Effet drapeau

Des autocollants de l'armée de l'air israélienne apposés sur les avions de chasse F-35 nouvellement arrivés, sur une photo publiée le 16 mars 2025. (Crédit Armée de l'air israélienne)
Des autocollants de l'armée de l'air israélienne apposés sur les avions de chasse F-35 nouvellement arrivés, sur une photo publiée le 16 mars 2025. (Crédit Armée de l'air israélienne)

On pourra trouver indécent de parler de politique intérieure à l’heure où les Israéliens passent une partie de leurs nuits dans les abris. Mais cela ne durera pas. Tout indique que cette guerre avec l’Iran sera courte et qu’Israël emportera une victoire éclatante.

Une guerre-éclair qui apportera au Premier ministre, Benjamin Netanyahu, un regain de popularité dont il avait bien besoin. D’autant que la légitimité de cette guerre n’est contestée par personne.

Depuis la révolution iranienne (1979), le régime des mollahs déclare vouloir en finir avec l’ « entité sioniste ». On se souvient qu’il avait même organisé des conférences internationales sur le sujet. C’est la raison essentielle qui déclenche pour le gouvernement un « effet drapeau » : un consensus sur la nécessité d’écarter ce danger existentiel.

Cette guerre éclipse celle de Gaza qui était de plus en plus contestée par les Israéliens soucieux de voir revenir les otages et de mettre fin à une opération dont les objectifs étaient illisibles.

Une sortie de crise honorable serait même envisageable, la réussite de l’opération « Lion dressé » justifiant la fin des combats contre un Hamas privé de son principal soutien : l’Iran.

Les partis extrémistes de la coalition pourraient toujours faire chuter le gouvernement, Benjamin Netanyahu se présenterait devant les électeurs dans une situation idéale.

Depuis un an et demi, le Premier ministre a une obsession : ne pas rester dans l’histoire comme le Premier ministre du 7 octobre. Il pourrait désormais être celui qui aurait débarrassé Israël de son ennemi le plus dangereux et redessiné un Proche-Orient beaucoup plus accueillant pour l’État juif.

Dans les sondages avant la guerre, le Likud était crédité d’une dizaine de sièges de moins que ses concurrents. Parions que la victoire militaire lui permettra de refaire une bonne partie de son retard. D’autant que l’opposition est dans une situation impossible : elle ne peut critiquer un gouvernement menant une guerre qui fait consensus ; solidaire de l’armée, elle ne bénéficiera pas de ses succès.

Si de surcroît, la guerre à Gaza s’arrêtait et que les otages revenaient, elle serait privée de sa principale critique à l’égard de la politique de défense du gouvernement.

Elle pourra toujours reprendre ses critiques sur les atteintes à la démocratie, la non-conscription des ultra-orthodoxes ou encore l’absence d’une commission d’enquête nationale sur les événements du 7 octobre ; ces arguments porteront, mais beaucoup moins qu’avant.

On savait qu’une élection n’est jamais gagnée d’avance. Avec cette guerre contre l’Iran, on a la confirmation que c’est encore plus vrai dans une région instable où les impératifs sécuritaires peuvent éclipser tous les autres.

à propos de l'auteur
Philippe Velilla est né en 1955 à Paris. Docteur en droit, fonctionnaire à la Ville de Paris, puis au ministère français de l’Economie de 1975 à 2015, il a été détaché de 1990 à 1994 auprès de l’Union européenne à Bruxelles. Il a aussi enseigné l’économie d’Israël à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 1997 à 2001, et le droit européen à La Sorbonne de 2005 à 2015. Il est de retour en Israël depuis cette date. Habitant à Yafo, il consacre son temps à l’enseignement et à l’écriture. Il est l’auteur de "Les Juifs et la droite" (Pascal, 2010), "La République et les tribus" (Buchet-Chastel, 2014), "Génération SOS Racisme" (avec Taly Jaoui, Le Bord de l’Eau, 2015), "Israël et ses conflits" (Le Bord de l’Eau, 2017), "La gauche a changé" (L'Harmattan, 2023). Il est régulièrement invité sur I24News, et collabore à plusieurs revues.
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