Ils ne gagneront pas
Vague de terreur. Dans un contexte de paix. Bienvenue en Israël, le royaume du paradoxe.
Alors que des ministres arabes et israéliens se réunissent pour parler de futur radieux, des terroristes pétris de haine, armés jusqu’aux dents, font irruption dans les villes du centre du pays pour tuer un maximum. Comme dans un jeu vidéo les images sont surréalistes. Seuls des individus nourris à la haine peuvent tirer de façon indistincte sans épargner quiconque.
Aujourd’hui mercredi 30 mars 2022, le pays est en alerte maximale, après 3 attentats en l’espace d’une semaine, et alors que le Ramadan, période propice aux échauffourées, débute dans quelques jours.
Le ministre de la Défense, Benny Gantz, a rappelé qu’en tant que peuple et que pays, nous avons connu bien d’autres périodes dramatiques, et que nous nous en sommes toujours sortis vainqueurs. Et que cette fois ne fera pas exception.
Un résident de Bnei Brak qui a échappé miraculeusement au terroriste, clamait à la télévision ce matin que nous devons continuer notre vie et refuser la peur. Pour ne pas leur donner cette ultime victoire. Car le but du terroriste est, comme son nom l’indique, de terroriser. Peu importe qui sont ses victimes immédiates, le but est de prendre en otage une population entière, de l’emmener à changer sa routine, de craindre chaque rassemblement de foule, les bus, les trains, les gares, les écoles….
Et de haïr l’Autre. De nous diviser. Juifs contre arabes. Encore. Parce que tout ce mouvement régional issu des Accords Abraham nuit aux intérêts des pourvoyeurs de haine internationale, aux frustrés nihilistes qui ne se reconnaissent que dans la haine, ceux qui sont incapables de construire, de bâtir, qui se délectent du chaos.
Et ils sont nombreux.
Et désormais nous en avons aussi de notre côté qui telles des hyènes attirées par l’odeur du sang sont venus éructer leur haine sur les lieux d’attentats. Des charognards venus faire les poubelles de la haine.
Comme à chaque attaque, chacun ressent en soi un volcan de colère en éruption. Car quelle autre réaction peut-on ressentir à la vue d’un tel gâchis ? De la douleur des familles qui sont brusquement et violement privées de l’un des leurs ? Parce qu’il/elle était au mauvais endroit au mauvais moment ?
Preuve que les terroristes veulent s’assurer que la haine prenne le pouvoir, chaque attentat a été commis par un auteur différent. A Beer Sheva, un bédouin a pris les armes. A Hadera, deux arabes israéliens, et à Bnei Brak, un palestinien du nord de la Samarie.
Il serait difficile de faire mieux pour faire planer le spectre de l’ennemi intérieur. Ce que chacun redoute.
Et la haine est plus rassurante car plus facile. Elle ne requiert aucun raisonnement. Aucun effort. Que du sentiment brut. De l’émotion
Mais quid du jour d’après ?
Parce que comme certains semblent l’oublier, juifs et arabes habitent sur la même terre. Et aucun ne compte partir.
Et puis. Comme nous, la majorité veut vivre une vie tranquille, couler des jours heureux sans se réveiller chaque matin avec une envie pressante d’éliminer son voisin.
Et puis. Pour la première fois, un parti arabe est membre de la coalition gouvernementale et son leader a condamné sans équivoque chaque attentat en appelant la communauté arabe à prendre ses responsabilités et faire un ménage interne. Ce qui était également l’objectif des fameux 53 milliards de shekels octroyés par le gouvernement pour que les villes arabes puissent avoir les moyens d’endiguer la criminalité rampante qui fait des dizaines de victimes indirectes. La quantité d’armes détenues par les terroristes est d’ailleurs ahurissante et une première.
Et pour la première fois, fait inédit, Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne a condamné l’attentat. Après avoir alloué des salaires à vie pour les familles de terroristes, c’est assez surprenant pour le noter. Il n’est pas question de tomber dans l’angélisme mais la région subit des changements majeurs et nous en subissons d’ailleurs les secousses tectoniques provoquées par le refus de certains protagonistes de se laisser entrainer dans le mouvement.
Et puis pour un parent, la difficulté supplémentaire est de trouver un équilibre entre mise en garde face au danger réel de terrorisme et face au danger de haine.
Quelqu’un m’a dit hier « comment faire pour éviter d’engendrer des hooligans ?», quand ces images de haine se succèdent les unes aux autres ? Que l’on sait que toute « curiosité intellectuelle » s’abreuve de Tiktok ou Instagram ? Comment transmettre le sens de la nuance ?
Ici nous vivons loin de tout politically correct. Et de toute lecture binaire. C’est d’ailleurs notre richesse et notre espoir.
Car à Bnei Brak, celui qui a empêché le terroriste de poursuivre sa tâche funeste est un arabe chrétien de Galilée. Membre de la police israélienne.