Bibhilou Ytsanou Mimitsraym : le sens de cette tradition

© Stocklib / liudmilachernetska
© Stocklib / liudmilachernetska

Le sens de cette merveilleuse coutume sépharade marocaine de soulever le plateau du Seder le soir de Pessah et le tournoyer au dessus des têtes des convives.

Il existe, notamment chez les juifs marocains et tunisiens, la coutume de soulever le plateau du Seder et de le passer au-dessus de la tête des convives.

C’est d’ailleurs un des temps fort de la Hagadah en même temps qu’un moment important de réjouissance, ou tous ensemble, les personnes présentes entonnent et chantent à l’unisson, ce merveilleux passage Bibhilou Ytsanou Mimitsraym

Certains le répétent à trois reprises sur des airs variés mais toujours empreint d’allégresse et de bonne humeur.

Ces paroles, nous dit le Rav Shimon Baroukh de Jérusalem, sont en réalité les premiers mots par lesquels le Rambam entame sa Hagadah… Ils signifient : nous sommes sortis d’Egypte précipitamment….

Les juifs d’origine de Tunisie et d’Algérie récitent un autre passage : « Etmol hayinou avadimHayom bene horim… ». Hier nous étions esclaves, aujourd’hui nous sommes libres

L’une des raisons de cet usage serait que le plateau rappelle le Amoude heanan : les nuées de Gloire qui planaient au-dessus des enfants d’Israël dès la sortie d’Egypte et qui leur donnait de l’ombre dans le désert, les protégeant d’un soleil dardant.

Le Rav Schmuel Mellul de Montréal, lui rapporte que ce rituel fait allusion à l’événement du Har Sinai au cours duquel Hachem a soulevé la montagne et l’a suspendue au dessus des têtes des Bné Israel.

Le plateau représente également les dix commandements qui nous ont été transmis au Mont Sinai : le plateau contient : trois matsot, un zeroa, un œuf, un harosset, un karpass, deux maror et le plateau lui-même soit dix éléments.

La sortie d’Egypte avait précisément pour but de recevoir la Thorah.

Le célébre Rav Haim Falaji (1788-1868) de Izmir en Turquie rapporte quant à lui que le plateau du séder fait allusion aux dix sphères célestes.

On le fait donc tournoyer au dessus de la tête des convives afin qu’ils s’imprègnent de la Kedoucha et de la bénédiction des mondes supérieurs. Ainsi par le mérite de ce rituel Hachem nous préservera et nous écartera de tout mal et nous accordera toutes sortes de bénédictions durant cette soirée privilégiée durant laquelle tous les participants s’efforcent de réclamer des bénédictions car c’est le moment propice pour le faire.

C’est la fameuse nuit de la protection. Cette coutume a également été rapportée par le Hidah, Rav Haim Joseph David Azoulay (1724-1806) Jerusalem-Italie.

Lors de son passage en Tunisie, le Hida alors qu’il célébrait Pessah et se trouvait à la table du Caid de Tunis, Rabbi Yechoua Tanouji a relaté cette coutume.

En réalité l’origine de cette coutume se retrouve dans les écrits de l’un des Gueonim datant de plus de 1000 ans, tel que rapporté par le Ale Hadass.

Enfin autre explication du Hazon Ovadia les versets 6-7 du psaum 26 :

« je me lave les mains en état de pureté »

Le mot Mizbaheha est l’acrostiche de tous les éléments qui composent le plat du seder : le (m) pour matsa et maror; le Zain pour zeroa; le beth pour betsa, le Het pour haroset et le Khaf pour le karpass.

Enfin autre coutume nord-africaine : on a l’habitude de dire quelques mots en judéo-arabe au moment de Yahats, coutume kabalistique de casser la matsa de façon à former le Vav et le Dalet :

Les marocains chantonnent :

Hagda kasm allah lebhar ala tnass eltrek
Hine kherjo shdoudna Israel mine Matsar… ala yad sidna ounbina Mossa ben Amram…
Ala slam ourda..
Hine fakhoum ougourthoum mine le khedma el siyba elmoria
Hagdak ifeknah mine had el galout
Lemaane chemo hagadol vehanora…

Par Moche fils d’Amram qu’il repose en paix, de la même façon qu’il les a délivrés de la servitude, de même Hachem nous libérera de cet exil en faveur de son grand nom redoutable…

Les juifs d’origine tunisienne récitent un verset similaire relatant la traversée de la mer rouge. Cette coutume est rapporté dans les livres des sages de Kairouan comme le rapporte le Rav David Setbon dans Ale Hadass.

Hag Kacher Vesameh

à propos de l'auteur
- Licence en science politique,option relations internationales de l'Université de Montréal. - Journaliste à Radio Canada ( 15 ans) - Bureau de consultant avec avocat pour l'immigration au Canada Implication et intérêt soutenu dans tout ce qui relève du monde juif et des relations entre chrétiens et juifs et entre arabes et juifs.
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