Allons-nous être sauvés ?
Nous vivons depuis 11 mois des évènements que l’on peut qualifier de ‘bibliques’ tant par la rapidité de leurs apparitions, que par la violence de leurs manifestations et la sidération qu’ils causent. Ce que nous considérions comme acquis ne l’est plus et le sanctuaire du foyer, de la maison, l’endroit sécuritaire par excellence ne l’est plus.
En janvier 2023 un gouvernement a vu le jour en Israël. Quelques mois après la société israélienne s’est fracturée en deux clans irréconciliables rendant le dialogue impossible. En janvier 2023, nous étions une nation où l’indice du ‘bonheur’ était un des plus élevés au monde et ce, malgré les roquettes qui nous frappent tous les neuf mois.
Israël pays du Hi-Tech, de la réussite, pays dont l’influence mondiale est sans proportion avec la grandeur de sa population ! Et voilà qu’en l’espace de quelques mois, ce pays se désagrège, se fissure, voilà que le shekel s’effondre, que les forces vives du pays le quittent ou sont en voie de le quitter. Voilà que des milliers de jeunes disent qu’ils ne veulent pas servir dans une armée dirigée par un gouvernement qui ne serait plus démocratique. Un pays ou le système judiciaire qui est le seul rempart légal contre l’autocratie est ébranlé et ne serait plus en mesure de protéger les soldats devant un tribunal international. Un pays où des budgets de coalition sont distribués massivement à des parties sectaires. Un pays qui prépare une loi exemptant définitivement de leurs obligations militaires 20 % de la population juive.
En mars 2023, le ministre de la Défense annonce à la télévision que le pays est en danger sécuritaire du fait de la réforme judiciaire et demande un gel des lois en préparation. La réponse est donnée en juillet 2023 par la Knesset qui vote une loi limitant les pouvoirs de la Cour suprême par 64 voix contre zéro. Les autorités militaires dont le chef d’état-major, le chef du Mossad et du Shabak (agence de sécurité intérieure Shin Bet) ont tenté désespérément et en vain de parler au Premier ministre et d’autres responsables avant le vote de la loi pour les prévenir de l’impact dévastateur que cette législation aurait sur l’armée et les services spéciaux.
Hélas la poursuite d’intérêts politiques à court terme a prévalu sur la sécurité du pays !
Il était clair à l’été 2023 que le pays courrait vers un danger existentiel si rien n’arrêtait la dégradation initiée par le gouvernement.
Notre économie s’affaiblirait, notre sécurité serait affectée, notre relation avec l’Amérique faiblirait, notre société se désagrégerait et nos ennemis n’auraient plus qu’à attendre que le fruit pourri tombe de l’arbre. Il semblerait qu’ils (nos ennemis) n’ont pas eu suffisamment de patience et sont passés à l’acte prématurément.
Très nombreux ont été les commentateurs israéliens qui ont prévu une action militaire hostile de grande envergure suite à la cassure de la société israélienne. En général, ils pensaient que l’initiative viendrait du côté du Hezbollah, peut-être de l’Iran et accessoirement de l’enclave de Gaza. A ma connaissance, personne n’a prédit le scenario actuel où un ennemi certes bien armé et motivé mais néanmoins secondaire par rapport aux forces des autres acteurs; pourrait causer des dévastations telles qu’Israël n’en avait pas connu depuis 1948.
Notre histoire ne commence pas en 1948, elle débute quelques millénaires avant et nous ne pouvons pas nous déconnecter de notre lointain passé. Ce qui est arrivé le samedi 7 octobre 2023 est un évènement inexplicable rationnellement. Comment comprendre que nos services de renseignement ont laissé échapper une opération de cette envergure ! Mais surtout comment est-il possible que les secours aient mis tellement d’heures avant d’arriver ? Nul doute qu’il y aura des commissions d’enquête et nul doute qu’après toutes les investigations nous ne comprendrons toujours pas pleinement l’autopsie de cette catastrophe qui nous a tous sidérés. Cependant pour le lecteur de la Bible, il y a une impression de déjà-vu :
L’Éternel te fera écraser par tes ennemis : si tu marches contre eux par un chemin, par sept chemins tu fuiras devant eux ; et tu seras un objet de stupéfaction pour tous les royaumes de la terre. (Deut ch28, ver 25)
Il y a de très nombreux exemples dans la Bible qui établissent un lien direct entre la conduite morale du peuple et les catastrophes qui l’affectent. D’où est venue cette cécité qui nous a frappés ? Sans entrer dans des considérations mystiques, il y a un large consensus qui établit un lien étroit entre cette guerre et la dégradation récente de la société israélienne.
Nous avons reçu un coup de poing dans l’estomac mais l’existence de l’Etat n’a jamais été mise en danger.
Il aurait pu en être autrement…
Du point de vue du Hamas, la réussite de son plan dépendait en grande partie de l’effet de surprise. Dans ce contexte le secret le plus absolu était une obligation. Pour conserver au mieux ce secret, le Hamas n’a donc vraisemblablement pas informé ses alliés, l’Iran et le Hezbollah de la date de son action. La date du 7 octobre a sans doute été choisie car ce jour-là il y avait une ‘rave party’ où des milliers de jeunes seraient présents. Condition idéale pour préparer un massacre de masse. L’Iran et le Hezbollah ont été surpris et dans un premier temps n’ont pas su quelle conduite tenir. Si l’action avait été préméditée à l’avance par ces deux entités, celles-ci seraient intervenues le premier jour en ne laissant pas à Israël et aux USA le temps de s’organiser. Cette indécision a permis à Israël de mobiliser et à l’Amérique de se mettre en alerte. Nous avons sans doute échappé à une catastrophe encore plus incommensurable…
Sans être fatal, le coup que nous avons reçu était d’une amplitude suffisante pour changer le jeu d’une guerre dite asymétrique, qui jusque-là faisait qu’Israël n’était pas autorisé à intervenir massivement à Gaza et donc à détruire le Hamas du fait des victimes collatérales civiles qu’une telle action entrainerait. La guerre des images était toujours largement gagnée par le Hamas. La presse mondiale comparant le nombre de victimes israéliennes causées par des milliers de roquettes mais qui faisaient peu de victimes (rarement plus d’une dizaine) contre des centaines, voire des milliers de victimes palestiniennes. Un des paradoxes de cette guerre est que ‘le succès’ du Hamas causera peut-être sa perte, car Israël est apparemment cette fois-ci décidé à débusquer les assassins là où ils se trouvent.
S’il s’avère qu’une guerre totale se joue avec le Hezbollah, alors l’équation se renforcera, on ne regardera plus de quels côtés viennent les pertes israéliennes. Israël agira donc au Sud de la même manière qu’il agira au Nord.
Nous nous concentrons sur les opérations militaires, sur l’aspect stratégique, sur nos rapports avec l’Amérique et les pressions de nos alliés. C’est logique nous sommes en guerre. Mais, là n’est pas le vrai problème, la cause de l’épreuve que nous subissons est la désintégration de la société israélienne qui a précédé les évènements que nous vivons. Cette détérioration s’arrête aujourd’hui face à la menace commune. Nous devons en tirer les leçons, pour que les mêmes causes ne reproduisent pas les mêmes effets, peut-être en pire.
La notion de ‘Teshouva’ (le pardon, le retour) est essentielle dans le judaïsme. Les guides spirituels qui ont soutenu les partis de Smotrich et de Ben-Gvir doivent impérativement faire un examen de conscience : où nous ont-ils emmenés ? Ils ne peuvent échapper à leur responsabilité. Ils ont cédé au mirage, qu’en affaiblissant les pouvoirs de la Cour suprême; la force politique leur permettrait de réaliser leur rêve d’un Grand Israël. Au prix d’une cassure dans notre société et de la haine entre nous.
L’heure est à l’union, mais pour que cette union se fasse, cette prise de conscience est essentielle et urgente.
Ils ont maintenant le choix entre deux chemins,
– La Repentance
– Accuser les ‘anarchistes gauchistes’
De leur attitude dépend notre futur. Allons-nous être sauvés ?