Députés LFI, photo de famille

Ils ne sont pas le groupe le plus important, mais ils dominent toujours la gauche : 71, presque tous élus sous le label LFI sauf un apparenté, membre de la direction d’un groupuscule trotskiste. En contraste, leurs ternes alliés rêvent parfois de prendre le large ; leurs adversaires préférés du Rassemblement National sont moins flamboyants ; et le « bloc central » reçoit des tirs croisés.
Les élus insoumis semblent d’un dynamisme à toute épreuve, toujours prêts à se faire entendre, à coups de chahuts ou de soi-disant scandales alimentant le « buzz ». On ne connaît pas les noms de tous, mais certains parmi eux sont omniprésents sur les plateaux de télévision comme sur les réseaux sociaux. Et ils se prétendent compétents pour résoudre tous les problèmes nationaux ou internationaux, avec pour boussole le programme réactualisé de Jean-Luc Mélenchon en 2022.
Cela étant posé, les connaissons-nous vraiment ? J’ai reproduit à la fin de cet article la liste complète de ces députés, en associant à chaque nom leur année de naissance. Pour chacun, on peut trouver sur Wikipédia un curriculum vitae souvent inspiré en partie par les intéressés, car c’est un peu leur carte de visite. Linkedin permet aussi de préciser les diplômes, pour ceux qui en ont. On peut donc établir une première synthèse, écrite sur des bases objectives. Enfin, même s’il s’agit d’une mouvance jugée dangereuse par beaucoup, leurs députés ne sont ni tous méprisables, ni tous stupides, et je le montrerai avec quelques exemples.
- Premier constat : l’âge moyen des députés « insoumis » (42 ans) est nettement inférieur à ceux des autres groupes (49 ans et deux mois pour l’ensemble de l’Assemblée). Cela vient d’un fort pourcentage de députés trentenaires, et les plus médiatisés appartiennent surtout à cette catégorie. Cette jeunesse fait écho au fait que Jean-Luc Mélenchon arrive en tête des intentions de vote des moins de 35 ans, surtout parmi les plus diplômés.
- Deuxième constat fait après lecture de leurs fiches individuelles : ces députés, presque tous novices depuis 2022, ont eu divers engagements avant de rejoindre LFI ; et cette force politique, nouvelle à partir des années 2010, a joué le rôle de « pompe aspirante », au détriment des autres formations de gauche. Certains avaient commencé à militer à l’UNEF ou à la CGT, au PCF ou au PS.
L’évènement déclencheur a été pour certains une mobilisation quand ils étaient étudiants ; pour d’autres, cela a été des engagements sur la durée dans des causes « progressistes » diverses – le droit au logement, l’aide à l’enfance, la défense de l’environnement, etc. Quelques exemples parmi des députés peu connus :
- Zahia Hamdane, née en 1965, a travaillé comme animatrice en centre de loisirs, puis comme éducatrice spécialisée avant de devenir directrice d’un établissement de protection de l’enfance ;
- Jean-Hugues Ratenon, né en 1967, est un réunionnais qui n’a quasiment fait que de la politique en s’investissant dans des associations et syndicats locaux ;
- beaucoup plus jeune, née en 1996, Manon Meunier fait partie des trois seuls ingénieurs diplômés de ce groupe ; agronome, elle est passionnée par l’écologie et plus particulièrement le développement durable.
Quatre députés tranchent par leur envergure intellectuelle :
- Coordinateur du mouvement, ayant rejoint Mélenchon depuis 2010, Manuel Bompard a presque toujours été un très proche ; docteur en mathématiques, diplômé de l’Institut polytechnique de Grenoble, il a participé au lancement d’une start-up, mais concrètement, on peut dire qu’il n’a jamais eu un « vrai » travail.
- Très brillante aussi et un peu plus âgée que Bompard, Aurélie Trouvé est la référence de LFI pour les affaires économiques ; elle a multiplié les diplômes (ingénieure agronome, doctorat en sciences économiques) ; elle aussi une formation en sciences sociales ; elle a eu un « vrai » travail, comme maître de conférences à AgroParisTech ; et tout ceci s’est fait en parallèle avec un fort militantisme puisqu’elle fut co-présidente puis porte-parole de l’association altermondialiste Attac.
- Hadrien Clouet, né en 1991, est aussi un hyper diplômé, docteur en sociologie de l’École Normale Supérieure de Paris Saclay, chercheur associé au centre de sociologie des organisations de l’IEP (Sciences Po) et dans un laboratoire du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) ; mais surtout, il a été le co-rédacteur du programme de Jean-Luc Mélenchon en 2022 avec Clémence Guetté.

- Clémence Guetté est la dernière « pointure » de ce quatuor. Même âge que le précédent, elle a fait des études littéraires, avec un Master en sociologie, une licence de lettres et en sciences politiques ; mais elle n’a jamais travaillé « dans la vraie vie », ayant été embauchée toute jeune par le leader insoumis pour établir son programme.
Enfin, je n’associe pas à ces quatre une autre diplômée brillante, Sarah Legrain, car elle ne joue pas un rôle stratégique au sein du mouvement : fille de deux normaliens, elle aussi sortie de l’ENS et agrégée de lettres, elle a été professeur.
Si on examine de manière transversale l’ensemble des profils de tous ces députés, on constate une domination écrasante des littéraires sur les scientifiques :
- presque pas d’ingénieurs, on l’a vu ;
- aucun chercheur en « sciences dures » ;
- pas de directeur de recherche dans un laboratoire, au CNRS ou dans une Grande École.
En contraste, les enseignants sont une quinzaine, du niveau le plus modeste (professeur des écoles) aux collèges et lycées, voire université pour l’un d’eux, et certains pour seulement quelques années. À très peu d’exceptions près, cela a été dans des disciplines littéraires. Citons-les :
- Carlos Martens Bilongo (économie) ;
- Bastien Lachaud (histoire-géographie) ;
- Abdelkader Lahmar (économie gestion) ;
- Maxime Laisney (instituteur) ;
- Jérôme Legavre (français) ;
- Elisa Martin (français) ;
- Nathalie Oziol (anglais) ;
- René Pilato (mathématiques) ;
- François Piquemal (lettres et histoire-géographie) ;
- Aurélien Saintoul (lettres) ;
- Anne Stambach-Terrenoir (piano) ;
- Andrée Taurinya (lettres) ;
- Paul Vannier (histoire-géographie).
L’enseignement est un noble métier, il n’y a pas de honte pour les intéressés, comme pour les deux « têtes pensantes » du programme LFI, à avoir privilégié pour leurs études la sociologie ou les disciplines littéraires. Mais cela les a éloignés de « la vraie vie », celle qui hélas utilise les chiffres, les ordres de grandeur, les courbes, les statistiques. Ce monde réel, celui des entreprises, de la guerre commerciale et de budgets à boucler, il est clair qu’il diffère des discours lyriques de Jean-Luc Mélenchon, par ailleurs orateur se prenant pour un Victor Hugo d’estrade. Et une telle faiblesse ne les rend absolument pas crédibles pour gouverner notre pays.
Cela étant posé, j’ai évoqué les plus intellectuels de la collection : si on « zoom » maintenant sur les députés LFI n’ayant jamais travaillé, on trouvera certains personnages un peu connus et vraiment pas sympathiques.
- Ainsi, Raphaël Arnault, le leader de la « jeune garde », fiché S repéré par la police.
- Aurélien Le Coq, lui, est diplômé de Sciences Po Lille, mais il n’aura fait dans sa vie que du syndicalisme.

- Connu pour ses outrances anti-israéliennes, David Guiraud n’a eu ni diplôme, ni véritable expérience professionnelle.
- Andy Kerbrat n’a pas eu de diplôme non plus et a enchaîné les CDD ; il a acquis un début de célébrité en étant interpellé après avoir acheté de la drogue à un mineur.
- Très présent sur les réseaux sociaux, responsable de la communication numérique des « Insoumis », Antoine Léaument a une licence de lettres et un Master, mais il n’a jamais connu le monde du travail.
- Ayant un diplôme d’éducatrice spécialisée et un Master de sociologie, Marie Mesmeur n’a jamais travaillé non plus ; mais elle trouve le temps de faire des publications vénéneuses sur le réseau X, comme celle où elle justifiait les agressions physiques ayant visé des supporters israéliens après un match de football à Amsterdam[1].
- Louis Boyard, compagnon de cette dernière, est un pitre encore plus lamentable, puisque à l’âge de 25 ans il n’aura ni étudié, ni travaillé (à part organiser des blocages de lycées, ou faire partie des animateurs d’une saison dans l’émission TPMP de Cyril Hanouna).
Cet article serait trop long si on citait tous les députés LFI n’ayant jamais eu d’emploi stable ou n’ayant pas encore travaillé.
Il n’y a pas lieu, bien sûr, de mépriser celles et ceux ayant eu un emploi modeste mais tout à fait honorable : ouvrière agricole, agent départemental, cheminot, secrétaire, technicien, commercial, etc. Mais clairement il n’y a pas parmi les députés insoumis de cadres supérieurs, venant d’une entreprise du privé ou issus d’un établissement public.
Enfin, – et ce n’est pas brillant pour un mouvement aspirant à gouverner – un seul de leurs députés (Aurélien Taché) a une petite expérience des cabinets ministériels.
Cette « photo de famille » serait incomplète si je n’évoquais pas enfin quelques têtes de gondole bien connues :
- Président de la commission des finances mais aussi doyen du groupe, Eric Coquerel a eu une vie professionnelle bien maigre, après avoir échoué au CAPES.
- Danièle Obono, titulaire d’une maîtrise d’histoire, n’aura travaillé que brièvement comme bibliothécaire ; cette franco-gabonaise de 45 ans a eu un long parcours militant, trotskiste puis « insoumis ».
- Sophia Chikirou, compagne (supposée) de Mélenchon et bardée de diplômes, a fondé la société de conseil en communication Mediascop dont elle est devenue l’unique propriétaire ; au terme d’une longue enquête, elle a été mise en examen pour escroquerie aggravée et abus de biens sociaux[2].
- Qualifiée de « poissonnière » pour la vulgarité de ses interventions mais aussi toute puissante présidente de son groupe à l’Assemblée, Mathilde Panot – pourtant titulaire d’un Master obtenu à Sciences Po – n’a comme seule expérience professionnelle que quelques années de manager d’équipe dans une association.
- Sébastien Delogu, député de Marseille, n’a eu strictement aucune formation, étant successivement vendeur de prêt à porter, agent de sécurité et chauffeur de taxi ; son analphabétisme pitoyable a été souvent montré du doigt, et il semble plus en retrait depuis.
- Enfin, laissons le pire pour la fin avec Aymeric Carton. Lui passerait vraiment pour « l’intellectuel du groupe », en raison de sa chevelure soigneusement étudiée, de son passé de journaliste et de plusieurs livres déjà publiés ; médiatisé au départ par une émission de Laurent Ruquier – qui aura aussi légué Eric Zemmour en héritage maudit – on sait qu’il met la même passion à défendre la cause animale qu’à traiter tout Juif inquiet pour la survie d’Israël de « complice du génocide »[3].
Liste des députés « insoumis » élus en 2024
Nadège Abomangoli (1975), Laurent Alexandre (1973), Gabriel Amard (1967), Ségolène Amiot (1986), Farida Amrani (1976), Rodrigo Arenas (1974), Raphaël Arnault (1995), Anaïs Belouassa Cherifi (1995), Ugo Bernalicis (1989), Christophe Bex (1961), Carlos Martens Bilongo (1990), Manuel Bompard (1986), Idir Boumertit (1974), Louis Boyard (2000), Pierre Yves Cadelen (1992), Aymeric Caron (1971), Sylvain Carrière (1991), Gabrielle Cathala (1992), Beranger Cernon (1991), Hadrien Clouet (1991), Sophia Chikirou (1979), Eric Coquerel (1958), Jean-François Coulomme (1966), Sébastien Delogu (1986), Aly Diouara (1987), Alma Dufour (1990), Karen Erodi (1977), Mathilde Feld (1969), Emmanuel Fernandes (1980), Sylvie Ferrer (1967), Perceval Gaillard (1983 Clémence Guetté (1991), David Guiraud (1992), Zahia Hamdane (1965) Mathilde Hignet (1993), Andy Kerbrat (1990), Bastien Lachaud (1980), Abdelkader Lahmar (1971), Maxime Laisney (1981), Arnault Le Gall (1980), Aurélien Le Coq (1996), Eloïse Leboucher (1983), Antoine Léaument (1989), Jérôme Legavre (1972), Sarah Legrain (1985), Murielle Lepvrau (1974), Claire Lejeune (1994), Elisa Martin (1972), Damien Maudet (1996), Marianne Maximi (1985), Marie Mesmeur (1994), Manon Meunier (1996), Jean-Philippe Nilor (1965), Sandrine Nosbé (1972), Danièle Obono (1980), Nathalie Oziol (1990), Mathilde Panot (1989), René Pilatot (1962), François Piquemal (1984), Thomas Portes (1985), Loïc Prud’homme (1969), Jean-Hugues Ratenon (1967), Arnaud Saint Martin (1979), Aurélien Saintoul (1988), Anne Stambach-Terrenoir (1980), Ersilia Soudais, Aurélien Taché (1984), Andrée Taurinya (1963), Mathias Tavel (1987), Aurélie Trouvé (1979), Paul Vannier (1985).
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[1] « Ces gens-là n’ont pas été lynchés parce qu’ils étaient juifs, mais bien parce qu’ils étaient racistes et qu’ils soutenaient un génocide. »
[2] Septembre 2024 : https://fr.timesofisrael.com/mise-en-examen-de-sophia-chikirou-nous-navons-pas-peur-nous-ne-sommes-pas-intimides-assure-melenchon/.
[3] Pour rappel, Caron porta plainte contre le Grand Rabbin Haïm Korsia pour « apologie de crimes de guerre à Gaza », plainte qui fut classée sans suite par le parquet.