Blacklist

La liste noire, celle des personnalités indésirables aux yeux du gouvernement, s’allonge. Après le chef d’État-major Herzi Halévi qui a démissionné, c’est Ronen Bar, chef du Shin Bet (FBI israélien), qui figure désormais en tête des personnalités à éliminer. Il a reconnu sa part de responsabilité dans les défaillances du 7 octobre, et serait prêt à démissionner après la fin de la guerre.
Mais cela ne suffit pas aux yeux du Premier ministre qui voit en Ronen Bar un ennemi. Ses torts ? Avoir été nommé par le Premier ministre du « gouvernement du changement », Naftali Bennett, un de ses camarades du commando d’élite Sayeret Matkal.
Il a aussi agi à plusieurs reprises contre ce qu’il n’hésite pas à appeler le « terrorisme juif » en Cisjordanie, ces exactions de colons violents.
Et surtout, depuis quelques semaines, ses services enquêtent sur les curieuses relations entre plusieurs membres du cabinet du Premier ministre et le Qatar, relations qui s’exprimeraient aussi en monnaie sonnante et trébuchante…
C’est la Conseillère juridique du gouvernement, Gali Barav-Myara, qui a ordonné ces enquêtes. Une raison de plus pour susciter l’ire de la coalition à son égard. Il est vrai qu’elle fait consciencieusement son métier en donnant des avis sur la légalité ou non des décisions du gouvernement. Un ministre, Dudi Amsalem, l’avait déjà qualifiée de « personne la plus dangereuse du pays… ». Pas moins. Cette cible dans le dos ne l’a pas empêchée de poursuivre son travail, ce que ne lui pardonne pas le ministre de la Justice Yariv Levin qui vient d’engager la procédure pour la destituer.
Le contre-amiral Daniel Hagari, porte-parole de l’armée, se voit aussi indiquer la porte de sortie. On avait déjà rapporté ici combien son courage à dire la vérité lui avait valu l’hostilité du gouvernement. Il ne sera pas promu au grade de général en reconnaissance de ses bons et loyaux services, car le ministre de la Défense, Israël Katz, a décidé d’en finir avec lui.
Cette série de limogeages ne doit rien au hasard. Benjamin Netanyahu apparaît de plus en plus fébrile devant les caméras. Nul doute que les enquêtes sur les curieuses pratiques au sein de son cabinet y sont pour quelque chose. Nul doute également qu’il est outré d’apprendre que l’administration américaine négocie directement avec le Hamas un accord sur la libération des otages et la prolongation du cessez-le-feu.
Autant d’éléments qui, ajoutés à ses ennuis familiaux et judiciaires, contribuent à lui faire perdre son légendaire self-control. Et à allonger une blacklist, dérivatif facile, qui permet d’éviter les questions qui fâchent.