Inquiétudes
Et si la guerre ne s’arrêtait pas ? À la stupeur née du 7 octobre, avait succédé la volonté d’éradiquer le danger, avec parfois des velléités de vengeance. L’opération « Épées de fer » ne devait durer que quelques semaines, peut-être quelques mois. Mais on le sait désormais : elle pourrait durer beaucoup plus longtemps, et au bout du compte, le Hamas ne sera pas déraciné de Gaza. Affaibli, oui ; incapable de reprendre le pouvoir dans la bande côtière, oui ; mais pas mis hors d’état de nuire.
D’ailleurs, alors que le nord de Gaza et la région de Khan Younès semblaient débarrassés des milices terroristes, elles ont relevé la tête et font de nouveau pleuvoir des roquettes sur Ashkelon, Sdérot et d’autres localités du sud. Pire encore, les 132 otages, dont on ne sait pas combien sont encore vivants, sont l’objet de tractations interrompues, puis reprises, faisant succéder à l’espoir, la déception, la désespérance pour les familles.
Seule certitude : plus le temps passe, moins grandes sont les chances de les retrouver, et surtout de les retrouver vivants. À cette inquiétude, s’ajoutent beaucoup d’autres. Celle de savoir si la fameuse opération à Rafah sera couronnée de succès ; si la crise avec les États-Unis va s’accentuer ; si le Tribunal de la Haye va condamner les responsables israéliens…
Last but not least, le coût économique de la guerre, jusque-là peu sensible pour les Israéliens, commence à avoir des effets très concrets pour les travailleurs du tourisme qui n’ont plus droit à des indemnités après six mois d’allocation-chômage ; pour les acquéreurs de logements dont les coûts devraient s’alourdir sous le double effet de la hausse des taux d’intérêt et de l’arrêt des chantiers privés de la main d’œuvre palestinienne ; pour les jeunes qui voient les occasions de trouver un emploi se raréfier.
Après trois semaines de fêtes et de commémorations qui avaient commencé avec Pessah (Pâques) et qui viennent de se terminer avec Yom Haatsmaout (Jour de l’indépendance), l’inquiétude est désormais lisible dans la presse, les déclarations des responsables civils et militaires et les sentiments exprimés par les Israéliens. Et l’inquiétude n’est jamais bonne conseillère. Elle conduit les réservistes à craindre d’être rappelés et leurs familles avec eux ; les consommateurs à être plus prudents ; les voyageurs à changer leurs plans ; les investisseurs à différer leurs décisions…
Seuls le gouvernement et ses soutiens font encore preuve d’un optimisme surfait : il s’agit de ne pas désespérer le bon peuple, de lui faire croire que ses dirigeants maîtrisent la situation alors que tout montre qu’ils la contrôlent de moins en moins. L’opposition réclame une date pour de nouvelles élections. Mais elle n’a guère d’influence sur le cours des événements. Une autre source d’inquiétude.