Clientélisme

Le budget 2023-2024 vient en délibération cette semaine à la Knesset. S’il n’était pas adopté avant le 29 mai, le gouvernement tomberait et des élections seraient organisées dans les trois mois.
D’une façon très classique, le Parlement débattra et votera chaque article des lois de finances du budget de l’État pour l’année 2023 (484 milliards de shekels, soit environ 120 milliards d’euros) et 2024 (514 milliards de shekels, soit environ 130 milliards d’euros). La loi dite sur les arrangements, c’est-à-dire les réformes, accompagnant le budget sera aussi soumise au vote du Parlement.
D’une façon tout aussi classique, dans la dernière ligne droite, des partenaires de la coalition font du chantage pour obtenir plus. Une fraction du judaïsme orthodoxe ashkénaze (Agoudat Israel) « exige » 600 millions de shekels (environ 150 millions d’euros) de plus pour son réseau scolaire. Le parti d’Itamar Ben Gvir, Puissance juive (Otsma ha Yéoudit), quant à lui, demande 2 milliards de shekels pour le ministère de la Galilée et du Néguev tenu par l’un des siens.
Ce qui n’est pas classique, ce sont les sommes en jeu et leur destination résultant des « accords de coalition ». Sur les 13,7 milliards de shekels approuvés en fonds discrétionnaires, environ 3,7 milliards de shekels doivent être dépensés pour augmenter le budget des allocations dans les yeshivot (écoles talmudiques) ultraorthodoxes.
Une autre enveloppe de 1,2 milliard de shekels est prévue pour les établissements d’enseignement privés non contrôlés qui n’enseignent pas les matières fondamentales telles que les mathématiques et l’anglais.
Des fonds supplémentaires seront consacrés à la construction d’édifices religieux et aux activités de soutien à l’« identité juive » dans sa version orthodoxe.
Environ 1,2 milliard de shekels est destiné à financer un programme de bons d’alimentation demandé par Arié Deri, leader du Shass, sans que les critères d’attribution soient bien définis. On l’aura compris : afin d’obtenir le soutien des partis religieux, Binyamin Netanyahou n’a pas lésiné sur les moyens.
Un projet de création d’un « fonds de taxes foncières » (keren arnona) est aussi très contesté : les villes riches en emplois devront reverser à ce fonds une fraction des taxes payées par les entreprises qui seront redistribuées à des villes plus pauvres.
Ceci sans aucune concertation avec les municipalités intéressées qui ont fait grève pendant plusieurs jours. On dit que le budget traduit une politique.
Celui pour 2023 et 2024 illustre de façon caricaturale les orientations de la coalition issue des élections du 1er novembre 2022 : un renforcement considérable de l’orthodoxie religieuse, des réformes imposées autoritairement, une gestion clientéliste des finances publiques.