La réforme judiciaire se poursuit en Israël, le budget 2025 attendra
Le ministre israélien de la Justice a décidé de remettre à l’ordre du jour la réforme judiciaire lancée début 2023 ; en réalité, la réforme n’a jamais été suspendue, elle s’est poursuivie à petites doses et repartira de plus belle en 2025.
L’année 2025 va démarrer sans que l’État ne dispose d’un budget voté. La soumission en première lecture du budget 2025 a eu lieu à la Knesset le 16 décembre dernier, mais les délais sont désormais trop serrés pour permettre aux parlementaires d’approuver définitivement la loi de finances avant la fin 2024.
Après plus d’un an de guerre, l’ordre du jour du parlement israélien reflète des priorités législatives qui semblent ignorer les nécessités économiques du moment.
Défis économiques
L’absence de budget 2025 oblige à reconduire le budget 2024 qui n’est pas forcément adapté aux réalités et besoins de 2025 ; de très nombreux ajustements budgétaires sont nécessaires pour faire face à la guerre, notamment la hausse des dépenses militaires.
D’autant plus que les défis économiques que devra affronter le pays en 2025 sont nombreux : dégâts matériels, familles déplacées, secteurs à l’arrêt, main d’œuvre manquante, cherté de la vie, etc… Il faudra aussi trouver de nouvelles sources de financement, notamment en augmentant certains impôts.
Autant dire que le manque de budget 2025 va se traduire par une instabilité financière et handicaper l’intervention de l’État dans l’économie, tout en remettant à plus tard certaines dépenses pourtant urgentes à réaliser.
Au lieu de tout cela, le gouvernement et les parlementaires ont consacré des heures de débat à une réforme judiciaire qui divise l’opinion publique ; 2025 va donc démarrer sans loi de finances mais avec des lois de nature à affaiblir la démocratie israélienne.
Changement de régime
La réforme judiciaire lancée par le gouvernement Netanyahu début 2023 consistait à renforcer le pouvoir exécutif tout en affaiblissant les contre-pouvoirs comme la justice et les médias.
La tentative de limogeage de l’actuelle Conseillère juridique du gouvernement n’est qu’un volet d’une réforme qui comprend plusieurs mesures significatives, comme la séparation des pouvoirs du Conseiller juridique, le changement du mode d’élection du président de la Cour suprême, la limite à sept ans du mandat de conseiller juridique ministériel, etc…
Pour éviter de relancer le débat public sur la réforme judiciaire, la coalition a changé de stratégie. Dorénavant, des textes de loi sont proposés par des députés isolés et non comme des projets de loi gouvernementaux, notamment :
- La députée du Likoud Tali Gottlieb, soutenue par le ministre des Communications Shlomo Karhi, propose une loi prévoyant la privatisation du service public de la radiotélévision dans les deux années à venir ou, à défaut, sa fermeture.
- Le député Hanoch Milbitsky (Likoud) propose une loi qui vise à affaiblir l’association du Barreau des avocats israéliens en lui faisant perdre son indépendance financière.
- La députée Tali Gottlieb (Likoud) propose une loi qui renforcerait l’immunité parlementaire des députés.
- Le député Erez Melloul du parti Shass a déposé une loi donnant au ministre des Cultes toutes les compétences pour nommer les rabbins de quartiers, répartir les budgets des conseils religieux et élargir les pouvoirs des tribunaux rabbiniques.
Dorénavant, le débat public en Israël tourne autour de la question de savoir si le gouvernement Netanyahu conduit à un changement de régime ou à une réforme de l’État.
Face à ce défi existentiel, le budget 2025 peut attendre.