Appel aux rabbins orthodoxes, conservateurs et libéraux sur la souffrance animale

Image illustrant du bétail (Crédit : Abed Rahim Khatib/Flash90)
Image illustrant du bétail (Crédit : Abed Rahim Khatib/Flash90)

Il y a deux mois, j’avais pris l’initiative de rédiger une lettre ouverte au Grand-Rabbin de France Haïm Korsia concernant la question de la maltraitance animale et de l’abolition à terme de la shehita.

Cette lettre ouverte, se fondant sur les principales sources hébraïques, ne vise en aucune manière à renouveler le judaïsme orthodoxe mais à rappeler les grandes valeurs éthiques de la Tradition biblique et talmudique qui, sensible à la souffrance animale, en appelle à la bienveillance envers des êtres impuissants à se défendre et à exprimer leur supplice quotidien.

Il nous semble plus qu’urgent d’ouvrir un débat ouvert et fécond au sein du Judaïsme français à propos de cette question souvent tabou de la souffrance animale et de la shehita, l’abattage rituel. Cette question est d’ailleurs fortement débattue en Israël et aux Etats-Unis sans problème aucun.

Pourquoi n’en serait-il point de même en France ? Pourquoi le Grand-Rabbin de France Haïm Korsia tient-il à conserver le silence alors que sa voix apporterait très probablement de nouvelles lumières à ce sujet ? Le Grand-Rabbin de France Haïm Korsia ne repousse-t-il point une partie de ses frères ? Craint-il de ne point être à la hauteur de sa mission morale ?

Toutefois, dans un monde sans cesse en évolution, la cause du végétalisme gagne en ampleur au sein de nombreuses communautés juives en Israël et aux Etats-Unis désormais disposées à en débattre. Ces communautés prennent conscience de la vocation juive universelle de Tikkoun HaOlam (Réparation du monde).

Nous avons connu de nombreuses évolutions au sein du Judaïsme orthodoxe, par exemple le rôle et le statut des femmes, l’approche pédagogique à l’égard des enfants. La pratique de la cacherout évolue également avec, par exemple, l’interdiction par certains rabbanim de consommer du foie gras et considérer ce sujet frivole ou à la légère démontre un grave retard spirituel provenant du Consistoire de France.

Cette lettre ouverte, soutenue par de nombreux Juifs de toutes tendances religieuses confondues, diffusée uniquement par le Times of Israël et refusée par les autres médias juifs français[1], n’a malheureusement toujours point trouvé l’écho que nous espérions de la première autorité juive religieuse française.

Ce refus, touchant à l’indifférence, jette un grave discrédit non point seulement d’un point de vue religieux mais aussi éthique sur le Rabbinat français dans la mesure où le Grand-Rabbin de France Haïm Korsia, en tant que premier dirigeant juif religieux, aurait dû répondre publiquement, exposer sa thèse officielle au monde juif qu’il représente.

Dans l’attente d’une réponse du Grand-Rabbin de France Haïm Korsia, nous appelons l’ensemble des rabbins et dirigeants spirituels de France de toutes tendances confondues : orthodoxe, conservatrice et libérale à prendre position en s’exprimant publiquement sur la problématique de la souffrance animale et à librement exposer leurs thèses et leur vision sur cette question d’éthique universelle.

La Torah ne s’adresse point uniquement aux Juifs mais a pour vocation d’enseigner au genre humain la voie d’une plus grande humanité et compassion envers toutes les créatures :

« L’Eternel est bon pour tous, Sa Miséricorde s’étend à toutes Ses créatures ». (Psaume 145 : 9).

L’Eternel, dans Son infinie Compassion, ne discrimine aucune créature ! Pourquoi ne point imaginer que l’on puisse, en 2020 – 5781, réfléchir à l’établissement d’un Manifeste commun aux trois grandes mouvances juives françaises relative à la souffrance animale qui aboutirait, en définitive, à l’Idée fondamentale de la primauté du Vivant ?

[1] André Darmon, directeur et rédacteur en chef du magazine mensuel franco-israélien « Israël Magazine », a accepté la publication de mon article « Shéhita, réflexion sur la maltraitance animale » dans lequel je fais mention de l’abolition de la shehita. (Août 2020, numéro 235).

à propos de l'auteur
Diplômé de l’Institut des Civilisations et Langues Orientales de Paris (INALCO) et certifié de l’Institut Catholique de Paris (ICP) enseigne la Bible (TaNa’Kh), sa langue, son éthique et son histoire. Installé, depuis son Alya en 1989 à Ashkelon, il participe activement au refleurissement d'Erets Israël. Végétarien par conviction morale, Haïm rêve d'une ère nouvelle où les grandes spiritualités pourraient se rencontrer en vue d'instaurer un monde meilleur. Convaincu que le retour du peuple d’Israël en Erets-Israël annonce la restauration de l'idéal de fraternité abrahamique, il encourage le dialogue interreligieux dans le respect de l'autre
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