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Indigènes de la République – BDS… deux guerres asymétriques

Le Parti des Indigènes de la République (PIR) est à la France ce que le mouvement BDS est à Israël

Au départ de ce post, il y avait une intuition. Essayer de montrer que le Parti des Indigènes de la République (PIR) est à la France ce que le mouvement BDS (Boycott, désinvestissement, sanction) est à Israël.

Au plan des points communs, ça donnait ça :
– les deux organisations sont dirigées par des hommes et femmes politiques arabo musulmans
– Leurs cibles sont deux pays démocratiques dotés chacun d’une population multiethnique et multi-religieuse, la France et Israël.
– L’argumentaire théorique de leur action est le même : faire campagne contre ces deux démocraties au nom de la lutte contre le colonialisme, le racisme, la discrimination.
– Bien qu’elles n’aient pas recours au terrorisme, les deux organisations souhaitent mettre à genoux les deux pays.

Quelques différences existent entre le PIR et BDS, d’ordre technique.
– Dans le premier cas, il s’agit d’une révolution, dans le second d’une guerre. Le Parti des Indigènes de la République agit à partir du territoire national français et cherche à saper de l’intérieur les fondements d’un ordre qu’il juge raciste et colonial.

BDS lui, est positionné à l’extérieur d’Israël, principalement en Europe et aux Etats Unis, et s’est donné pour mission de mener une guerre d’asphyxie, de briser tous les liens économiques, culturels, scientifiques, militaires, diplomatiques etc que l’Europe et les Etats Unis ont noués avec Israël.

La récente déclaration du Président d’Orange de cesser dès que possible toute relation avec Israël est une victoire de la campagne BDS.

Toutefois deux éléments résistent à la mise en parallèle

  • – La première est que BDS mobilise les bonnes consciences de gauche des pays occidentaux. Ces syndicalistes, étudiants, retraités, militants associatifs qui assiègent les supermarchés pour saccager les produits alimentaires israéliens et faire pression sur les artistes pour qu’ils ne se produisent pas à Tel Aviv forment la base militante principale de BDS. Mais ce sont ces mêmes personnes que le PIR considère comme ses pires ennemis.
  • – Le PIR n’en veut pas parce qu’ils sont « blancs », alors que BDS en a besoin pour les mêmes raisons.

C’est à ce stade qu’il faut braver son dégoût et plonger dans le discours du PIR pour en saisir les éléments centraux. Lesquels sont tout à fait sidérants : le PIR est un parti authentiquement et doctrinalement raciste.

Dans un discours prononcé à l’occasion du dixième anniversaire du PIR, Houria Bouteldja (1), « initiatrice et porte-parole du Parti des Indigènes de la République », s’est dit fière d’avoir mis « en évidence » l’existence
« d’un champ politique blanc » et de « races sociales ».

Les termes de « champ politique blanc » et « races sociales » sont si gênants pour toute conscience occidentale anti-raciste, que la revendication est tout d’abord incompréhensible. On se dit qu’il y a là une métaphore.

Mais non ! Dans la vision du monde du PIR, le concept de « société blanche » est à prendre au sens propre. L’ennemi est défini par la couleur de sa peau. La société française est « blanche » (ses partis politiques, sa loi, ses syndicats, ses médias…) et elle exerce un racisme colonial, structurel, sur tout citoyen de couleur.

Le PIR se définit donc comme un parti politique réservé aux personnes de couleur. « Nous sommes fiers d’avoir convaincu beaucoup d’Arabes, de Noirs, de Musulmans, d’habitants des quartiers de la réalité du continuum colonial et de la nécessité de l’autonomie » a continué Mme Bouteldja. Par autonomie, il faut entendre « dissidence », refus de participer à un titre ou un autre à la vie de la République.

Soliman Ibn Hani, enseignant « indigène » (2) donne un exemple de dissidence en justifiant le refus de ses élèves du 93 de participer à la minute de silence organisée en janvier 2015, à la mémoire des dessinateurs de Charlie Hebdo.

« Si certains de ces élèves vont jusqu’à se revendiquer plus solidaires des frères Kouachi que de « Charlie », (…) c’est que le contexte national et international dans lequel ils ont grandi place « Charlie » du côté des dominants, du côté des puissants, du côté de l’Occident dévastateur qui frappe le monde arabe et Musulman, qui est aussi leur monde ».

Said Khiari (3) va plus loin encore en écrivant : « Être français et musulman, du point de vue de l’ « identité nationale » républicaine, est un oxymoron. Il n’est pas possible d’être l’un et l’autre à la fois.

Tant, du moins, que la conception même de la nation, telle qu’elle s’est construite dans la République, n’est pas radicalement recomposée, tant que l’« identité nationale » articule privilège « gaulois » et privilège blanc-européen-chrétien. »

Pour le PIR, aucun réformisme, aucune promotion sociale, aucune éducation au respect de l’autre ne peut corriger la « société blanche ». Toute politique d’intégration est une « illusion », un voile idéologique mis en avant pour tromper et « faire croire que les Arabes, les Noirs, les musulmans, les Roms et l’ensemble des populations non-blanches en France finiront bien, à force d’efforts et de bonne volonté, par se tailler une place dans la société » (4) écrit Louisa Yousfi sur le site du PIR.

Un groupuscule

Le PIR est assez honnête pour reconnaître qu’il est et demeure groupusculaire. Houria Bouteldja n’a pas honte d’expliquer qu’en dix ans d’existence, le PIR a échoué à radicaliser les colored people de France. L’échec principal du PIR « est de ne pas avoir réussi à unifier dans une seule et même organisation les principales victimes du racisme d’Etat : Noirs, Arabo-musulmans et Roms ou encore de ne pas avoir réussi à constituer une base sociale suffisamment significative pour peser dans le jeu politique et créer un rapport de force susceptible de défendre efficacement les intérêts de la France des ghettos, la France des banlieues » (5).

Le PIR est non seulement minoritaire, mais il a aussi de puissants concurrents. A commencer par Dieudonné. Pour Houria Bouteldja, « la question palestinienne qui nous est chère ne doit pas devenir le prétexte pour des petits fachos de nous inoculer le poison de la haine sous quelque forme que ce soit ».

Le PIR récuse le droit d’Israël à l’existence mais se démarque fermement des « quenelles » de Dieudonné et Soral. Elle regrette que le voyou camerounais « entraine une partie des nôtres, et nous intègre, par son obscénité, dans l’histoire terrifiante de la modernité occidentale et ce qu’elle a produit de plus ignoble ». La Shoah est selon elle un des crimes de l’Occident « blanc ». Et il n’est pas juste de profaner les victimes juives même s’il est juste de lutter pour le démantèlement d’Israël.

Le PIR a pour ennemi, non pas les juifs en direct, mais la « France blanche » et le sionisme.

Mais les « blancs » et les sionistes ne sont pas les seuls à devoir se faire du souci. Comme les frères Kouachi qui n’hésitent pas à tirer sur les « apostats » – autrement dit les flics et soldats Français musulmans -, les
« indigènes décoloniaux »(sic) du PIR ne s’interrogent pas longtemps sur le sort qu’il convient de réserver à ces « traîtres », ces « Harlem Désir, Rachida Dati, Malek Boutih, Najat Vallaud-Belkacem, Lydia Guirous (…) qui n’hésitent plus à enfiler l’uniforme républicain pour tirer sur les
nôtres ».  « Faudrait-il leur pardonner » s’interroge Louisa Yousfi ? « Sans hésiter, nous répondons : Non ».

Idem pour la magnifique Sophia Aram qui s’est moquée de Todd au micro de France Inter et s’est réjouie que Marianne ait dénoncé les dérives islamistes d’une émission de BeurFM. Elle aussi a du souci à se faire. « Que les nôtres veuillent symboliquement lui « couper le nif » est parfaitement justifié » écrit Louisa Yousfi (7).

On pourrait continuer longtemps à décortiquer ces insanités racistes et haineuses. Mais ce serait inutile. Il suffit simplement de savoir qu’elles existent et qu’il va falloir apprendre à vivre avec. C’est-à-dire contre.

Notes
(1) Qu’adviendra-t-il de toute cette beauté ? », site du PIR, 16 mai 2015 par Houria Bouteldja
(2) Affaire Charlie Hebdo : la résistance des élèves indigènes », Site Internet du PIR, le 13 février 2015 par Soliman Ibn Hany, un prof indigène

(3) L’islamophobie, axe fondamental de la contre-révolution coloniale, Sadri Khiari, membre du PIR, 2 février 2015 par

(4) Décoloniser les indigènes a-t-il un sens ?, le 28 mai 2015 par Louisa Yousfi, militante du PIR.
(5) Voir note 1.
(6) « Qu’adviendra-t-il de toute cette beauté ? », site du PIR, 16 mai 2015 par Houria Bouteldjahttp://indigenes-republique.fr/quadviendra-t-il-de-toute-cette-beaute-2/

(7) Politiser la trahison : le cas Sophia Aram, le 4 juin 2015 par Louisa Yousfi, militante du PIR

à propos de l'auteur
Yves Mamou est journaliste professionnel. Il a travaillé au journal Le Monde pendant 23 ans. Il est également l'auteur de divers ouvrages. Une machine de pouvoir, la direction du Trésor (La Découverte, 1988), C’est la faute aux médias, Essai sur la fabrication de l’information (Payot, 1991); Parents à charge, quand nos proches deviennent dépendants (Grasset, 1998); Camélia.came (Editions Stock) 2008. (roman policier); Une longue cuillère pour le diable (Editions Leo Scheer 2010) (roman policier); Rendez Sam (Editions Leo Scheer 2012) (roman policier); Israël, les maladies des religieux (Essai) (Editions Leo Scheer 2013); Hezbollah dernier acte (Editions Plein Jour, 2014). En préparation Après Charlie, glossaire des fractures françaises (Editions du Toucan).
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