Certamen Philosophicum d’Isaac Orobio de Castro
Cette année marque un tournant dans l’histoire de la réception posthume de l’œuvre d’Isaac Orobio de Castro avec la parution de la première traduction française intégrale de son Certamen Philosophicum. Ce texte de la philosophie juive du XVIIe siècle, longtemps resté inaccessible au public francophone, est désormais disponible grâce à la traduction de Jean-Pierre Rothschild, directeur de recherche émérite au CNRS
Cette traduction s’appuie sur le texte latin de l’édition de 1703, restituant avec rigueur l’ordre chronologique des arguments échangés entre Orobio et Bredenburg, un spinoziste néerlandais qui tentait de réconcilier la pensée de Spinoza avec la religion révélée.
Orobio y déploie une érudition remarquable, maîtrisant la philosophie classique, la logique et la théologie pour réfuter méthodiquement les arguments de son adversaire.
Il souligne les contradictions qui naissent de la tentative de marier la philosophie de Spinoza avec les bases de la foi révélée, et accuse ceux qui tentent cette union de poursuivre un objectif caché : mener les gens à l’athéisme. Pourtant, malgré son argumentation éclairée et sa victoire intellectuelle, ce combat, mené avec les armes de la raison et de la tradition, sombra dans l’oubli, emporté par le naturalisme et le matérialisme modernes, jusqu’à sa réapparition aujourd’hui comme témoignage d’une résistance intellectuelle indépendante.
Isaac Orobio acquit l’admiration respectueuse de ses éminents opposants au judaïsme, par son intégrité et sa dialectique aiguisée. Après lui, personne à Amsterdam, la communauté la plus cultivée, ne put prendre sa place, et encore moins ailleurs, où manquaient les conditions pour un personnage indépendant chargé de culture.
— Heinrich Graetz, History of the Jews, (EP 3, PD 4, B.5, Ch.X).
Orobio tenta de défendre les principes de la foi et de la théologie contre la vision de Spinoza exposée dans l’Éthique, une vision d’un monde déterministe, dépouillée de transcendance, dans laquelle Dieu et la nature ne faisaient qu’un (le fameux Deus sive Natura). Cette philosophie était radicale et révolutionnaire autant qu’infondée, car elle renversait les paradigmes millénaires de la théologie et philosophie classiques.
Si Spinoza avait été le pionnier d’une nouvelle génération de pensée philosophique, comme l’a affirmé Wolfson, Orobio aurait servi de bouclier des ancêtres contre les élèves rebelles. Le premier vit encore dans l’ancien monde traditionnel, tandis que le second a ouvert une porte sur le monde moderne. — Seymour Feldman, Iyyun: The Jerusalem Philosophical Quarterly, N° 37 (1988), I, p.224.
La publication de cette première traduction française intégrale du Certamen Philosophicum est un événement majeur pour l’histoire de la philosophie juive. Elle permet de rendre abordable à un public plus large un texte clé du débat entre foi et raison au XVIIe siècle. Cette nouvelle édition, publiée par Le Cercle Hilliger, s’inscrit dans un contexte plus large de redécouverte des œuvres classiques de la collection Veritas e terra orietur.
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