Chirac, du Vel’ d’Hiv’ à la Vieille ville de Jérusalem

La reconnaissance, en juillet 1995, par Jacques Chirac de la responsabilité de l’État français dans la déportation des Juifs de France fut un acte salutaire qui mit fin à un demi-siècle de déni officiel des réalités historiques sous la IVe République, et par les quatre premiers présidents de la Ve.
Pour si authentiquement méritoire qu’elle fut, cette reconnaissante n’en fut pas moins instrumentalisée politiquement et diplomatiquement par l’administration Chirac par la suite.
Par ce geste significatif, le président nouvellement élu escomptait s’assurer la reconnaissance des institutions de la communauté juive de France, et surtout, leur neutralité bienveillante à l’heure où il entendait relancer la politique arabe la France enclenchée par le général de Gaulle en 1967.
Chirac estimait (bien à tort) que cette Politique arabe avait été négligée sous les deux septennats de François Mitterrand, et il entendait lui donner une nouvelle impulsion, de la manière la plus dramatique qui fut.
Durant plus d’une année, la diplomatie française multiplia les contacts avec les capitales arabes pour leur signifier l’intention du président Chirac d’aligner encore davantage la France sur les positions arabes sur le conflit du Moyen-Orient. Le ministre des Affaires étrangères, Hervé de Charrette, et le directeur du Moyen-Orient au Quai d’Orsay, Jean-Claude Cousseran, furent les maîtres d’œuvre zélés de cette politique.
C’est en octobre 1996, à l’occasion de la visite de Chirac dans cinq pays de la région et en Israël, que se présenta l’opportunité de sceller par un geste dramatique, propre à émouvoir la rue arabe, la politique moyen-orientale new look du président Chirac.
Les esclandres répétées lors de la visite de Chirac à Jérusalem (en Vieille ville et à l’église Sainte Anne) avaient été soigneusement orchestrées, et elles atteignirent pleinement leur objectif. Il faut dire, hélas, que le manque de souplesse affiché en l’occurrence par les forces de sécurité israéliennes fit le jeu des Français (mais les forces de sécurité ont-elles la moindre latitude ?).
Madame Catherine Colonna, l’ancienne ministre des Affaires étrangères, alors porte-parole du président Chirac, pourrait nous en dire beaucoup sur cette affaire, elle qui, au matin du 22 octobre 1996, invitait les journalistes à ne pas manquer la visite présidentielle en vieille ville, là où « des événements importants allaient se dérouler ».
Je suggère aux journalistes de la presse communautaire de ne pas hésiter à interroger Madame Colonna à ce sujet mais c’est à Pierre Haski, à l’époque correspondant de Libération à Jérusalem (que nul ne saurait taxer de pro-sionisme !) que je laisse le soin de décrire la jubilation de Jacques Chirac suite à ces incidents : Le « coup de sang » de Jérusalem, vu par Pierre Haski.