France-Israël : pourquoi les relations diplomatiques deviennent-elles exécrables ?
Les incidents diplomatiques entre la France et Israël se multiplient. Les déclarations du président Macron appelant à un boycottage et des sanctions aggravent inutilement les relations bilatérales et renforcent les saboteurs de la paix dans le monde arabe et en Europe.
Dans un contexte de guerre au Moyen-Orient et après la chasse aux Israéliens à Amsterdam, l’obsession d’Emmanuel Macron de jouer un rôle d’arbitre dans les conflits au Liban et à Gaza est inadmissible et elle exacerbe la majorité des Israéliens. De ce fait, les initiatives françaises sont négligées et rejetées automatiquement.
La récente visite à Jérusalem du ministre français des Affaires étrangères n’a eu aucun écho favorable dans les médias. Jean-Noël Barrot a été reçu brièvement par son homologue Israël Katz et le ministre Ron Dermer. Benjamin Netanyahu a préféré l’ignorer…
Lors de sa rencontre avec Mahmoud Abbas à Ramallah, Barrot a été reçu avec tous les honneurs… Et pourtant, Abbas, âgé de 88 ans, est hors-jeu et n’a aucune influence sur la direction du peuple palestinien. Barrot a réitéré l’engagement de la France à la solution pour deux États. Il a réaffirmé que les implantations israéliennes sont « un obstacle majeur » et qu’il préparait au niveau européen « des sanctions contre des Israéliens extrémistes en Cisjordanie ».
Pour attirer les projecteurs, Barrot condamne « l’occupation israélienne à Jérusalem-Est » et gonfle l’importance d’un incident qui a eu lieu à l’église d’Éléona concernant l’identité de deux agents français du Consulat. Précisons qu’ils ne portaient pas l’uniforme du gendarme… Selon Barrot, il s’agit d’une « atteinte à l’intégrité d’un domaine placé sous la responsabilité de la France depuis plus de 150 ans ».
Semble-t-il oublier que la France ne contrôle plus le Levant ? Que l’État d’Israël est indépendant et souverain et assure la sécurité dans sa propre capitale. Que les domaines des pays étrangers en Terre sainte ne sont que des domaines privés et donc ils n’ont pas d’emprise diplomatique au même titre qu’une ambassade ou un consulat. Et que de ce fait, les quatre domaines nationaux français en Israël ne sont pas des territoires français[1].
Depuis la fameuse résolution 181 du 29 novembre 1947 sur le partage de la Palestine, la France refuse de reconnaître la souveraineté israélienne sur Jérusalem, et à chaque visite officielle d’un représentant français un incident éclate bizarrement. En octobre 1996, Jacques Chirac, accompagné de « l’ambassadrice de la Palestine » Leila Shahid, avait refusé que des policiers israéliens assurent sa sécurité. En janvier 2022, le président Macron suit le même scénario. Et pourtant, aucune violation du « territoire français » n’a été commise.
Pourquoi ne pas régler le contentieux et les malentendus selon les règles diplomatiques, surtout quand la France prétend qu’Israël est « un ami et un allié » ? Pourquoi provoquer à chaque fois un incident diplomatique inutile avec la convocation au Quai d’Orsay de l’ambassadeur d’Israël ? Cette conduite malsaine n’améliore pas les relations, elles mettent les Israéliens en colère. Alors quel est le but ?
Soulignons, une fois encore que Jérusalem n’a jamais été considérée comme un territoire international, et donc il ne pourrait y avoir un partage de souveraineté, ni de contrôle étranger.
Jérusalem demeurera à jamais la capitale de l’État Juif, et de ce fait, les autorités israéliennes sont les seuls responsables de la sécurité de tous les Lieux saints. Imaginons les sites chrétiens sous contrôle islamiste…Imaginons de nombreux terroristes armés du Hamas ou du Hezbollah brandissant leurs drapeaux dans toutes les mosquées et les églises de Jérusalem et d’ailleurs… Certains n’ont-ils pas déjà profané les mosquées avec un arsenal de pierres et d’explosifs ? La police israélienne n’a-t-elle pas le devoir d’intervenir pour assurer la sécurité de tous les fidèles ?
Depuis la guerre des Six-Jours de 1967, la circonscription du Consulat général de France à Jérusalem comprend la Cisjordanie et la bande de Gaza. La France détache même Bethléem et les villages environnants de la capitale israélienne, et permet aux Palestiniens d’agrandir le périmètre de leur territoire pour faciliter le contact direct avec la population locale. Pour renforcer cette présence française, quatre antennes consulaires sont créées à Naplouse, Ramallah, Gaza et Jérusalem-Est.
Le consul général a en fait un rôle inhabituel de représentation politique. Il jouit d’une autonomie exceptionnelle, et il est de facto « l’ambassadeur de France en Palestine », bien que sa résidence et ses bureaux soient toujours situés à Jérusalem-Ouest, rue Paul Emile Botta, dans le quartier exclusivement juif d’avant la guerre de 1967.
Le consul n’a aucun contact politique ni avec les ministères israéliens ni avec la mairie de Jérusalem, en dépit du fait qu’elle gère les affaires courantes des résidents palestiniens de la vieille ville. Tous les contacts diplomatiques avec l’État d’Israël relèvent du domaine exclusif de l’ambassade de France à Tel-Aviv.
Après l’établissement de l’Autorité palestinienne en 1993, le Consulat général à Jérusalem a négligé l’importante communauté francophone israélienne en choisissant la coopération directe avec la population palestinienne. Des centres culturels et des écoles sont ouverts pour l’étude du français. Des dizaines de bourses sont offertes pour la formation de cadres en gestion administrative, ainsi qu’une aide en matière de sécurité et de défense pour la police palestinienne et les services du renseignement.
Suite aux échecs successifs de la diplomatie française dans notre région, et devant le retour triomphant de Donald Trump, le président Macron devra agir dans le bon sens. S’il souhaite renforcer l’amitié entre les deux peuples, il devrait plutôt adopter une politique nouvelle, créative, efficace, moins conservatrice et plus pragmatique. Pour attirer la sympathie des Israéliens et renouveler la confiance, les diplomates du Quai d’Orsay devraient cesser de se conduire en fiers énarques. Nous vivons au Moyen-Orient, nous refusons le double jeu et les discours moralistes.
Revoir sur le même sujet l’article de Richard Rossin du 15 janvier 2020 :
[1] Le Tombeau des rois, la basilique Sainte-Anne, l’ancienne commanderie croisée d’Abou Gosh, et l’église de l’Éléona.