76 sont toujours retenues à Gaza, dont au moins 34 sont morts, selon l’armée israélienne.

Et une question me hante : pourquoi, depuis le 7 octobre 2023, n’a-t-on vu surgir aucun Juste à Gaza ? Ne me répondez pas qu’ « ils ont peur » ou que « c’est trop dangereux ».

En Europe, il y a eu des Justes, des citoyens français, qui ont risqué leur vie pour sauver des membres de ma famille. Sans eux, je ne serais pas en train d’écrire ces lignes aujourd’hui.

Où est passée la Croix-Rouge durant ces 16 mois ? Le rôle de « taxi » qu’elle s’est contentée de jouer fait honte. Dans d’autres conflits, elle apporte médicaments et soutien humanitaire. Ici, rien. Pas une visite, pas un signe de vie transmis. Un minimum de volonté de leur part aurait pu soulager les otages.

Le temps presse

Cela fait 16 mois que ces otages sont privés de liberté, livrés aux pires traitements. 16 mois de tortures, d’humiliations, de souffrances indescriptibles. Le temps presse. Chaque jour de plus est un jour de trop.

Nous avons un devoir de mémoire, mais surtout un devoir d’action. L’Histoire jugera notre silence et notre inaction. Nous ne pouvons pas détourner les yeux pendant que des enfants grandissent en captivité, pendant que des familles sont détruites.

Aux dirigeants français et européens, nous disons : votre silence ressemble à une trahison. La France ne peut pas se contenter d’attendre. Nous exigeons des actes concrets, une pression diplomatique maximale, des sanctions, une mobilisation sans relâche.

Aux médias : où êtes-vous ? Pourquoi cette retenue face à un crime contre l’humanité qui se déroule sous vos yeux ? Informez, exposez, montrez la réalité de ce que ces otages vivent depuis 16 mois !

À chacun d’entre nous : ne soyons pas complices par notre indifférence. Partageons, mobilisons-nous, exigeons la libération de ces otages dont encore un Français. L’inaction est un choix. Détournons-nous de cette option et agissons ! Ne laissons pas le temps nous condamner à l’impuissance. Il est encore temps d’agir. Mais demain, il sera peut-être trop tard.

Des manifestants, le jeudi 18 janvier 2025 à Tel Aviv, tiennent des ballons orange lors d’un rassemblement en solidarité avec Kfir Bibas, bébé israélien, pour son premier anniversaire, en captivité aux mains du Hamas dans la bande de Gaza. (Crédit : AP Photo/Oded Balilty)

Article paru le 13/02/25 sur MARIANNE. Avec l’aimable autorisation de l’auteur.

à propos de l'auteur
Sandra Ifrah est une militante engagée pour la paix, porte-parole du collectif Women United for Peace et ambassadrice de l’association France-Israël, où elle œuvre au rapprochement des sociétés civiles. Très active en France, elle se mobilise particulièrement sur les questions de l’antisémitisme, du sort des otages et de l’image d’Israël. Elle écrit également de nombreuses tribunes et articles pour sensibiliser et faire entendre ces enjeux.
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