Le mufti de Gaza contre le Hamas : ce n’est pas ce que vous croyez
![Linda Sarsour sur la scène de la Marche des Femmes de Washington, D.C., le 21 janvier 2017. (Crédit : Theo Wargo/Getty Images) Linda Sarsour sur la scène de la Marche des Femmes de Washington, D.C., le 21 janvier 2017. (Crédit : Theo Wargo/Getty Images)](https://static.timesofisrael.com/frbldev/uploads/2024/11/Linda-sarsour-640x400.jpg)
SEMMO n°5 – Savoir Ecouter les Maux du Moyen-Orient
Le mufti de Gaza contre le Hamas : ce n’est pas ce que vous croyez – Pourquoi le viol d’une israélienne n’est pas un viol ? – Mais au fait, pourquoi l’Allemagne soutient-elle Israël ? – Le général des Gardiens de la Révolution qui en veut aux Juifs, sionistes ou pas.
Info n°1 : Le mufti de Gaza se dresse contre le Hamas. Mais ce n’est pas ce que vous croyez
Début novembre 2024, le professeur de droit islamique et ancien doyen du département de droit et sharia à l’université islamique de Gaza, Salman Al-Dayah, a exprimé de vives remontrances à l’égard des « politiciens », c’est-à-dire du Hamas.
Le document intitulé « Politiciens, arrêtez cette expansion ! » demande au Hamas de réduire ses prétentions afin d’enfin interrompre les souffrances du peuple de Gaza, et si possible avant l’hiver.
Al-Dayah, que certains désignent comme « le mufti de Gaza », reprend chacune des justifications que le Hamas a exprimées pour justifier l’attaque cruelle du 7 octobre 2023, et y répond point par point.
Al-Dayah estime tout d’abord que l’attaque du 7 octobre 2023 est illégitime. Mais attention, non pas parce qu’elle a fait preuve de cruauté extrême vis-à-vis de femmes et d’enfants. Non, la raison est que le Hamas n’a pas pris en compte les souffrances des gazaouis qui s’en sont suivies. La sharia, explique Al-Dayah, prescrit qu’une guerre (c’est-à-dire un jihad) peut-être initiée pour combattre une agression contre des Musulmans, que ce soit à l’encontre de leur foi, de leur vie, de leur honneur ou de leurs biens. Al-Dayah ajoute que les conditions suivantes doivent être respectées : la foi et l’unité doivent régner, et les combattants doivent disposer de suffisamment de forces et de moyens. Dans l’objectif de protéger les civils, ils doivent s’assurer de pouvoir se réfugier loin des habitations, des tours résidentielles, des écoles et des hôpitaux.
Selon Al-Dayah, le Hamas aurait dû tenir compte du fait qu’Israël répondrait avec force et que cela provoquerait des conséquences négatives pour la population gazaouie. Al-Dayah ajoute que la sharia interdit de déclarer une guerre qui ne peut déboucher que sur une défaite.
Il aborde également la notion de martyrs que la direction du Hamas a évoquée. Celle-ci a déclaré que les morts civils habitants de Gaza soutenaient la cause qu’ils défendaient. Pour cela, les leaders du Hamas doivent être protégés. Mais pour Al-Dayah, la sharia prévoit exactement l’inverse : les civils doivent être protégés aux dépens des combattants et des leaders.
Al-Dayah s’oppose également à la stratégie du Hamas en ce qui concerne l’opinion publique internationale d’Israël. Le Hamas estime que les opinions internationales contre Israël, les manifestations estudiantines dans le monde, l’accusation contre Israël de commettre un génocide, constituent bien des retournements de situation. Mais sur le fond, critique Al-Dayah, l’objectif n’a pas été atteint. Israël continue d’être approvisionné en armes par la communauté internationale.
Al-Dayah critique également le Hamas parce que, estime-t-il, la défaite et les victimes sont tellement nombreuses qu’elles ont entraîné des rejets de la religion voire des apostasies. S’il admet que la notion de martyr dans l’islam existe « pour la bonne cause », les conditions n’ont pas été réunies dans la guerre présente à cause de la manière calamiteuse dont elle a été menée par le Hamas.
Al-Dayah juge également très sévèrement l’utilisation de boucliers humains par le Hamas. Selon lui, c’est le Hamas qui est responsable du bien-être des civils gazaouis, pas Israël, ni l’ONU.
Al-Dayah conclut qu’aucun des objectifs du Hamas n’a été atteint par cette guerre. Le Hamas n’aurait donc jamais dû envahir Israël le 7 octobre 2023. Il devrait se rendre immédiatement, afin que l’aide humanitaire et l’assistance puissent parvenir aux populations avant l’hiver.
On le voit, la règle de « l’ennemi de mon ennemi est mon ami », ne s’applique pas au Moyen-Orient. Le mufti de Gaza a un ennemi, le Hamas. Mais uniquement parce qu’il n’était pas assez efficace dans sa guerre contre Israël.
Cela doit nous rendre très prudent par rapport aux oppositions des Gazaouis contre le Hamas. Ils ne sont pas pour autant devenus des partenaires de paix pour Israël.
Pour en savoir plus : https://www.memri.org/reports/prominent-gazan-salafi-cleric-declares-hamas-october-7-invasion-illegitimate-jihad-due-its
Info n°2 : Pourquoi le viol d’une israélienne n’est pas un viol ?
Le 18 octobre 2024, au cours d’un sermon prononcé dans une mosquée du New Jersey, Suhaib Webb, chercheur et savant islamique, a admiré le fait que les manifestations pro-palestiniennes qui se tiennent devant les universités, profitent de la présence d’imams pour diriger la prière du soir.
Selon lui, les étudiants ne prennent pas le prétexte de leur militantisme pour « désobéir à Allah ».
Suhaib Webb remarque que la pratique rigoureuse de l’islam associée au fait de parler des héros et des « she-roes » de Palestine, est admirable. Remarquons que les « she-ros » est un terme américain mis en avant par le wokisme, pour féminiser les héros[1].
Très fidèle aux idées woke, à tout le moins une partie d’entre elles, Suhaib Webb rappelle aussi que le sionisme est un suprémacisme blanc, équivalent au KKK-Ku Klux Klan. Là aussi, il adhère aux idées de ce que l’écrivain américain Yasha Mounk appelle « le Piège de l’identité »[2]. Mounk y évoque le fait que la militante féministe américaine Tamika Mallory a déclaré que « les Juifs blancs, comme tous les blancs, relèvent du suprémacisme blanc »[3].
D’ailleurs, Linda Sarsour, compagnon d’aventure de Tamika Mallory, estime qu’il n’est pas possible d’être à la fois sioniste et féministe[4]. Leur mouvement avait été soutenu par Louis Farrakhan, dirigeant de l’organisation afro-américaine antisémite Nation of Islam, mais Linda Sarsour minimise ce soutien, affirmant que l’antisémitisme existait avant Farrakhan et qu’il lui survivra[5]. Il n’y aurait donc, selon elle, aucune raison de refuser ce soutien encombrant. On le voit, les raccourcis idéologiques font la loi.
Il n’y a donc pas lieu de s’étonner tout à la fois que le sionisme soit identifié au KKK, que le féminisme refuse les sionistes dans ses rangs mais qu’il accepte les antisémites et, surtout, ce qui n’aurait pas dû être une surprise, que les viols de femmes israéliennes le 7 octobre 2023, n’aient pas été admis comme tels par les mouvements féministes du monde.
Pour en savoir plus : https://www.memri.org/tv/islam-suhaib-webb-nj-sjp-encampment-imam-zionism-kkk
Info n°3 : Mais au fait, pourquoi l’Allemagne soutient-elle Israël ?
Pour le journaliste libanais Fuad Al-Kharsa, c’est évident. L’Allemagne craint le retour des Juifs. C’est pour cela, ajoute-t-il dans une interview le 25 octobre 2024, qu’elle soutient Israël. C’est pour cela qu’elle fait parfois preuve d’un complexe de culpabilité à l’égard de « l’holocauste », voire du « soi-disant holocauste ».
Grand prince, Al-Kharsa, ajoute qu’il n’a pas de problème à admettre que cet holocauste s’est bien produit, puisque justement, en tant qu’Arabe, il n’a rien à se reprocher à son sujet.
Ces remarques sont très intéressantes à plusieurs titres.
En premier lieu, notons que Al-Kharsa entretient une relation très particulière avec la vérité historique. S’il admet que la Shoah s’est bien produite, ce n’est pas parce que les preuves historiques factuelles, les témoignages, les vestiges, les rapports nazis le prouvent. Non, si ce journaliste est prêt à admettre l’existence de la Shoah, c’est parce que cela ne lui porterait aucun préjudice en tant qu’Arabe.
Mais, en second lieu, ces remarques de Al-Kharsa sont intéressantes également parce qu’il se trompe lourdement lorsqu’il prétend que le monde arabe est complètement étranger à la Shoah. Il est à présent très connu que le mufti de Jérusalem Al-Husseini a entretenu des relations étroites avec le nazisme en général et Hitler en particulier.
![](https://static.timesofisrael.com/frbldev/uploads/2024/11/Hitler-Mufti-Jerusalem.jpg)
En mars 1937, le consul allemand en Palestine assure que les arabes vouaient une très grande admiration au Führer et que les saluts hitlériens y étaient très fréquents. Le roi Ibn Séoud d’Arabie, affirmait en février 1939 que « tous les Arabes et les Musulmans des différentes régions du monde tiennent l’Allemagne en haute estime, et celle-ci est encore accrue par la lutte que ce pays mène contre le judaïsme, l’ennemi juré des Arabes »[7].
Et aujourd’hui encore, les soldats israéliens trouvent très fréquemment dans les demeures gazaouies des exemplaires de « Mein Kampf » traduits en arabe. Les librairies jordaniennes le vendent littéralement en tête de gondole. Le monde musulman non-arabe n’est pas en reste. Début octobre 2024, l’officiel iranien Reza Taghavi, approuvait les démarches de Hitler d’avoir persécuté, déporté et tué les Juifs[8].
Mais Al-Kharsa affirme également que l’Allemagne craindrait le retour des Juifs sur son territoire. Là également, les faits le contredisent. La population juive en Allemagne comptait à peine 20 000 âmes après la Shoah. Elle s’est multipliée par 6 depuis, atteignant 120 000 personnes.
On le sait aujourd’hui, le Liban souffre non seulement de la présence du Hezbollah sur son territoire et dans ses institutions. Mais il souffre aussi d’un d’antisémitisme généralisé qui rend sa population aveugle. Ce n’est pas Al-Kharsa ni ses semblables qui lui rendront la vue.
Pour en savoir plus : https://www.memri.org/tv/lebanon-journalist-fuad-kharsa-germany-jews-october7-europe-holocaust
Info n°4 : Le général des Gardiens de la Révolution qui en veut aux Juifs, sionistes ou pas
Le 10 novembre 2024, le général des Gardiens de la Révolution iranienne Mohammad-Jafar Asadi, se révoltait du fait que ni les Juifs iraniens ni les Juifs antisionistes, ne fassent pas plus entendre leur opposition à cette tumeur cancéreuse que représente Israël. Israël est une marque honteuse pour toute l’humanité selon lui.
« Ces Juifs maléfiques commettent la plus grande injustice de l’histoire de l’humanité, condamne-t-il. Les sionistes ont porté le déshonneur aux Juifs. »
D’ailleurs, « Les sionistes ont pour origine les Juifs, ceux qui ont fait ce qu’ils ont fait au prophète Moïse ».
Le général avoue qu’on lui a plusieurs fois demandé de distinguer les Juifs des sionistes, mais, apparemment, c’est plus fort que lui. Sa haine des Juifs occupe tout son espace cérébral, l’empêchant de respecter les consignes politiques. On pourrait presque le prendre en pitié, si on ne pensait pas au sort malheureux des Juifs iraniens.
Pour en savoir plus : https://www.memri.org/tv/irgc-general-mohammad-jafar-asadi-iranian-evil-jews-massacre-action
[1] Par le jeu de mot de « Heroe », composé du pronom masculin « he » soit « il », et remplacé par le pronom féminin « she », soit « elle ». Heroe devient Sheroe.
[2] Voir son ouvrage « Le Piège de l’identité : comment une idée progressiste est devenue une idéologie mortifère »
[3] Ibid, chapitre 13.
[4] https://www.thenation.com/article/archive/can-you-be-a-zionist-feminist-linda-sarsour-says-no/
[5] Voir à 8:05 : https://www.youtube.com/watch?v=NOHbo6RBbbc
[6] Zvi Elpeleg (en) (trad. de l’hébreu), The Grand Mufti : Haj Amin al-Hussaini, founder of the Palestinian national movement, Londres, Frank Cass Publishers, 1993, 239 p. (ISBN 0-7146-3432-8) – p.179.
[7] Georges Bensoussan, Juifs en pays arabes – Le grand déracinement 1850-1975, pages 657-658 de l’édition de poche.