Crise

C’était écrit, mais le gouvernement israélien faisait semblant de ne pas le voir. En programmant un voyage au Moyen-Orient, en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis et au Qatar, sans passer par Israël, le président Trump montrait déjà qu’il n’entendait pas faire comme lors de son premier mandat, où il avait fait escale à Jérusalem.
D’autres signes montraient que la politique américaine dans la région avait changé, comme l’existence de négociations séparées entre les États-Unis et le Hamas, un accord de cessez-le-feu avec les Houthis, des négociations directes avec l’Iran. Ces dernières seraient sur le point d’aboutir avec une autorisation d’enrichissement de l’uranium à un niveau compatible avec le nucléaire civil. Un tel dispositif serait au cœur d’un accord avec l’Arabie saoudite, qui comporterait aussi un traité de défense impliquant l’achat d’armes américaines pour 100 milliards de dollars, et un engagement saoudien d’investir 600 milliards de dollars aux États-Unis. De quoi faire évoluer une politique étrangère !
Le point commun à toutes ces initiatives : Israël est totalement hors-jeu, et le cabinet du Premier ministre a beau affirmer que c’est la pression militaire qui a permis la libération d’Idan Alexander, personne ne le croit. Et ce n’est pas fini.
Au cours de son séjour à Ryad, le président américain devrait rencontrer le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas (Abou Mazen) et le nouveau dirigeant syrien, Ahmed al-Charaa. On dit même que, pressé par l’Arabie saoudite, le président Trump pourrait faire une déclaration en faveur d’un État palestinien démilitarisé. À l’heure où ces lignes sont écrites, on n’en est pas encore là.
Mais pour le gouvernement israélien, cette évolution est synonyme d’échec : la reprise des combats depuis deux mois, les tergiversations sur l’aide humanitaire, ont abouti surtout à faire de nouvelles victimes civiles et n’ont permis le retour d’aucun otage. Pire encore, elle a suscité dans le monde un regain de sympathie pour les Gazaouis.
En d’autres termes, Israël est complètement isolé, sa politique condamnée, et ses relations avec la première puissance mondiale dégradées. Beau bilan !
Désormais, la politique moyen-orientale s’écrit sans l’État juif, et l’absence de normalisation avec un pays arabe n’empêche pas les États-Unis de négocier avec lui de fructueux accords.
Il reste à savoir quelle portée aura la déclaration de Donald Trump selon laquelle la libération d’Idan Alexander pourrait en annoncer d’autres et « la fin de la guerre ». Il a le moyen de l’imposer en interrompant la livraison d’armes à Israël. Mais ira-t-il jusque-là ? On murmure à Washington que Donald Trump et ses fidèles commencent à être las de Benjamin Netanyahu.
Une dimension de la crise entre les deux pays qui n’a peut-être pas encore produit tous ses effets.