La ligne rouge…

Un député LFI de Seine-Saint-Denis, Thomas Portes, déjà exclu une première fois du parlement, n’a pas hésité à déclarer publiquement que : « les athlètes israéliens n’étaient pas les bienvenus aux JO ».
Que l’on soit d’accord ou pas avec la politique du gouvernement israélien, ces propos sont pour le moins inacceptables et ne relèvent pas d’une quelconque opposition au sionisme, mais sont clairement antisémites, en désignant les athlètes israéliens comme des cibles potentielles, comme l’ont affirmé d’une seule voix le Ministre de l’Intérieur et le CRIF.
Faudrait-il rappeler à Mr Portes qu’il y a 52 ans, des athlètes israéliens avaient été pris en otages (11 furent assassinés) par des membres de l’organisation palestinienne Septembre noir, ancêtre du Hamas, et bien connue pour ses actes terroristes comme l’assassinat du Premier ministre jordanien Wasfi Tall en 1971, ou l’attaque de l’ambassade saoudienne à Khartoum en 1973.
De telles paroles sont d’autant plus choquantes que l’on a bien du mal à voir la relation entre des sportifs de tous bords et la politique menée par leur gouvernement.
Si l’on s’en tient aux propos de Mr Portes, il faudrait exclure de ces jeux les athlètes nord-coréens, chinois, ou iraniens, sachant que l’Iran envoie d’ailleurs à cette occasion sa plus grande délégation sportive. Quand à la comparaison avec la déclaration d’Anne Hidalgo, comment comparer un agresseur sans scrupules, avec un pays qui se défend d’une attaque terroriste tuant 1 170 civils et 252 en otage ?
Que la politique menée par le Premier ministre israélien et son gouvernement ne convienne pas à ce député, voilà qui est de son droit, mais ostraciser, comme il vient de le faire, des athlètes, non pas pour des raisons politiques mais uniquement à cause de leur appartenance à une ethnie, ne vaut guère mieux que l’attitude d’un certain Adolf Hitler lorsqu’il s’éclipsa pour ne pas avoir à serrer la main de Jesse Owens à cause de sa couleur de peau. Cela dit, vu la ségrégation toujours présente aux Etats-Unis à l’époque, l’attitude du président Franklin Roosevelt ne fut guère à la hauteur de l’événement. La ségrégation, dans cette grande démocratie, était pour le moins courante, et ne concernait pas que les gens de couleur comme le montre le film : « Le mur invisible », puisqu’en 1961, le chanteur Sammy Davis Jr, converti au judaïsme en 1954, ne fut pas invité à l’investiture de JFK qu’il avait pourtant soutenue…
L’attitude de Mr Portes s’inscrit donc, plus largement que l’antisémitisme qu’elle véhicule, dans un grand mouvement ségrégationniste qui consiste pour ces personnes, qu’elles soient conservatrices ou progressistes, à s’ériger en juges de la bien-pensance.
De la même manière, l’on ne s’offusquera donc pas si des voix s’élèvent pour le trouver indigne de ses fonctions et de la place qu’il occupe au sein de l’Assemblée Nationale.
Comme l’a déclaré le député Rodrigo Arenas, lui aussi membre de LFI : « Le Hamas ne sert plus la cause palestinienne depuis longtemps. Pas plus que l’assassin de Rabin jadis ou les fanatiques religieux et B. Netanyahu aujourd’hui ne servent la cause israélienne. La seule cause que servent ces hommes corrompus, assoiffés de vengeance et de haine, c’est le cycle de la violence ».
Plutôt que de s’en prendre d’une manière aussi haineuse qu’aveugle à des personnes dont la responsabilité dans les actions de Tsahal, qui n’est d’ailleurs qu’un instrument au service d’une politique pour le moins contestable, me semble inexistante ; ce député devrait faire la part des choses.
Voir les événements et les personnes à travers un prisme uniquement idéologique n’aboutit qu’à déformer la réalité pour la faire correspondre à cette dernière.
La réalité, c’est que s’il fallait exclure des jeux tous les athlètes dont les gouvernements respectifs ont quelque chose à se reprocher, il ne resterait plus grand monde à participer aux JO .Même les athlètes suisses pourraient être mis en cause eu égard au passé de leur pays…
Que Mr Portes condamne la politique du gouvernement israélien, c’est son droit le plus strict. Qu’il s’en prennent à des hommes et des femmes qu’ils ne connaît même pas, au nom de leur appartenance, non seulement à une nation, mais également à une ethnie, est là une attitude qu’il est difficile de ne pas qualifier de raciste.
En tenant de tels propos, Thomas Portes a franchi la ligne rouge qui sépare l’opposition au sionisme de l’antisémitisme. Voilà qui lui vaudra sans doute la médaille d’or de l’intolérance…