Au-delà des mots
On ne doit pas s’étonner de la déclaration d’Itamar Ben Gvir à la douzième chaine : « Mon droit, le droit de mon épouse et de mes enfants de se déplacer sur les routes de la Judée-Samarie, sont plus importants que la liberté de déplacement des Arabes ». Il exprime là le fond de sa pensée : les Juifs ont des droits supérieurs à ceux des Palestiniens (qu’il ne veut pas nommer ainsi), y compris en Cisjordanie. C’est même le fond de sa pensée et ce n’est donc pas lui faire un procès d’intention que de le qualifier de suprémaciste. Bezalel Smotrich partage cette idée et les deux compères entendent bien profiter de leurs nominations à des postes-clefs pour réaliser leur grand projet : renforcer la présence juive en « Judée-Samarie ». Bezalel Smotricht l’a même chiffré : faire passer le nombre d’habitants juifs dans ces territoires de cinq cent mille à un million. Ce ne sont pas des paroles en l’air. Il a autorisé depuis le début de l’année la construction de milliers de logements, agi au jour-le-jour pour légaliser des implantations sauvages et voulait faire adopter par le conseil des ministres du 27 août un grand plan de développement. La vague de terrorisme a conduit le Premier ministre à retirer ce point de l’ordre du jour en raison des tensions qu’il pourrait exacerber. Il a une autre bonne raison de différer ces projets : le refus de l’administration américaine de cautionner la moindre initiative concrétisant cette annexion rampante qui pourrait déboucher sur une annexion officielle des territoires palestiniens. D’ailleurs, l’administration américaine s’est empressée de condamner les propos d’Itamar Ben Gvir. Binyamin Netanyahou doit faire preuve de la plus grande prudence. Le mois prochain, il entend bien rencontrer le président Jo Biden en marge de l’Assemblée des Nations Unies à New York, ou mieux encore à la Maison Blanche. Il sait que le président américain fait preuve d’autant plus de fermeté qu’il aimerait bien conclure un accord avec l’Arabie Saoudite auquel Israël serait associé. L’héritier de la couronne du Royaume, Mohammed Ben Salman (MBS), l’a clairement fait savoir : il ne saurait y avoir de normalisation avec Israël sans un geste en direction des Palestiniens, en matière de liberté de circulation par exemple. Tout le contraire du principe défendu par Itamar Ben Gvir qui, au-delà des mots, entend bien ne rien concéder.