La France contre Daech vs Israël contre le Hamas (1/2)

Des policiers patrouillant près de la scène de crime à proximité de la salle de concert au Bataclan le 14 novembre 2015 à Paris, un jour après une série d'attaques coordonnées dans et autour de Paris. les djihadistes de l'Etat Islamique ont revendiqué les attaques de Paris qui ont tué au moins 129 personnes (Crédit : AFP PHOTO / FRANCK FIFE)
Des policiers patrouillant près de la scène de crime à proximité de la salle de concert au Bataclan le 14 novembre 2015 à Paris, un jour après une série d'attaques coordonnées dans et autour de Paris. les djihadistes de l'Etat Islamique ont revendiqué les attaques de Paris qui ont tué au moins 129 personnes (Crédit : AFP PHOTO / FRANCK FIFE)

Depuis 1948, Israël a eu à vivre 4 guerres dont il est sorti vainqueur chaque fois. Mais depuis le 7 octobre 2023, le pays assiste, sidéré, à une agression inqualifiable, perpétrée par le gouvernement de la Bande de Gaza, le Hamas. Contrairement aux guerres précédentes qui étaient des conflits interétatiques, la 5ème est de nature fondamentalement fort différente : elle oppose Israël, un État démocratique, au Hamas, une organisation terroriste. L’État juif s’est juré de l’éradiquer. Objectif tout à fait légitime, mais comment l’éradiquer ? Et surtout, comment atteindre cet objectif dans un contexte international devenu hostile à Israël ?

Depuis le 7 octobre, « Israël est en guerre . Les actes commis ce shabbat, 7 octobre, jour de Sim’ha Torah sur notre territoire, sont des actes de guerre. Ils ont fait au moins 1250 morts et de nombreux blessés, ainsi que 250 otages . Ils constituent une agression contre notre pays, contre ses valeurs, contre sa jeunesse, contre son mode de vie. En attaquant Israël, le Hamas a donc, une nouvelle fois, attaqué le monde.

Face aux actes de guerre qui ont été commis sur notre sol et qui viennent après tant d’autres crimes commis ces dernières années au nom de cette même idéologie djihadiste, nous devons être impitoyables. »

L’auteur de cette déclaration n’est ni le Premier ministre d’Israël, ni un ministre de son gouvernement. Il s’agit d’un extrait du discours du président de la République française, François Hollande [1], dont je me suis permis de faire un copier-coller en remplaçant « France » par Israël, Daech par Hamas, et 130 victimes par le nombre de victimes israéliennes. J’ai ensuite retenu certaines parties de son discours ainsi que des déclarations de son Premier ministre, Manuel Valls [2], pour tenter d’en dégager les conditions à remplir pour remporter la victoire dans une guerre contre le terrorisme.

Après tout, si la France a réussi à affaiblir considérablement Daech (terme qui désigne L’État islamique), pourquoi Israël ne réussirait-il pas à mettre le Hamas hors d’état de nuire ?

Les moyens à mettre en place

1. Les ennemis 

La France et Israël sont confrontés à des ennemis qui présentent bien des similitudes :

  • Comme Daech, le Hamas a son territoire, ses combattants, son peuple, les Palestiniens de la Bande de Gaza ;
  • Daech et le Hamas partagent le même objectif : le Jihad, qui consiste pour le Hamas à éradiquer l’État juif et son peuple et à les remplacer par un État islamique ;
  • Comme Daech, pour parvenir à ses fins, le Hamas a choisi le terrorisme, il s’agit donc de semer la terreur au sein de la population israélienne. Daech et le Hamas excellent dans l’horreur, (meurtres de civils, viols, démembrements, égorgement…). Peut-être même le Hamas est-il encore plus monstrueux que Daech.

En France, en 2014, Daech a perpétré bien des attentats dont ceux de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher. En Israël, le Hamas a commandité bien des attentats, et le 7 octobre il s’est livré à un massacre innommable, un massacre qu’on a évalué à 10 Bataclan ou encore au 11 septembre aux États-Unis[3].

2. L’objectif 

Puisque Hollande et M. Valls qualifient la guerre contre Daech de « guerre contre la barbarie », puisque le mot « barbare » pour parler des terroristes est prononcé à plusieurs reprises, on comprend la recommandation : « Nous devons être impitoyables […]. Il ne s’agit donc pas de contenir, mais de détruire cette organisation à la fois pour sauver des populations, […] pour nous protéger ».

Fort bien ! Aucune objection ! La communauté internationale n’a rien trouvé à redire. Le Premier ministre d’Israël endosse la même définition de cette guerre quand il dit « C’est une guerre de la civilisation judéo-chrétienne contre la barbarie ». Mais quand il déclare que la guerre contre le Hamas a pour objectif l’anéantissement du Hamas, la libération complète de la Bande de Gaza du contrôle de cette bande de terroristes, il est assailli de critiques. Comment peut-il parler d’anéantir le Hamas ?!

Il faut donc comprendre : Non à l’objectif d’Israël. Et donc, comme toujours, c’est deux poids, deux mesures.

3. La détermination

« L’ennemi use des moyens les plus vils pour essayer de tuer. Mais il n’est pas insaisissable. Je serai même plus précis encore : il n’est pas hors d’atteinte. Notre démocratie a triomphé d’adversaires bien plus redoutables, en vérité, que ces lâches assassins. Notre République n’est pas à la portée de méprisables tueurs ».

Le Gouvernement israélien ne pourrait-il pas tenir les mêmes propos ? Tout comme il pourrait tenir les mêmes déclarations que celles du Premier ministre français : « Face à ce totalitarisme islamiste, nous dit Manuel Valls, la France mène et mènera une guerre implacable. Daech veut nous frapper ? Nous frapperons plus fort. Nous frapperons juste car nous agissons au nom de la liberté et pour la sécurité de nos concitoyens. Et nous gagnerons ! ».

Israël, tout comme la France, a triomphé d’ennemis plus redoutables par leur nombre et par leurs moyens qu’une organisation terroriste. En 67, une coalition d’États arabes (Égypte, Jordanie, Syrie), au cri de « Juifs à la mer ! », a déclaré la guerre à ce petit État qui allait fêter un an plus tard ses 20 ans. Six jours ont suffi à l’Armée de Défense d’Israël pour infliger une défaite retentissante aux centaines de milliers d’Arabes, déterminés à en finir avec cette poignée de Juifs. En 73, ce fut la Guerre du Kippour, déclarée encore une fois par une coalition (Égypte et Syrie). Nouvelle victoire de l’armée.

Et aujourd’hui, Benjamin Netanyahou et son ministre de la Défense font preuve d’une détermination féroce. Ils tiennent exactement les mêmes propos que le président français et son Premier ministre, Manuel Valls. Comme eux, il envisage la possibilité d’une victoire contre le Hamas au terme d’une guerre sans merci et affirme : « Nous gagnerons ! ». De partout des voix s’élèvent alors pour l’en dissuader. La communauté internationale juge d’ores et déjà qu’Israël échouera !

Même son principal allié, l’Amérique, partage le point de vue des pays occidentaux et confirme que le pays va au-devant d’un échec : « Une victoire totale d’Israël contre le Hamas est peu probable », selon le secrétaire d’État adjoint américain.

Alors sur quoi se base-t-on pour le décourager, pour affirmer qu’Israël ne réussira pas ?

Son ennemi, le Hamas, contrairement à Daech, l’ennemi de la France, serait-il hors d’atteinte ? Est-il plus difficile de lutter contre le Hamas que contre des centaines de milliers d’Arabes ? Nous savons bien que non.

Israël serait-il « à la portée de méprisables tueurs » ? Certainement pas !

Le constat est encore le même : deux poids, deux mesures !

Y aurait-il d’autres conditions que l’État juif ne serait pas en mesure de remplir. Si oui, quelles sont-elles ?

4. Le temps 

« Et nous gagnerons ! Oui, même s’il faut du temps, même s’il peut y avoir d’autres épreuves, nous gagnerons cette guerre contre la barbarie. […] Dans cette guerre qui a commencé depuis plusieurs années, nous avons bien conscience les uns et les autres qu’il faudra du temps et que la patience est aussi exigeante que la durée et la dureté avec laquelle nous devons combattre ».

Temps et patience nécessaires ? Comme c’est bon de l’entendre de la bouche du président François Hollande ! D’ailleurs, à plusieurs reprises, le Premier ministre d’Israël et son ministre de la Défense l’ont rappelé. Il faut du temps et de la patience ! Et la communauté internationale en conviendra aisément.

Une guerre contre le terrorisme ne se gagne pas en 6 jours, ni même en un mois. Il faut se préparer à une guerre longue, voire à des années de guerre. Ainsi, la guerre contre Daech a commencé en 2014 et elle se continue à l’heure actuelle. La guerre de l’Amérique en Afghanistan a duré 2 décennies !

Alors pourquoi la communauté internationale refuse-t-elle d’accorder à Israël le temps nécessaire, sinon à l’éradication du Hamas, du moins à son anéantissement sur le plan militaire ? Pourquoi attendre d’Israël qu’il mène ses guerres en un temps record ?

Ce n’est certainement pas la première fois qu’elle exige l’arrêt de la guerre. En 67, lors de la Guerre des Six jours, les États-Unis et l’URSS allié de la Syrie, ont imposé un cessez-le-feu à Israël au bout de 6 jours, quand l’armée n’était plus qu’à 40 kms de Damas. En 73, lors de la Guerre du Kippour, même exigence au bout d’un mois. Et maintenant, depuis le 2ème ou 3ème mois de guerre, elle exige un cessez-le-feu.

En revanche, la Guerre Ukraine-Russie dure depuis déjà 2 ans sans que personne ne parle de la nécessité d’y mettre fin. Craindrait-on la Russie plus qu’on ne craint le Hamas ?

Même le seul et unique « véritable » allié, l’Amérique, veut contraindre l’État juif à recourir à une solution politique rapidement, c’est-à-dire à la création d’un État palestinien qui jouxtera le sien.

« Il est temps que cette guerre prenne fin » a dit Joe Biden il y a quelques jours de cela.

La communauté internationale applaudit car elle œuvre inlassablement à contraindre Israël à consentir à la création d’un État palestinien qui jouxtera le sien. Qui plus est, on oublie que chaque jour éloigne un peu plus tout espoir d’aboutir à la paix parce que les médias insistent sans discontinuer sur le mécontentement de la population israélienne, sur le risque de « génocide », etc… La violence et la mort, c’est le sujet qu’ils privilégient. Ce faisant, ils alimentent l’instabilité politique et le Hamas, qui n’attend que ça, et exploite à son avantage cette situation. Il réussit à rendre sa violence légitime et à jouir du soutien de l’opinion.

Alors, le constat est inéluctable : la communauté internationale, en exigeant de l’État juif, même si le mot n’est pas dit, une capitulation, fait, encore une fois, deux poids, deux mesures.

De grâce, laissons aux Israéliens le temps qu’il leur faut, d’abord pour mener cette guerre à son terme, ensuite pour se préparer à une solution politique et à se plier aux attentes de la communauté internationale.

5. Le soutien de l’ONU 

Il est, certes, sinon nécessaire, du moins très encourageant. « Nous faisons face à une organisation, Daech, disposant d’une assise territoriale, de ressources financières et de capacités militaires. Elle massacre chaque jour et opprime des populations.

C’est la raison pour laquelle la nécessité de détruire Daech constitue un sujet qui concerne toute la communauté internationale. J’ai donc demandé au Conseil de sécurité de se réunir dans les meilleurs délais pour adopter une résolution marquant cette volonté commune de lutter contre le terrorisme ».

L’ONU a répondu rapidement et favorablement à cet appel lancé par la France. Le 15 août 2014, l’ONU adopte la « Résolution 2170 qui condamne les actes terroristes de l’EIIL violant les droits humains, condamne fortement diverses tueries et massacres sauvages de civils, rappelle le concept de crime contre l’humanité, etc… »

Si l’ONU soutient tous les États en guerre contre le terrorisme, il en est un qui fait exception : l’État juif. Pourquoi ? À en juger par le nombre record de condamnations qu’elle émet chaque année contre l’État juif, il faut croire que cette organisation est allergique au mot Juif, que ce mot ne lui inspire que dégoût, que sa haine du Juif est tout simplement irrépressible.

C’est pourquoi le Hamas a pu s’adonner au crime suprême, « le crime d’agression » – même si on refuse de l’appeler par son nom – et perpétrer une tuerie de masse. Il a pu se livrer à un véritable pogrom, sans encourir la moindre condamnation, sans même que son nom ne soit prononcé à l’ONU.

Qui plus est, non seulement l’ONU protège les terroristes du Hamas, mais elle n’a de cesse de s’en prendre à l’État juif. Avec le concours des médias, elle a exploité tout ce qu’elle a pu pour noircir Israël aux yeux du monde et en faire un paria.

  • La CIJ pour génocide
  • La CPI pour crime de guerre et crime contre l’humanité
  • La Liste de la honte pour enfants maltraités
  • Enfin, l’ONU juge qu’en matière de « crimes de guerre », Israël est pire que le Hamas : « Israël a également commis d’autres crimes de guerre, notamment la famine comme méthode de guerre» .

Sinwar, le chef du Hamas, le cerveau du massacre du 7 octobre, est plus que satisfait de ces condamnations, il jubile ! Il a déclaré : « Les Israéliens sont exactement là où nous voulons qu’ils soient », comprenez : au ban des nations.

Une réaction de la communauté internationale devant toutes ces accusations portées contre l’État juif ? Nenni, point du tout ! Ou si peu !

Pourtant, si la France avait été condamnée comme l’est Israël, c’est toute la communauté internationale qui se serait soulevée pour exiger la révocation de toutes les condamnations.

Mais quand une pluie d’accusations non fondées s’abat sur l’État juif, c’est le silence radio. On ne parle ni de la responsabilité du Hamas, ni des otages. On admet donc tous ces chefs d’accusation !

Pourtant, le Hamas a commis un acte terroriste avec invasion de territoire, tuerie de masse, etc…

Pourtant, Israël n’a pas pris l’offensive, il a été attaqué et a usé de son droit d’autodéfense. Un droit assorti de tellement de conditions que cela revient à le lui refuser.

Pourtant, le Hamas est considéré par l’UE comme une organisation terroriste. En quoi les terroristes du Hamas sont-ils différents de ceux de Daech ? Et pourtant, à en croire le gouvernement français, quand il s’agit de terrorisme, la lutte se poursuit tous azimuts !

Conclusion

L’État juif est et sera toujours jugé avec partialité. Difficile pour nous de ne pas dénoncer la politique du « deux poids, deux mesures » ! Encore et encore !

[1] Discours du président de la République française, François Hollande, devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles le 16 novembre 2016

[2] Déclarations de Manuel Valls, Premier ministre, et de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, à l’Assemblée nationale le 25 novembre 2015.

[3] Rapporté aux populations respectives de la France (68 millions d’habitants) et des États-Unis (333 millions), le massacre du 7 octobre en Israel (9,5 millions d’habitants) correspond à près de 100 Bataclan ou 14 fois le 11 septembre.

 

 

à propos de l'auteur
Dora a été professeur de français pendant 30 ans au Collège français de Montréal. Elle a été chroniqueuse pour Radio-Shalom Montreal, puis pour Europe-Israël.
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