Cameroun, futur « Tel Aviv de l’Afrique »

© Stocklib / mieszko9
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Cameroun, futur « Tel Aviv de l’Afrique » : une alternative au modèle de Singapour africain au Rwanda ?

Entre innovation « en miniature » et opportunités grandeur nature, Yaoundé, capitale du Cameroun, est le siège de l’Organisation africaine de la Propriété intellectuelle (OAPI). La seconde plus ancienne organisation panafricaine fondée en 1962, juste après Air Afrique, fête ses 60 ans en cette année 2022. Une date anniversaire qui invite à explorer le champ des possibles.

Tant avec l’imagination que pourrait prendre demain une capitale afro-futuriste de la « New Nature Economy » en explorant des enjeux d’innovation, d’agriculture régénérative et de forêts connectés et comestibles grâce aux nouvelles technologies. Et peut-être l’ambition d’une alternative au modèle de Singapour africain au Rwanda ?

Tel Aviv signifie en hébreu « colline du printemps ». Une colline de la renaissance des forêts ? de l’agriculture régénérative ? Dans sa Cité antique, Fustel de Coulanges voit dans la religion et le culte des morts les fondements des sociétés. C’est ce culte qui selon lui régit les règles en matière de propriété, d’héritage, de transmission… L’origine de ce que nous sommes. Dans ce parallélisme, Tel Aviv peut être vue comme la métaphore d’une incarnation moderne qui entretient aussi des racines anciennes, comme sa ville sœur, Yaoundé, la capitale des sept collines, où ont convergé au fil du temps nombreuses diasporas méditerranéennes de la Grèce au Liban.

A l’origine, le nom Tel Aviv vient du livre d’Ezéchiel où il désigne une localité babylonienne en Mésopotamie. Le mot ‘’Tel’’ signifie en hébreu une colline artificielle formée par un tas de ruines, tandis que le mot aviv signifie ‘’Printemps’’. Ce nom a ensuite été choisi par Nahum Sokolow pour être le titre hébreu de l’Altneuland par Theodor Herzl.

Dans cette histoire, Friedrich Löwenberg, un jeune intellectuel juif viennois fatigué de sa vie en Europe, entame un voyage en Asie avec l’intention de se retirer sur une île de l’océan Pacifique. Il part avec un aristocrate prussien, Kingscourt. En chemin, ils s’arrêtent à Jaffa et y découvrent la Palestine à l’état d’abandon. Ils se sont ensuite retirés sur leur île pendant vingt ans. A leur retour, lorsqu’ils repassent par la Palestine, ils découvrent la région transformée, muée en une société cosmopolite florissante.

N’arrêtez jamais de rêver, de créer, d’améliorer et d’innover, tel était le message du pavillon Israël à l’exposition universelle de Dubaï. Depuis les accords d’Abraham, le pavillon se voulait une vitrine pour réfléchir à demain, comme une première étape vers l’avenir. Une invitation prospective à projeter demain comme un objectif commun, permettant à des personnes et des cultures différentes de se rencontrer et de connecter les esprits. Pour accompagner cette évolution, le pavillon israélien invitait à découvrir comment la créativité, l’innovation et la collaboration conduisent à un meilleur avenir pour tous.

Dans ce concert, l’Afrique en miniature représente un berceau des terres d’origine et d’opportunité. Le pavillon Ethiopie à Dubaï proposait au visiteur d’approcher le berceau de l’humanité en commençant un voyage à l’aube du temps depuis Lucy, vieille de 3,2 millions d’années, jusqu’au rôle pionnier de grenier pharmaceutique du futur. D’autres pavillons africains à Dubaï invitaient à découvrir la culture et les valeurs qui ont façonné le continent d’aujourd’hui : un centre vivant qui stimule et facilite les connexions. Yaoundé, siège de l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle et capitale de l’Afrique qui innove, pourrait endosser les habits d’une futur ‘Tel Aviv de l’Afrique’. Et offrir une alternative au modèle de Singapour africain au Rwanda.

De réelles opportunités s’offrent aux entrepreneurs afro-futuristes dans les domaines de l’agroforesterie, de l’industrie pharmaceutique, des sciences de la vie, de la nutrition et des technologies de la santé. Il suffit d’observer la place que jouent les échanges transfrontaliers entre le Cameroun, le Nigéria et ses voisins, en matière de valorisation de produits forestiers non-ligneux. Les aspects cosmétiques, alimentaires et médicinales de ces produits sont aujourd’hui valorisés par de nombreux acteurs Nigérians, à travers le champ de la « New Nature Economy ».

Cameroon BioValley pourrait représenter un incroyable pôle de sourcing végétal, basé sur les co-produits de la flore et des forêts du bassin du Congo. Les arbres ont développé au cours de leur évolution millénaire une capacité de résistance et d’immunité qui peut être très utile dans la fabrication de produits efficaces et bénéfiques pour l’homme.

Un tel mouvement pourrait encourager des start-up afro-futuristes prêtes à développer des solutions pour répondre aux défis sociétaux, par exemple : le photovoltaïque sur les terres cultivées pour optimiser la production alimentaire, les logiciels de conduite économe en énergie et autonome, la stimulation optique et magnétique pour la cicatrisation des plaies chroniques, la détection précoce de l’infestation de ravageurs des céréales stockées à l’aide de capteurs optiques sensibles.

Ces opportunités de partenariat avec le monde entier impliquent de penser dès le départ : éco-conception, puis éco-construction et plus largement économie circulaire. Si l’on y associe aussi le thème : « Design & Additive Manufacturing », il s’agit de nouvelles façons de concevoir et de produire localement. Tel Aviv of Africa est une source d’inspiration pour agir localement et penser global. Demain prend racine aujourd’hui.

à propos de l'auteur
Originaire de la cité corsaire de Saint-Malo sur la côte d’Émeraude, Kevin Lognoné est un analyste en capacités partenariales, managériales et d'innovation. Français du sixième département breton (diaspora), il a réalisé plusieurs tours du monde et publie régulièrement des carnets de voyages qui participent au renouvellement du champ des « borders studies ».
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