Auschwitz : « Plusieurs fois je fus arraché des mains de la mort »

Ici retranscris, le témoignage de Wiktor Stachowiak né le dimanche 5 septembre 1897 à Lutom dans le district de Poznan, il mourut à 93 ans le 21 mai 1990.

En janvier 1941, je fus convoqué au bureau de la Gestapo à Poznan, afin qu’ils puissent connaître par mon moyen tout ce qui concernait le Mouvement Missionnaire Intérieur Laïque, l’œuvre que je faisais en Pologne, comme son représentant.

Après une conversation de quatre heures avec les officiers de la Gestapo sur ce sujet, ils m’ordonnèrent de dissoudre ce mouvement. Ils m’interdirent toute activité telle que celle que j’avais sous le régime polonais. On me dit de rompre toutes relations avec les ecclésias (assemblées) et de cesser toute correspondance avec elles.

Ensuite, une proposition me fut présentée de devenir un dénonciateur (un espion) à leur profit que j’espionne mes frères dans la foi, et procure des informations sur eux.

Trois fois je rejetais cette proposition vigoureusement. Parce que je la rejetais, on me dit qu’on me traiterait en conséquence. Je fus convoqué plusieurs fois au bureau de la Gestapo. Le 31 décembre 1941, les frères étaient réunis pour dire adieu à la vieille année et fêter la nouvelle. A cette réunion, nous renouvelâmes notre résolution de tenir fidèlement pour le Seigneur et d’endurer toutes les épreuves qu’il permettrait de nous arriver.

Dans mon entretien avec les frères, je dis : Mes bien-aimés ! Le Seigneur me donne à comprendre qu’avant longtemps je vous quitterai soyez zélés tenez fidèlement pour notre Dieu, notre Seigneur, la Vérité et les frères, quand les épreuves vous arriveront. Ce fut un douloureux et triste moment quand je prononçai ces paroles. Les frères pleuraient.

Le 16 mars 1942 fut un jour mémorable dans ma vie ! A treize heures, j’étais au travail ; plusieurs membres de la Gestapo vinrent et m’enlevèrent de mon travail, me conduisant je ne savais où.

En chemin, je priais le Seigneur de permettre que j’endure l’épreuve fidèlement. Je sentais que j’étais arrêté. Je sentais que je ne serais plus libre jusqu’à la fin de la guerre. J’étais déjà traité comme un esclave. Je sentais que de terribles épreuves étaient devant moi ! Je n’avais jamais su ce que c’est que d’être prisonnier.

Mon cœur est sensible à toute parole vulgaire et moqueuse comme celles qui me blessèrent grandement. Par exemple, ils me dirent « Priez maintenant votre Dieu juif qu’Il vous délivre de nos mains » « Voyez ce à quoi la Bible et vos frères vous ont amené ». Je me taisais. Je leur déclarais seulement que j’accomplissais mon devoir envers mon prochain en servant les frères.

Ils me menèrent au bureau de la Gestapo et me conduisirent dans une pièce où je vis, suspendues aux murs, mes cartes, que la Gestapo avait prises chez moi, durant une perquisition faite plusieurs heures avant mon arrestation le Divin Plan des Ages, le Tabernacle, et la gravure du songe de Nébucadnetsar Dan. 2 : 31 à 45. Derrière une table étaient assis plusieurs membres de la Gestapo et un mécanicien (?). L’un d’eux, montrant la carte, demanda : « Connaissez-vous ceci ! ». Je répondis Oui ! Parlez-nous en, dit-il.

On me tendit les Saintes Ecritures et, à leur demande, j’interprétai la gravure du songe de Nébucadnetsar, prouvant mes explications par des versets des Ecritures.

Je leur demandai si c’était l’enseignement des Saintes Ecritures ou de l’imagination humaine ? On me répondit que « c’est l’enseignement des Saintes Ecritures ». On me demanda quand viendra le Royaume ? Je répondis que je ne connaissais pas la date de sa venue ; mais je crois qu’il viendra. Ils me demandèrent ensuite s’il y aurait encore des guerres ?

Je répondis qu’il y aurait encore de grands troubles sur la terre en liaison avec des guerres. Par cela ils comprirent que je voulais dire qu’ils ne gagneraient pas la guerre, car les hitlériens croyaient et prêchaient que lorsqu’ils gagneraient la guerre il y aurait la paix pendant mille ans et qu’il n’y aurait plus du tout de guerre. Ensuite, j’expliquai la Carte des Ages et du Tabernacle pendant une heure environ. J’étais heureux de pouvoir comparaître devant les « conciles » et les « autorités » et rendre témoignage à la Vérité.

On me demanda aussi si je faisais l’œuvre de représentant seul ou avec un aide ? Je répondis que je la faisais seul. En conséquence, ils me répondirent « Nous ne vous laisserons pas en liberté, mais nous vous emprisonnerons ». Je reçus cela calmement.

Je fus emmené en prison. C’était la première fois que j’étais amené en contact avec des prisonniers et les conditions de la prison. Ce ne fut pas un agréable, mais un triste moment ! Je continuais à prier, mon esprit étant grandement tendu parce que je ne savais rien de ce qui était arrivé à ma famille et aux frères. Je devais dormir sur le plancher et cela sans couverture ! Il faisait très froid dans la cellule, car c’était en mars. Outre ceci, des punaises me tourmentaient, et il y avait d’autres désagréments.

Quelques prisonniers avaient les fers aux mains et aux pieds. Combien la vue de ces choses semble terrible ! Mais notre Seigneur permit que de plus dures épreuves m’arrivent. Après quelques jours, je tombai malade. Il ne me fut donné aucun secours aussi mes souffrances augmentèrent. Je pensais que là serait la fin de ma course mais je persévérais toujours dans la prière, demandant à Dieu la victoire et que, non ma volonté, mais la Sienne soit faite.

Dans ces épreuves je reçus du secours de notre Seigneur. Les portes de notre cellule s’ouvrirent et on appela mon nom. Je sortis dans le corridor. Devant moi se tenait un civil, et il me demanda la raison de mon arrestation. Puis, le membre de la Gestapo qui était avec lui regarda dans une autre direction, et à ce moment il me parla en polonais : « J’ai des salutations pour vous de votre femme et de votre fille » et il me tendit une lettre et ajouta que je ne dise rien à personne à ce sujet.

C’était un citoyen polonais servant la police criminelle allemande par qui ma fille m’envoyait une lettre réconfortante. Retournant à la cellule, dans un coin, j’ouvris et lus cette lettre. Elle me donnait des détails sur ma maison et les frères, déclarant que les frères tenaient fidèlement pour le Seigneur, inébranlables, et que tous allaient bien. Il me vint alors à l’esprit la scène où notre Seigneur, dans le jardin de Gethsémané, avait été réconforté par un ange.

Plusieurs jours après, le Seigneur me donna, à moi, prisonnier, le privilège de parler des Saintes Ecritures. O quel grand privilège ce fut pour un prisonnier de donner de la consolation et de l’espérance à l’humanité opprimée. Je fis des discours sur les sujets suivants : 1 — La Création du Monde ; 2 — La Fin du Monde ; 3 — Qui était Jésus ; et 4 — Qu’est-ce qu’un chrétien ?

Alors que je donnais ma dernière étude aux prisonniers, un membre de la Gestapo qui était de garde dans le corridor de la prison, la surprit. Immédiatement, il ouvrit la porte de ma cellule et, entrant, demanda qui parlait, parce qu’il était 20 heures quand toutes les lumières étaient déjà éteintes et que durant ce temps il était interdit de parler, je répondis que c’était moi qui parlais.

A ma réponse, il essaya de me frapper, mais le Seigneur ne le permit pas. Je Le remerciai beaucoup pour le privilège de prêcher l’évangile en prison. Peu de temps après, je fus transféré dans une autre prison de Poznan, au Fort 7. D’abord un fort, il avait été transformé en prison. Elle était entièrement souterraine et était sombre et froide. Une petite lumière électrique brûlait seulement pendant le jour. Deux fois par jour, on nous conduisaitdehors et nous devions courir alors sur une distance d’environ deux cents mètres et cela sous les coups de fouet et le tir des balles de fusils. C’était un réel « Enfer de Dante » !

Les cellules étaient pleines d’air impur dans lequel vivaient 158 prisonniers. Nous étions aussi emmenés pour de soi-disant exercices et de la gymnastique. Durant ces exercices on nous disait d’escalader une colline aussi vite que nous pouvions et en même temps nous étions battus avec des fouets, et des chiens spécialement entraînés étaient excités à nous attraper.

C’étaient de réelles tortures, mais pas un moment je ne doutais de l’aide de notre Seigneur et jamais je ne me décourageais quant à ma consécration et mon sacrifice. Je croyais que le Seigneur voulait seulement éprouver ma foi et mon amour. Me donnant à la prière, je demandai au Seigneur que je puisse supporter l’épreuve fidèlement. Partout j’ai vu la main du Seigneur sur moi qui me conduisait dans toutes ces épreuves et expériences.

Je fus toujours, par Lui, réconforté et fortifié. Pendant que j’étais dans cette cellule souterraine, je fus au milieu de divers prisonniers, Il y avait là des gens ignorants ou instruits et quelques prêtres catholiques romains. Avec ces derniers et en présence de tous les prisonniers j’eus une discussion sur le sujet Jésus est-Il Dieu ? La discussion dura plusieurs heures, et le Seigneur me donna la puissance de réfuter les erreurs catholiques sur ce point. La Vérité et les Saintes Ecritures remportèrent la victoire ! Tous les prisonniers admirent que c’est comme disent les Saintes Ecritures. La discussion m’ouvrit la voie pour parler sur la Vérité, après quoi je fus très actif en prêchant l’évangile du Royaume de Dieu.

La veille de Noël, je ne m’attendais à rien, mais je pensais aux promesses de Dieu données par notre Seigneur comme Roi et Libérateur de l’humanité. Les prisonniers faisaient des préparatifs pour cette soirée. Le surveillant des cellules préparait un programme en cette occasion. J’étais assis tranquillement lisant les Saintes Ecritures.

Je me servais des Ecritures dans ma cellule avec beaucoup de tact, je les étudiais et, comme Parole de Dieu, elles me réconfortaient et me fortifiaient. Le premier à parler en cette occasion fut le prêtre d’un monastère. Il fit une très courte causerie. Après lui, un professeur et artiste peintre spirite parla. Mais il ne dit pas grand chose non plus aux prisonniers.

La première et la seconde causerie n’étaient pas du tout sur le sujet de la veillée de Noël. Les prisonniers me demandèrent de leur dire quelque chose. Ils savaient que j’avais été arrêté à cause de la religion. Je fus heureux que le Seigneur me donnât de nouveau le privilège de parler. La base de mon discours fut Luc 2 : 10, 11. Je parlai pendant 25 minutes ; les cœurs des prisonniers étaient profondément émus et ils pleurèrent beaucoup !

L’entretien émut tous les cœurs dans les cellules de la prison, après quoi suivirent les souhaits les uns aux autres, que tous puissent retourner en bonne santé chez eux. Le prêtre du monastère et les prisonniers vinrent me donner un baiser sur la joue et dirent « Frère, nous vous souhaitons l’endurance et la victoire à tous vos moments en prison ». Je leur fis les mêmes vœux. Après cela j’eus une discussion avec le professeur et artiste spirite. Dans la discussion, la Vérité réfuta complètement sa compréhension erronée en présence de tous les prisonniers. J’étais aimé parce que je partageais avec chacun tout ce que j’avais.

L’incident suivant m’affermit encore plus dans l’obéissance et la fidélité envers Dieu : Le 8 janvier 1943, à 11 heures, eut lieu l’exécution de 32 polonais, dont 5 femmes. L’exécution eut lieu par pendaison. Neuf condamnés à la fois montaient à l’échafaud ils étaient condamnés pour leurs convictions politiques. Après la lecture du verdict, les membres de chaque groupe chantèrent l’hymne national polonais et donnèrent leur vie, hommes et femmes.

Au moment de l’exécution ils déclarèrent : « Nous mourons pour notre Pologne et notre Patrie ». C’étaient des gens qui ne connaissaient pas la Vérité et n’avaient aucune connaissance des bénédictions futures. Ayant reçu la bénédiction d’une telle abondance de grâce et de l’espérance des bénédictions futures, ma foi devint plus forte et plus courageuse.

S’il devait m’arriver de donner ma vie d’une manière semblable, j’étais sûr de pouvoir le faire, même avec un plus grand zèle et une plus grande fidélité qu’eux afin de pouvoir finir ma vie comme victorieux. Cette scène véritablement me ranima et me donna plus d’esprit de dignité et de courage, au point que je sentis la crainte me quitter entièrement. Je me rappelai aussi Joseph dans la prison en Egypte, les expériences de Job et celles de notre Seigneur dans le jardin de Gethsémané.

L’histoire de Joseph contribua grandement à mon zèle, à ma force et à ma fidélité dans le service pour le Seigneur. J’ai toujours remercié le Seigneur pour Sa grâce et Sa bénédiction que je reçus en prison, et que, en dépit des souffrances, Il m’ait donné le privilège de prêcher la Parole de Dieu, ce que je fis aussi souvent que je pus.

QUELQUES FAVEURS SPECIALES

Une grande surprise m’arriva. Comme prisonnier de confiance, on me fit sortir pour la première fois de la prison, c’est-à-dire en ville. Je travaillais avec un autre prisonnier dans une villa où nous posâmes des conducteurs électriques.

Dans cette villa vivait une famille polonaise à qui je demandai d’être assez bonne pour informer ma femme et ma fille que je travaillais là. Je désirais grandement les voir. Elles avaient le désir de me voir, car six mois avaient passé depuis que nous nous étions vus. Le Seigneur dirigea la chose de sorte que ma femme vint à cette villa et elle se déguisa comme si elle était sa propriétaire.

Oh ! Qu’il fut béni le moment où nous nous vîmes ! Là, nous parlâmes ensemble sur les causes de mon arrestation qu’elle ne connaissait pas à cette époque. J’appris aussi comment se trouvaient les frères et je fus grandement heureux.

Tous deux nous nous agenouillâmes dans la prière et remerciâmes notre bon et grand Dieu pour Sa grâce et Sa protection sur nous tous. Le jour suivant était un dimanche. Le Seigneur arrangea les choses pour que ma fille et les frères vinssent à la villa et j’eus le privilège de les voir. Ce fut un moment béni et heureux ! Je suis incapable de décrire la joie que j’ai expérimentée en les voyants.

Plusieurs semaines après, le Seigneur me prépara une joie plus grande encore. Un des membres de la Gestapo m’emmena chez lui pour faire dans sa maison quelque travail personnel. C’était une personne de caractère comparativement bon.

Après que j’eus achevé mon travail, il demanda si j’aimerais visiter ma famille ? Je répondis oui Il me conduisit chez un de nos frères dans la Vérité. Là, après en avoir été informés d’avance, ma femme et ma fille vinrent avec plusieurs frères. J’eus le privilège de rester là en compagnie de ma femme, de ma fille et des frères pendant quatre heures. En ceci, je vis la main du Seigneur sur moi.

C’était la dernière fois que je passais un moment en compagnie des chers amis à Poznan. Je fus emmené à ce terrible « camp de la mort » à Oswiecim (Auschwitz — le pire de tous les camps de concentration).

Heureusement, le Seigneur avant mon départ à cet endroit me donna le privilège de voir ma famille et les frères dans la maison d’un frère. La vue du camp d’Oswiecim fit sur moi une impression navrante. Mais je n’ai jamais douté de l’infinie puissance de Dieu. Priant continuellement, je croyais que Dieu seul pouvait me délivrer de tout !

Ma première expérience dans ce camp fut que je tombai malade de la grippe et d’une terrible diarrhée accompagnée de mauvais traitements et de coups. Il n’y avait aucun soin pour les malades, aucun malade n’obtenait d’être hospitalisé. On pouvait s’attendre à aller plus tôt au four crématoire. Aussi dans ces expériences je m’abandonnai entièrement à la volonté de Dieu et mis toute ma confiance en Lui. J’étais résigné au milieu des pires conditions que Dieu avait permises pour moi.

Cependant, même étant malade, je devais me lever avec tous au commandement pour plusieurs heures. Un jour, ma force m’abandonna entièrement et je perdis connaissance. Le Seigneur m’aida par le moyen des coprisonniers qui me soutinrent dans leurs bras afin que je ne tombe pas. Autrement, j’aurais été envoyé dans le quartier des malades, puis au four crématoire, comme il arrivait dans de tels cas.

Mais le Seigneur me permit de supporter cette expérience et, lentement, je recouvrai ma santé. J’étais grandement épuisé. Après plusieurs semaines, le Seigneur me donna de nouveau le privilège de me réjouir. J’obtins du travail et, en l’accomplissant, je pouvais me mouvoir autour du camp de concentration et me procurer de la nourriture qui me fortifia.

En cela aussi, la main du Seigneur fut sur moi ! Le Seigneur savait que j’aurais davantage d’épreuves, mais, fortifié, je serais plus capable de les supporter. Les épreuves subséquentes furent les maladies qui me mirent en danger ainsi que les autres, telles que la typhoïde, la malaria, la grippe, la diarrhée, etc.

Ces maladies en conduisaient des milliers à la tombe — au four crématoire. Quatre-vingt-quinze pour cent des prisonniers furent atteints de ces maladies.

Grâce à Dieu, je me tirai de toutes ces maladies et aidai les autres prisonniers autant que je pus. La destruction de masses de gens avait sur moi un effet attristant. La destruction était faite en tuant, gazant et brûlant.

Quoique voyant des gens entièrement dépourvus d’humanité et sans la moindre miséricorde, je ne déclinai cependant pas spirituellement. J’acceptai ces expériences en me soumettant à la volonté de Dieu. J’étais préparé à tout.

Plusieurs fois je fus arraché des mains de la mort. Par exemple, une fois, à minuit, au commandement du directeur du camp, tous les prisonniers durent se lever et se rendre à un lieu désigné. Là, ils durent se déshabiller entièrement et se tenir devant les membres de la Gestapo.

Deux bandits d’entre eux choisirent les gens qui devaient être gazés. Et de cela, le Seigneur me délivra, bien qu’il y eut 1 400 personnes choisies et brûlées dans le four crématoire. Ce fut un grand danger pour moi. Cette nuit, cette terrible nuit je ne l’oublierai jamais, je n’oublierai jamais comment ces gens qui n’avaient aucune foi se désespéraient, et ceux qui l’avaient se soumettaient à la plus terrible expérience. Je fus délivré par Dieu de ce danger.

AUTRES METHODES DE TORTURES DE LA GESTAPO

Le Seigneur permit encore que d’autres expériences m’arrivent. La méthode précédente n’était pas la seule que la Gestapo employait pour détruire les prisonniers. Ils connaissaient d’autres moyens de destruction. A 15 ou 16° au-dessous de zéro, ils nous conduisaient dans le froid et nous commandaient de nous déshabiller entièrement, puis nous emmenaient à trois cents mètres dans un établissement de bains. Là nous recevions un bain chaud.

Après ce bain, nous étions ramenés précipitamment sous de forts coups de fouets à nos quartiers. Dans ces quartiers, après quelques heures, on pouvait constater des pneumonies et d’autres maladies, suivies dans beaucoup de cas par la mort. Et de toutes ces expériences, le Seigneur me fit sortir sain et sauf.

En vérité, le Seigneur éprouve tous ceux qui L’aiment de tout leur cœur et de toute leur âme ; mais Il les délivre de toutes ces épreuves. Après ces expériences, j’eus beaucoup de joie, car le Seigneur me donna le privilège de prêcher l’Evangile dans cet horrible « camp de la mort ».

Dans ce camp, j’eus le privilège de gagner un frère, Boleslaw Sobala, un frère bien aimé dont je fis la connaissance avec la Vérité. Aujourd’hui, entièrement consacré, il se réjouit dans la liberté, vivant à Gdansk et je suis en correspondance avec lui.

J’eus aussi diverses discussions avec plusieurs personnes instruites telles que des instituteurs, des professeurs et des membres du clergé. A cause de cela je devins connu dans le camp de telle manière qu’ils m’appelèrent « évêque ».

En dépit de dures épreuves, le zèle pour la Vérité ne m’abandonna pas. Comme pour Jérémie « Sa Parole était dans mon cœur comme un feu brûlant, renfermé dans mes os je fus las de la retenir, et je ne l’ai pu » 20 : 7 à 9, ainsi il en était pour moi. Et comme l’Apôtre le dit en 1 Jean 4 : 18 : « Il n’y a pas de crainte dans l’amour, car l’amour parfait bannit la crainte ».

J’avais acquis la conviction que quiconque se confie en Dieu entièrement et s’appuie sur Lui de tout son cœur, se sent toujours en sûreté, même si les temps peuvent être très dangereux. Quand c’est le moment de prêcher la Vérité, le Seigneur donne toujours l’occasion favorable de le faire.

J’APPORTAI AUSSI BEAUCOUP DE CONSOLATION AUX JUIFS

J’apportai aussi beaucoup de consolation aux Juifs. Je les réconfortais en leur disant que dans un avenir prochain le Royaume serait établi en Palestine ; que même s’ils allaient à la destruction dans le four crématoire, ils sortiraient de leurs tombeaux et que le Messie les ressusciterait. Dans la crainte de la mort, les Juifs se réunissaient continuellement en groupes et faisaient des prières.

Le désespoir était terrible parmi ces Juifs. J’ai souvent pensé à la prophétie de Jérémie 16 : 16 à 18 qui s’accomplissait devant mes yeux. Au milieu des plus dures expériences dans lesquelles je me trouvais, ma foi ne cessa pas, mais devint encore plus forte. Beaucoup des magnifiques exemples donnés par frère Russell furent un secours qui m’aida à supporter mes expériences, par exemple que chaque « vase » doit passer par un feu intense avant de devenir tel.

Une bonne chose pour moi fut la connaissance de Daniel chapitre 3 et « des trois jeunes hébreux dans la fournaise ardente », hors de laquelle ils sortent victorieux !

A cause de l’approche du front russe, le 1er novembre 1944 je fus évacué dans un autre fameux camp de concentration, à Oranienburg, en Allemagne. Là, à la station de chemin de fer, nous fûmes accueillis à grands coups de fouets, à la suite desquels plusieurs perdirent connaissance.

Nous fûmes conduits dans une des salles de ce camp et, sans aucun soin, nous dormîmes sur le sol sans couverture et sans soin de propreté. Ici commença mon dur travail, de 6 heures à 19 heures.

Ensuite des appels qui duraient plusieurs heures au dehors, la tête découverte où la neige tombait et fondait et coulait sur la figure. Nous avions sur nous un vêtement léger, des souliers entièrement usés et dans lesquels l’eau entrait, mes pieds étant à cause de cela continuellement froids.

Les nuits étaient troublées par plusieurs raids. Durant le jour, le dur travail, la faim et la soif m’accablaient, et la nuit le manque de sommeil. Jour après jour je perdais du poids. Ce fut une dure expérience pour moi ! Voyant que la fin de la guerre s’approchait, mon désir de liberté était grand.

Comme le front russe s’approchait de Berlin, il fut décidé d’évacuer le camp. Une nuit, tous les prisonniers furent conduits dehors à une place indiquée et obligés de quitter le camp. Nous allâmes à pied dans la direction de Hambourg. Plus de 40 000 prisonniers furent emmenés de ce camp.

Tous les jours nous faisions environ trente kilomètres. Nous allions avec une forte escorte de baïonnettes et de carabines, ne recevant aucune nourriture en chemin. La faim augmentait jour après jour. Quiconque faiblissait sur la route était tué d’un coup de fusil. La faim nous obligeait à manger la végétation qui croissait sur le bord de la route, y compris des betteraves. Les nuits se passaient dans les granges ou dans les forêts à ciel ouvert.

Une nuit, je fis le plan avec un frère de nous enfuir, voyant la mort par la faim devant nous et étant sans aucun soin humain. Notre seule confiance était en Dieu ! Je résolus avec le frère de demander le conseil du Seigneur.

Dans la forêt, sous un arbre, je priai le Seigneur pour demander si je devais entreprendre de rester ou de m’échapper. Le Seigneur me donna à comprendre que je reste dans les bois jusqu’au matin. Ainsi, sous l’arbre où nous priions nous nous endormîmes jusqu’au matin. Nous n’avions rien pour dîner ou souper. Notre souper fut la prière ! C’est ainsi que nous dormîmes là jusqu’au matin.

Le Seigneur me conseilla de ne pas me séparer des autres. Nous allâmes encore une journée. Nous étions très faibles. Nous étions conduits sur des routes par lesquelles les armées allemandes battaient en retraite dans la direction de la mer. En chemin nous vîmes des combats aériens et des bombardements de routes sur lesquelles les armées allemandes battaient en retraite.

Un grand danger nous menaçait tous. Après plusieurs heures de marche, les batailles s’arrêtèrent. Nous apprîmes qu’en face de nous étaient les armées américaines. Une grande joie s’ensuivit dans nos cœurs à tous !

En approchant à environ 200 mètres vers un pont qui traversait une rivière, nous y vîmes des soldats des armées américaines. A la vue de ces soldats l’hymne national polonais fut entonné par les prisonniers, d’autres nations s’y joignant.

On n’entendait plus que des expressions de joie enthousiaste ! Un cri de liberté en l’honneur de l’Armée américaine s’éleva ! Je donnai la main au frère qui allait avec moi et dit Dieu a sauvé nos vies !

Tous les prisonniers ressemblaient à des squelettes, en haillons, altérés et épuisés. Notre marche avait duré du 21 avril au 2 mai 1945. Ce fut le point culminant de mes souffrances dans mon épreuve ! En chemin, nous avions perdu 15 000 prisonniers qui étaient tombés par suite d’épuisement et avaient été détruits.

Ainsi que je l’avais pensé à mon arrestation, je ne serais pas libre avant la fin de la guerre. Le soin de Dieu m’avait éprouvé et gardé à chaque pas jusqu’au temps de ma délivrance. Bien que très épuisé, j’étais heureux de ma liberté.

Je pesais 55 kilos contre 92 à mon arrestation. Je demeurai pendant une période de trois semaines dans un camp polonais où je gagnai un peu de forces. Le Seigneur dirigea mes pensées de façon à me décider à retourner à Poznan. Je vis cependant que mon voyage ne serait pas aisé, car les trains n’étaient pas encore rétablis et cela à cause des ponts détruits.

Nous décidâmes d’entreprendre le voyage à l’aide de chevaux et de voitures. Nous trouvâmes deux chevaux sans propriétaires avec lesquels nous commençâmes notre voyage. Nous allâmes ainsi pendant huit jours.

Nous arrivâmes à la première station de chemin de fer à Steten (Szczecin) d’où, par train, nous atteignîmes Starogard. Il y avait là un train qui devait partir pour mon lieu de résidence, Poznan.

Je fus très heureux d’être dans mon pays natal. Je me tins sur le toit d’un wagon et non à l’intérieur, parce qu’il n’y avait plus de place dans la voiture. Je me demandais continuellement si ma famille était encore en vie, parce que pendant six mois je n’avais rien su d’elle ; et je savais que, dans Poznan, les batailles de rues avaient fait rage pendant trente jours.

En chemin, j’appris que Poznan était fortement endommagé. J’avais une forte foi que le Seigneur avait gardé ma famille pour laquelle je priais continuellement. J’avais prié aussi le Seigneur de garder toute ma littérature biblique, ce qu’il fit aussi.

Je fus très heureux d’arriver à Poznan. Puis je fus heureux que ma maison n’était pas détruite. Et je fus plus heureux encore quand je rencontrai ma famille qui était au complet et en très bonne santé, et ma littérature biblique intacte ! Ma joie était sans limites ! O la joie quand je vis pour la première fois les visages des chers et bien-aimés frères de l’assemblée de Poznan ! Je fus reçu par eux avec affection !

Je retrouvais à présent les choses comme je les avais laissées trois ans et deux mois avant. J’étais très heureux que les frères aient tenu si fidèlement dans diverses épreuves et expériences, et presque toute ma famille qui avait perdu son soutien.

Cependant, notre Seigneur avait pris soin d’elle. Pour cette raison, ma première pensée fut de rendre avec ma famille mes plus sincères remerciements à notre Dieu pour toutes les épreuves expérimentées, pour la grande faveur, et l’inexprimable protection qu’il nous avait montrée durant cette terrible guerre. « Grandes et merveilleuses sont Tes œuvres, O Seigneur Dieu Tout-Puissant ! Justes et vraies sont Tes voies O Roi des Saints ».

Les paroles de Deut. 31 : 8 étaient vraiment accomplies « L’Eternel est celui qui marche devant toi ; il sera avec toi ; il ne te laissera pas et ne t’abandonnera pas ; ne crains point et ne t’effraye point ».

à propos de l'auteur
LA « COMMISSION D'ISRAËL » œuvre sous ce nom depuis 1955-1956 sur l'initiative du professeur Raymond Grant Jolly. En France, depuis 1970-2017 sous la responsabilité de M. Gilbert Hermetz et depuis 2003 de M. Jacques Obojtek. Soutien et encouragements à Israël centre éternel de l'attention du monde « nahamou nahamou ami » - esaïe 40 : 1-2 - israelvivra.com
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